lundi 27 novembre 2006

Son frère - Oraison funèbre

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C’est un petit livre, tout petit et tout fin.

A la première page, on apprend que Thomas est malade et condamné. Il va mourir. Son frère, Lucas, n’a pas eu le temps de se faire à cette idée qu’il se voit déjà supplié de « l’accompagner ». Alors il s’attèle à cette tâche, et il nous la raconte.

A la dernière page, le lecteur pleure.

Il n’est pas vraiment besoin d’en dire plus. De même qu’il n’était pas besoin d’en écrire plus. Ces cent-cinquante-et-une pages suffiront amplement à vous retourner dans tous les sens. Je serais même prêt à parier que la force même du livre vient de sa construction : court mais dense. L’essentiel y est, et le reste, c’est à nous de l’ajouter… un peu comme un livre qui resterait encore à faire… un livre où il n’y aurait quasiment aucun personnage et dont le décor ne serait qu’une toile de fond, fantomatique, optionnelle… ça se passe à l’Ile de Ré mais ça pourrait se passer sur la Lune : les descriptions, les éléments extérieurs à Thomas et Lucas, tout jusqu’au plus petit connecteur semble s’effacer de lui-même pour laisser la place à la douleur, rien qu’à la douleur. Les mots même semblent endeuillés : simples, pudiques. L’écriture est sobre, presqu’instinctive…

Et Lucas s’emporte, s’emballe, dérive, effleure la poésie, se noie dans l’émotion ou dans ses souvenirs. Parfois, une rancœur trop longtemps enfouie remonte brutalement, s’étale soudain pour mieux s’estomper au fur et à mesure qu’il revient au présent : Thomas va mourir. D’une certaine manière il est déjà mort.

… non, décidément, il n’était pas besoin d’en écrire plus.


👍👍 Son frère 
Philippe Besson | Pocket, 2001