dimanche 29 octobre 2006

François-René et la Révolution

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[Chronique publiée chez les Chats de biblio en avril 2006] Le petit François-René nait à Saint-Malo en 1768, et il a une jeunesse très douloureuse, comme toute jeunesse de Vicomte-écrivain qui se respecte. Une jeunesse tellement difficile qu'il va passer sa vie à nous la raconter en long en large et en travers. Plus sérieusement, fuir la France au moment de la Révolution, ça n'a pas dû être très rigolo, même si on veut bien croire que ces veaux de Français avaient quelque raison d'être énervés. Surtout qu'il avait plein d'amis très bien en France, alors qu'en Amérique il va passer son temps au milieu d'indiens encore plus incultes que les Français, qui vont lui raconter des histoires au coin du feu.

Mais pourquoi je n'arrive pas à parler de Chateaubriand sérieusement ? Peut-être parce qu'il est une chose qui lui fait cruellement défaut : l'humour.

Chateaubriand, pourtant, est un écrivain immense. Sa plume est alerte, vindicative, et ses oeuvres majeures, Attala ou Le Génie du Christianisme l'ont imposé bien au-delà des modes et des courants de son époque. Il fut en fait le premier romantique (au sens du "mouvement romantique" bien sûr) et les deux titres susmenstionnés cristalisent déjà, au tout début du XIXe, les obsessions qui plus tard viendront hanter les oeuvres des Hugo et autres Musset qui lui doivent tout ou presque.

Sauf que ça, ce sont les débuts littéraires... la partie visible de l'iceberg, le côté poète cosmopolite au romantisme échevelé et à la sensibilité à fleur de peau... après quoi, Chateaubriand va revenir en France pour surtout tâter de politique (il sera notamment ministre des affaires étrangères) et passer une bonne partie de sa vie à écrire tout et son contraire dans des essais à la qualité aussi vacillante que ses convictions politiques (lesquelles navigueront de droite à gauche puis de gauche à droite quasiment jusqu'à sa mort).

Après avoir inspiré nombre de ses contemporains, il mourra en 1848, non sans avoir eu auparavant une idée géniale : écrire ses fameuses Mémoires d'Outre-tombe, programmées à l'avance pour être éditées à titre posthumes. Une idée révolutionnaire (la seule fois où il tata d'une révolution diront les mauvaises langues ) un peu noyée par la densité du résultat - qui acheva de dégouter de la littérature plusieurs générations d'étudiants en lettres modernes mais n'en demeure pas moins un texte passionnant (au moins les deux premiers volumes).