mercredi 12 janvier 2011

Misfits - The Dark Stuff

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Écrire la seconde saison d'une série à succès n'est jamais chose aisée. A plus forte raison lorsque la première, en plus d'avoir fédéré une large attention de la part du public, s'est avérée être de l'avis général une remarquable réussite. Les écueils sont nombreux, et la seconde saison de s'avérer aussi souvent un accomplissement qu'une foirade, y compris au sein des plus grands shows. De toute façon quoiqu'il advienne, la seconde saison d'une série n'est jamais la meilleure. Jamais. C'est une règle immuable. Même lorsqu'elle est brillamment réussie (chez Breaking Bad ou The Wire, par exemple), la troisième ou la quatrième finiront par la surclasser. Aucune importance, du reste, puisqu'elle est très régulièrement ratée, l'écueil le plus répandu étant la surenchère. De personnages, d'évènements, de décors, de rebondissements... la surenchère de tout. Un péché d'orgueil, le plus souvent : on veut faire encore plus fort, encore plus clinquant, encore plus ambitieux... et l'on finit par effectuer une sortie de route, au risque de ne jamais plus quitter le bas côté (on a une pensée émue pour Heroes ou Damages en écrivant ces lignes).

On n'était pas forcément très rassuré pour Misfits au moment d'entamer le second chapitre. Il n'y avait pas de raison particulière à cette inquiétude, de raison objective. Les premiers épisodes, l'an passé, avaient été plus qu'une bonne surprise. Le show paraissait avoir le potentiel pour durer et continuer de surprendre durant un moment. Il n'y avait aucune raison de s'en faire et c'est sans doute précisément pour cela qu'on ne pouvait être qu'inquiet. En cherchant bien, il y a sans doute d'autres facteurs : Misfits est une série anglaise, et nos amis britanniques sont meilleurs au sprint qu'au marathon. Et puis c'est un teen-show, et l'on sait que les programmes pour jeunes peuvent facilement vriller et loucher vers le soap ou la mauvaise comédie. Mais honnêtement, la vérité pure et simple, c'est que la première saison était tellement bien qu'on voyait mal comment la suite pourrait être encore mieux.


L'effet de surprise dissipé, Misfits s'en sort pourtant de manière plus que convaincante, alors même qu'elle marche sur un fil de plus en plus ténu entre premier et second degré. Cela ne constitue pas une nouveauté en soi, encore moins une révolution : comme toute série s'inscrivant dans la filiation de Buffy - et celle-ci est en l'une des plus belles et dignes héritières - Misfits se devait à un moment ou un autre de négocier son "dark turn" personnel. Si surprise il y a, c'est peut-être dans le fait qu'elle se soit donnée cette peine aussi rapidement, quand on s'attendait plutôt à la voir capitaliser encore un peu sur le côté jeune et fun de la saison un. Mais il est vrai que cette dernière renfermait déjà des passages étonnamment sombres, lesquels prennent définitivement le dessus dans ce second volet bien plus mûr et bien moins fun... mais encore meilleur.

On passe donc aux choses sérieuses, et si l'évolution n'a rien de brutale on demeure malgré tout assez bluffé par la noirceur du season premiere, sa violence et l'atmosphère poisseuse qui s'en dégage. La suite est plus aérée ; elle n'est pas moins ambitieuse. Terminés les gimmicks d'autrefois, les intrigues un peu légères et les épisodes stand alone. Sans jamais se départir de leur ironie ni de leur sens du dialogue, les scénaristes, dont le budget a été revu à la hausse, se lâchent et osent un véritable suspens, une toile de fond plus complexe et des rebondissements en série. Pour parler simplement : ça marche du feu de Dieu. Misfits, que l'on retrouvait déjà avec grand plaisir l'an passé, devient terriblement addictive et parvient même à plusieurs reprises à prendre complètement à revers, car à l'omniprésence du danger vient s'ajouter une aura de mystère dont l'épaisseur ne lasse d'étonner dans ce type de programme. En ressort même un étonnant paradoxe : Misfits prend du galon en faisant exactement ce que l'on était ravi qu'elle ne fasse pas dans sa première saison ; à savoir s'attarder sur l'origine des pouvoirs et opérer un élargissement, en traitant cet évènement de manière plus globale et non plus seulement dans l'intimité de ce petit groupe de jeunes "délinquants". C'est d'ailleurs précisément parce qu'elle a eu l'intelligence de se concentrer d'abord sur son noyau dur de personnages que la série enthousiasme dans ce passage à des choses plus premier degré. Les enjeux individuels étant à présent posés, il n'y a pas d'obstacle à ce que l'avenir du monde soit désormais en question - d'autant qu'on sent bien qu'on est tout de même pas près de voir Kelly en Wonder Woman (reconnaissons qu'on espère même ne jamais voir un truc pareil). Comme dans toute bonne série de super-héros qui se respecte, la différence se fait progressivement vecteur de l'intégration sociale autant que menace d'exclusion. Difficile à ce stade de dire précisément sur quelle face va retomber la pièce (il faut dire que la saison semble plus que jamais trop courte). Il est certain en revanche que la troisième saison sera décisive, pour les personnages comme pour l'avenir d'une série qui devra multiplier les efforts pour continuer de se bonifier. Pourtant cette fois-ci, on a nettement plus envie d'y croire. D'autant qu'après Un village française, c'est la seconde fois cette saison qu'une série européenne vient titiller la suprématie américaine sur son propre terrain (quoi de plus américano-américain que les histoires de super-héros et les comics ?). Il serait dommage de s'arrêter en si bon chemin.


Misfits (saison 2), créée par Howard Overman (E4, 2010)

24 commentaires:

  1. J'aime, j'adore, je prie Misfits tous les jours !
    Vivement la 3 ...

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  2. Je suis décidément fan de cette série. Rarement vu un truc de super-héros aussi bien fichu.

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  3. N'ayant pas de série sur le feu en ce moment, après t'avoir lu -ainsi que les brefs "\o/" des deux zigotos là-haut- je sens que je vais m'y adonner.
    Merci le Golb de nourrir mon addiction ! ;)

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  4. Ca me semblait bizarre aussi de pas avoir vu encore ta chronique apres une si bonne saison.

    On a une vraie evolution des personnages et un nouveau personnage principal, et cela continue a etre frais et bien trouve. Vraiment une grande serie.

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  5. Je n'ai vu que la saison 1 (grâce à toi), que j'avais vraiment trouvée très bonne. Si c'est encore mieux...

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  6. Pour une fois tout le monde est d'accord. Super série !

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  7. Effectivement tout le monde semble ravi. Donc moi aussi :-)

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  8. Moui. Je suis un peu sceptique devant ce coeur de louanges. La saison 1 ne m'a pas tué non plus...

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  9. C'est parce que tu n'aimes pas que les Anglais vous mangent la laine sur le dos, vieux ;-)

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  10. Doit être ça ^^

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  11. Tiens, tu as vu que Robert Sheehan quittait la série?

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  12. Je ne dirais pas que c'est une bonne nouvelle, cela dit je le trouvais de plus en plus cabotin et il ne va pas vraiment me manquer ; par contre les midinettes ne s'en remettront sans doute pas...

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  13. C'était quand même un sacré personnage...

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  14. Je traversais un creux de la vague télévisuel, Misfits m'a tiré de mon apathie... J'en suis au milieu de la saison 2 et je ne descotche pas. J'adore les personnages, l'atmosphère, la narration nerveuse... Des anti-heroes qui dépotent.

    (Kelly en Wonder Woman, c'est effectivement impossible. je pense que ça pourrait même faire fondre nos globes oculaires)

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  15. Déjà Kelly en Catwoman, on a failli jamais s'en remettre ^^

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  16. Viiiiite, chassons cette image... VIIIIIIITE !

    Enfin bon, je suis sous le charme de Simon (alors que bon hein :-S), pas de quoi faire la maligne.

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  17. Simon a un tel magnétisme, c'est assez difficile de lui résister. Iwan Rheon est sans aucun doute l'un des grands acteurs anglais de demain.

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  18. C'est simple, il prend toute la place, malgré le cabotinage de Nathan et le côté sympa/coolos de Curtis. Tout jeune et déjà si bon. Mais j'ai essayé de convertir l'une ou l'autre amie, juste sur photo, ça ne marche pas ^_^ Je ne savais pas qu'il chantait aussi, je vais écouter ça.

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  19. C'est ce que je disais plus haut, oui. C'est bien pourquoi le départ de Robert Sheehan ne m'empêche pas de dormir.

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  20. C'est moi ou la saison 3 commence très mal ? Les 3 premiers épisodes m'ont paru au mieux puérils, au pire vulgaires et inintéressants... Et l'irruption de la BD, clin d'oeil à Heroes ? Dispensable...

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  21. Je ne peux pas dire, je n'ai pas encore commencé à regarder.

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  22. Dans l'épisode 4, nos anti-heroes se coltinent... des nazis...

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  23. En même temps c'est presque une convention de l'histoire de super-héros, les nazis...

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