mardi 26 juillet 2011

R.E.M. - Verse/Chorus/Verse

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Mésestimé par quelques doux dingues (dont votre serviteur jusqu'à la semaine dernière - autant commencer par les aveux), vénéré par la plupart des autres, Lifes Reach Pageant est un album un peu à part dans la discographie du quatuor-désormais-trio d'Athens, en cela qu'il est l'un des seuls, avec peut-être le méconnu Around the Sun (mais les albums des années 2000 ne comptent pas) à ne pas avoir une ligne directrice précise à laquelle il se tiendrait de bout en bout. Beaucoup plus rock que les précédents (c'est flagrant sur le sanglant 'Begin the Begin', qui eût fait un véritable killer single), assez éclectique, parfaitement décomplexé, il symbolise à la fois l'accomplissement de la première période de R.E.M. et le début de sa mue en ce groupe de rock-indé-mais-commercial-mais-jamais-FM-mais-qui-quand-même-vend-des-millions-mais-qu'on-aime-quand-même que l'on connaît aujourd'hui - mue qui culminera avec les trois albums suivants (l'excellent Document, le moyen Green et le multiplatiné Out of Time). Lifes Reach Pageant fut d'ailleurs en son temps le plus gros succès du groupe, et s'il demeure certainement bien trop intello pour la ménagère, il est évident qu'une grande part du R.E.M. des années 90/2000 s'est construite ici.

S'il fallait résumer cette mue en un mot, on opterait sans doute pour celui de "refrain". C'est certainement qui frappe le plus à la première écoute : après un Fables of the Reconstruction/Reconstruction of the Fables dont le seul titre disait déjà tout de la nature pour le moins abscons, le groupe donne le sentiment de s'être enfin libéré, pour mieux se reconvertir en maître dans l'art du refrain imparable (ah ! ce 'Cuyahoga' !), à faire passer ses antiques 'Bandwagon' ou 'Driver 8' pour du prog-rock sous neuroleptiques. L'auditeur n'ayant jamais croisé la route de ce pugnace Lifes Reach Pageant devrait comprendre assez vite à quoi il a affaire : à une machine à tube d'autant plus improbable que le groupe, cela deviendra dès lors une constante dans sa carrière, n'essaie jamais de faire la pute, et s'autorise toutes les excentricités ; délires limites mariachis ('Underneath the Bunker'), breaks country (l'intro d''I Believe'), folk psyché ('Swan Swan H') et même brûlots écolos (en 1986 !) avec le single 'Fall on Me' et 'Cuyahoga'. Globalement énervé, à tout le moins passablement excité, R.E.M. enquille les titres rageurs ('Just a Touch') ou survitaminés (la reprise du 'Superman' de Clique), faisant montre d'une spontanéité qu'on ne lui connaissait pas jusqu'alors - et qui tranche brutalement avec la torpeur des Fables publiées à peine un an plus tôt. Il réussit par-là même la performance paradoxale de signer à la fois son album le moins ambitieux et le plus abouti des années quatre-vingts.

Faut-il le préciser ? Les démos de cette double réédition sont un véritable régal, mais il est vrai que l'auditeur attentif aura noté depuis longtemps que Stipe et ses copains font partie du club très fermé des groupes comptant certains de leurs plus grands morceaux hors-albums. Ici, entre 'These Days', 'Hyaena' et le génial 'Bad Day' (qui ne paraîtra officiellement qu'en 2003), la liste est interminable et l'on s'épargnera de fait une trop longue énumération. De toute façon, vous avez sans doute déjà compris qu'il s'agit de La Réédition du Mois (*)


👑 Lifes Reach Pageant [25 Anniversary Edition]
R.E.M. | EMI, 2011 [I.R.S, 1986, pour l'éd. originale]


(*) Rappelons que ce calcul totalement subjectif est effectué via de nombreux critères scientifiques et sociologiques, prenant en compte une équation (qualité du contenu original + qualité des bonus) x (soin de l'objet) / (nécessité de redécouverte).

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