jeudi 15 février 2018

Les Indignations sélectives


Nous sommes le 15 février de l'An de Grâce 2018. 30 628 personnes ont signé ces derniers jours une pétition pour retirer ses Victoires de la Musique à Orelsan, auteur d'un des très bons albums francophones de l'année mais aussi, par le passé, de titres sexistes, misogynes, violents, qui lui valurent même un très long procès pour incitation à la violence envers les femmes. Pendant ce temps, 102 personnes ont signé une pétition appelant à la démission de Gérald Darmanin, ministre des comptes publics, récemment accusé de viol et qui, pour se défendre, a littéralement expliqué que pas du tout : il a juste réclamé une faveur sexuelle en échange d'un service. Le premier vient d'être primé pour un album paru l'année passée, dont les textes n'ont que peu à voir avec les morceaux incriminés, et qui fait même, sur un morceau ("Bonne meuf"), amende honorable, expliquant avec autant de franchise que d'ironie qu'en gros, il n'était à l'époque qu'un puceau frustré de ne jamais choper qui dégueulait sa rage. Le second a reconnu des faits ayant eu lieu dans l'exercice de ses fonctions, et se considère comme "un dragueur relou", ce qui lui a valu d'être ovationné à l'Assemblée. Le premier est présumé coupable, en dépit d'innombrables dénégations et autres justifications depuis pas loin de dix ans maintenant, et même après avoir été relaxé par la justice. Le second est présumé innocent, même lorsqu'il avoue sans trembler un abus de pouvoir caractérisé1. Tout va bien.


On peut bien sûr considérer qu'il n'est pas très pertinent de rapprocher ces deux évènements, et que Change.org n'est pas encore (fort heureusement) un baromètre en quoi que ce soit sérieux de l'opinion publique. C'est une évidence et pourtant, plus de 30 000 personnes, en France, en 2018, peuvent signer un texte appelant à la censure pure et simple d'un artiste (il ne s'agit pas là d'une extrapolation de ma part, il est écrit mot pour mot "cet individu qui devrait être tout simplement censuré"). Excusez-moi, je crois que j'ai besoin d'une pause... c'est là que nous allions, en fait, ces derniers mois ? Vers ce genre de chose ? Dans un pays et une époque où Cyril Hanouna est une superstar et où Eric Zemmour a pignon sur rue, dans un pays où un ministre peut reconnaître des faits dignes du Maître Weinstein et garder son poste... le plus urgent pour lutter contre le sexisme est de censurer Orelsan ? Vraiment ?

Il faudrait ne même pas avoir à faire l'exégèse du travail d'Aurélien Cotentin, un type qui, en vrai, doit être à peu près aussi misogyne que ma nièce de trois ans. Il faudrait ne même pas prendre la peine de souligner que des propos ne sont pas des actes et qu'une œuvre, quoi qu'on pense de celle-ci, n'est pas exactement la même chose qu'un propos. Il faudrait ne même pas avoir à rappeler que les morceaux incriminés sont vieux de presque dix ans (voire plus dans le cas de "Sale pute", paru en 2006) et que même à l'époque, Orelsan avait du mal à les assumer, largement dépassé par son personnage (très comparable au Slim Shady d'Eminem à l'époque). Il faudrait ne même pas avoir besoin de souligner que l'art d'Orelsan (oui, c'en est un) repose très exactement sur l'hyperbole, la caricature sadique (et parfois masochiste), que son double fictif relève d'une mise en scène, d'une polarisation de pulsions sans doute réelles mais bien évidemment amplifiées par le prisme de la fiction, qu'il s'agit assurément plus d'un personnage de série Z que d'un manifeste masculiniste – jamais un morceau d'Orelsan n'a été à prendre au premier degré et jamais il ne l'a été par qui que ce soit d'autre que ses haters, encore heureux d'ailleurs, sans quoi le pauvre gars n'aurait plus beaucoup de gens sur qui compter (cf. "Défaite de famille", meilleur morceau de son dernier opus en date, dans laquelle il lamine méthodiquement tous les doubles fictifs de tous les membres de sa famille – "Tonton, si tu continues de faire yo yo ! avec les doigts / Chaque fois que tu passes à côté de moi / Tu les utiliseras pour la dernière fois"... on attend avec impatience l'interview du Tonton dans 7 à 8). Il faudrait ne pas avoir à raconter encore et encore que l'intéressé a régulièrement regretté ces morceaux, qu'il ne joue plus sur scène depuis une éternité (voire, pour certains, ne les jouait même pas sur scène à l'époque), et qu'il a multiplié les allusions, certes ironiques mais assez transparentes lorsqu'on prenait la peine de lire entre les lignes, à ces polémiques lui ayant assuré paradoxalement une certaine notoriété à ses débuts (quand il chantait sur "Le Chant des sirènes", l'un de ses titres les plus désabusés : "Oui j'assume / Je suis le génie qui a écrit 'Sale pute'", il n'était évidemment pas en train de s'en vanter mais au contraire de se moquer de lui-même avec amertume, et d'un statut acquis d'une manière qu'il n'assumait pas). Il faudrait ne pas avoir besoin de rappeler que de Johnny Cash à Eminem en passant par Elvis, les Stones (champions absolus de l'exercice), Gainsbourg (qui détient la ceinture pour la francophonie), Ferré, les Guns, Lennon (qui avant de rencontrer Yoko écrivait de jolies apologies de la brutalité conjugale comme "Run for Your Life")... même Dylan-le-Prix-Nobel-de-Littérature ou l'immense et si sensible Neil Young (dont "A Man Needs a Maid" raconte exactement ce que son titre indique)... la pop-music s'est largement nourrie du machisme, du sexisme et même des violences sexuelles2, souvent avec infiniment moins de second degré et de recul que chez Orelsan.

Ceci est une apologie du harcèlement de rue. Et le pire, c'est que je ne plaisante qu'à moitié en l'écrivant.

Il faudrait ne pas se sentir obligé de dire que oui, moi aussi, quand j'avais vingt ans et ne prenais que des râteaux, il m'est arrivé d'écrire des trucs sexistes plus ou moins débiles, qu'il m'arrive encore de temps à autre de relire un texte ancien et d'être aussi choqué que surpris par certains relents, et que ce n'est pas bien grave après tout, on a le droit de se tromper, de vieillir, de changer – on a même le droit d'être un gros con, ce que j'ai parfois été et ce qu'Orelsan était assurément quand il écrivait les morceaux qu'on lui reproche aujourd'hui. Ça me ferait chier quand même qu'on me résume à ces deux-trois trucs, et ça ferait chier tous ceux qui me connaissent et savent bien qui je suis aujourd'hui. Dans le fond, je n'étais même pas misogyne à l'époque, juste abruti, pourtant à dix-huit ans, j'ai bel et bien écrit un roman dans lequel mon double de fiction prétendait avoir assassiné le double fiction de mon ex petite amie, et bien évidemment qu'aujourd'hui cela me paraît ridicule et que je suis bien heureux que personne (ou très peu de gens) n'ait jamais lu cette merde. Je vous en parle parce qu'il y a un détail amusant dans cette anecdote : même sur l'instant, je n'ai jamais eu la moindre pulsion de meurtre ni même la moindre haine à l'encontre de cette jeune femme, qui peut-être se reconnaîtra car elle lisait Le Golb, fut un temps. Je trouvais juste, à tort, que c'était une bonne idée de roman. Je suppose que si j'avais eu Internet à l'époque, je l'aurais (fièrement) publié en ligne et qu'aujourd'hui, je l'aurais supprimé tout en devant continuer à battre ma coulpe à intervalles réguliers auprès des gens l'ayant lu à l'époque.

Il faudrait ne pas faire, dire, écrire plein de choses encore mais en fait si, apparemment, il le faut, puisque nos concitoyens ont des indignations aussi sélectives. On ne résistera pas ici à l'envie de rappeler que même si on en a beaucoup parlé ces derniers mois, le mouvement #MeToo a été d'une grande (et assez étonnante) mansuétude à l'égard des pipoles français, son principal fait d'armes en la matière étant au final, à ce jour, d'avoir fait virer un animateur beauf ayant fait une blague de beauf qu'on avait tous déjà entendue mille fois. On peut considérer qu'il est peut-être temps de passer aux choses sérieuses. Ou bien alors on peut continuer à faire des pétitions débiles pour retirer un prix débile à un artiste qui a écrit des textes débiles il y a des années et se les traîne depuis comme sa proverbiale lettre écarlate. Je n'avoue que ce n'est ni ma définition de la liberté d'expression, ni ma vision du combat contre le sexisme. Mais chacun ses indignations, n'est-ce pas ?


1. A la minute où j'écris ses lignes, j'apprends qu'une seconde affaire Darmanin est en train d'éclater autour de faits similaires. Ça nique un peu mon édito (j'ose croire que cette fois-ci il va gicler), en revanche cela ne fait que renforcer mon propos : ce mec aurait dû être démissionné depuis longtemps, ne serait-ce que pour libérer la parole de ses autres victimes, qui ne doivent probablement pas être que deux.
2. J'ai quand même sur mon disque-dur un blind-test de 110 morceaux que je n'ai jamais passé sur le thème "Toutes des salopes sauf nos mères et nos sœurs (et encore)"... Et pas des morceaux inconnus ou marginaux qui ne seraient pas représentatifs de leurs auteurs, dont aucun n'est un artiste de seconde zone.

39 commentaires:

  1. 100 % d'accord.

    200 % même.

    Mais tu as eu chaud car à mon avis, Darmanin ne finira pas la semaine en tant que ministre :)

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    1. Il a peut-être deux-trois jours de répit quand même grâce à Lelandais ^^

      Mais effectivement j'ai entendu les derniers développements alors que j'arrivais à la fin de l'édito et j'ai violemment appuyé sur l'accélérateur :-D

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    2. Cela étant on attend toujours ton texte sur MeToo que tu as évoqué par ricochet à plusieurs reprises (et que tu nous as promis).

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    3. Je pense que tu m'as mal compris si tu as cru que je "promettais" un texte sur ce sujet. Je crois même avoir écrit que précisément, j'estimais que ce moment devait être focalisé sur la parole des femmes et que par conséquent, même si j'avais des choses à dire sur le sujet, je préférais ne pas les dire.

      Du reste, ma position me paraît tout de même assez claire, précisément de par les allusions plus ou moins directes qui j'ai glissées dans de nombreux articles. Je soutiens à 100 %. Point. Pour ce qui est de ce que j'en pense plus précisément, de ce que cela m'inspire, des questionnements que cela a pu faire germer en moi, par rapport à mon propre comportement, passé ou présent... il me semble que cela ne regarde que moi
      .

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  2. Les masques tombent! J'ai toujours su que le Golb était une raclure misogyne comme en témoignent ses nombreux textes :)

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  3. Sinon moi j'aime beaucoup Orelsan, même ses chansons sexistes (qui sont pas si nombreuses). Elles me font plutôt marrer en fait, c'est du trentième degré. Je vois même un côté parodique parfois à sa manière de balancer des phrases qui seraient totalement cliché (et ne choqueraient personne) dans n'importe quel titre de rap US.

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    1. Oui, c'est possible. Je n'irais peut-être jusque-là, je ne suis pas certain que ce soit volontaire et on ne va pas non plus lui fournir des arguments faciles (ils les a quand même écrits, ces textes). Mais on peut le voir comme ça aussi.

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  4. On nage en plein délire mais c'est pas nouveau en fait... le pire et que ce sont parfois les mêmes qui se défendaient la liberté de créer il y a deux ans... Franchement si on commence à exclure de la liberté d'expression tous les mecs qui ont déjà eu des propos sexistes il va plus en rester beaucoup qui auront le droit à la parole, je dis ça alors que moi-même j'ai pas du en tenir beaucoup dans ma vie mais bon...

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    1. Le vrai pire c'est que bien souvent, les signataires de ce type de pétition confortent quotidiennement un sexisme (ou des injustices, d'une manière générale) beaucoup plus insidieux, systémique voire institutionnalisé que des chansons débiles. Et contre lequel très peu de gens s'élèvent ou ont des actes concrets.

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  5. Tu as raison, bien sûr. Mais au-delà de la démesure de la pétition dont tu parles (je ne pense pas qu'une majorité de gens réclame la censure d'Orelsan), il me semble que tu évites la vraie question, qui est un peu la même que pour Polanski aux Césars : est-il nécessaire d'honorer une œuvre qui a eu de tels propos ? On peut considérer qu'Orelsan a le droit d'exister, de là à le célébrer et à en faire un exemple...

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    1. Mais Leïa, tu te rends compte de ce que tu écris ? Orelsan n'a rien à voir avec Polanski, il n'a rien fait, il n'a agressé personne. C'est exactement le piège dans lequel on devrait essayer de se garder de tomber et dans lequel nous sommes trop nombreux à tomber (moi-même, parfois). Ces deux exemples n'ont rien de commun, si ce n'est d'avoir généré des pétitions.

      Quant à honorer quelqu'un, l'ériger en exemple... j'aurais tendance à te dire que peu d'artistes à mon avis méritent d'être réellement honorés au-delà de "c'est bien ce que tu fais". Maintenant, si "Sale pute" (ou un autre) avait été un morceau de 2017 sur l'album La Fête est finie, j'aurais été le premier à trouver hallucinant qu'on lui décerne une Victoire de la Musique. Mais ce n'est pas le cas. On a le droit de changer, d'évoluer... et de l'autre côté de la sphère, on a le droit aussi de pardonner. Je n'aime pas particulièrement "Sale pute" ou "... St Valentin", je ne trouve pas que ce soit de très bons morceaux et je ne cautionne assurément pas ce qu'ils racontent. Cela ne m'empêche pas de considérer que des années plus tard, leur auteur a le droit de produire autre chose autrement, et qu'on a le droit de l'aimer... et oui, même de le célébrer si l'on veut.

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    2. Hé, j'ai dit "un peu la même" ;)

      En réalité je n'ai pas d'avis sur cette question, je m'interrogeais à voix haute. Et je comprends le tien.

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    3. "est-il nécessaire d'honorer une œuvre qui a eu de tels propos"

      Mais dans les faits, sur les trois prix qu'il reçoit, il y en a deux qui justement sont relatifs à l'oeuvre (respectivement l'album de cette année et le clip de Basique) qui, sauf erreur de ma part, ne sont pas aussi attaquables que les titres incriminés.)
      Du coup, ok, à la rigueur, artiste de l'année, c'est peut-être pousser, mais le reste, pas de débat à avoir.


      Et si on bascule sur la distanciation oeuvre / artiste... Ca dépend de l'adéquation des deux. Par exemple Rosemary's Baby ou Manhattan,j'aurais aucun problème à les revoir. Mais à peu près tout ce que Louis CK a fait, ça va clairement m'inspirer un certain sentiment de gros gros malaise.

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    4. Juger au cas par cas, putain mais t'es un gros ouf, toi :-)

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  6. Tout d'abord, j'aimerais me réjouir du rythme de publication actuelle du Golb

    Ensuite... Oh bordel merci. Un point que tu ne soulève pas, c'est aussi, au milieu de cette indignation, combien ont finalement vraiment fait "l'effort" d'écouter pour pouvoir juger sur pièces? J'ai l'impression (peut-être fausse, hein) que la lecture des paroles incriminées est, pour nombre de personnes, dont certaines comptent parmi les indignés, la totalité de ce qu'ils connaissent de "l'oeuvre" orelsanienne.

    Il y a bizarrement pas de droit à l'oubli le concernant, malgré le fait qu'il ne joue plus ces titres sur scène, qu'il soit quand même bien calmé sur le sujet sur les deux derniers albums. Pourquoi lui ... Bonne question.

    (Aussi, en l'entendant, je savais que Défaite de Famille serait un titre qui te plairait)

    Enfin, un article salutaire que j'attendais sans même vraiment m'en rendre compte.. Content de voir qu'on peut compter sur toi :-)

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    1. Tu as sans doute raison en ce qui concerne les paroles et les réactions qu'elles suscitent. La meilleure preuve de cela étant que parmi les chansons les plus souvent "incriminées" on trouve "Courez, courez", qui n'est pas du tout aussi ambigu que "Sale pute", mais dont on extrait un ou deux vers pour appuyer une pseudo-démonstration. Le premier est effectivement un texte très violent et ambigu qui pouvait d'autant plus prêter à confusion qu'à l'époque, personne ne connaissait son auteur, mais le second est clairement un truc de série Z à la violence totalement hyperbolique et au second degré omniprésent, il est impossible de le lire autrement sans être de mauvaise foi.

      Mais c'est toujours un peu pareil quand des chanteurs font polémiques, cela dit. En réalité je connais assez peu de gens (voire aucun) ayant réellement pris la peine d'écouter un album d'Orelsan en entier qui pensent sérieusement que le mec est une pourriture misogyne et homophobe.

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    2. Je vais être honnête avec toi: l'accusation de misogynie, je la vois, sans problème. L'accusation d'homophobie, je ne sais pas sur quelles paroles, de quel titre, elle se base, en fait.

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    3. C'est le full package premium, t'inquiète ;-)

      Nan plus sérieusement, j'ai pas cherché spécifiquement des passages homophobes dans les chansons d'Orelsan mais il me semble que ses narrateurs peuvent assez facilement traiter quelqu'un de pédé, comme assez fréquemment dans le rap, du reste.

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    4. Sinon c'est quoi le truc avec le rythme de publication du Golb, j'ai pas compris ?

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    5. Juste qu'on a droit a 5 articles en 15 jours, comme c'etait pas arrivé depuis longtemps, et ca fait plaisir :)

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    6. Bah, c'est pas si extraordinaire, si ? Ces dernières années je tourne à peu près à 7 articles par mois en moyenne, là vu le planning, on sera à peu près dans cette zone-là. Après c'est vrai que 2017 a été une année un peu perturbée niveau connexion Internet avec des mois à 1 et des mois à 10 mais finalement j'ai l'impression d'être dans mon rythme "normal".

      (ce qui est drôle c'est que j'ai au moins 40 articles en brouillon, je pourrais aisément accélérer mais certains sont programmés pour des dates précises en rapport avec l'actu, et pour les autres j'ai souvent la flemme de les sortir - il y en a je les ai tellement relus avant publication et puis en fait non pas aujourd'hui que je peux quasiment les réciter de mémoire (celui sur Flash est un bon exemple, je l'ai écrit il y a pile un an))

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    7. (sache qu'il y a dans mon porte-feuille un papier avec le mot de passe du Golb et ton adresse mail parce que bon, soyons lucide, je mourrai vraisemblablement avant d'avoir publié plusieurs dizaines de textes ^^)

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    8. Je n'arrive pas à savoir si c'est ta meilleure blague ou ta plus charmante attention ;-)

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    9. Ça risque d'être un peu les deux au final, vu que je change le mot de passe régulièrement ^^

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  7. Merci pour ce texte limpide. Je ne connais pas Orelsan et n'ai entendu que de loin parler de la polémique, mais cet article apporte pas mal d'éclaircissement à des questions que je me pose depuis des lustres (en particulier sur l'oeuvre et l'artiste), et qui ont été relancées ces dernières années par différentes affaires.

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    1. La thématique de l'homme et l’œuvre, on en a d'ailleurs discuté il y a quelques temps, est tout de même plus complexe que cela. Et comme tu le sais, je ne suis pas son plus grand défenseur, c'est quelque chose que je brandis avec les plus grandes précautions car l'argument sert bien souvent à excuser des choses inexcusables. Le cas d'Orelsan est super simple en comparaison d'autres, parce qu'on ne sort jamais de l’œuvre (personne n'a aucune idée de comment est ce monsieur dans la vie, et à vrai dire il a l'air plutôt simple et sympa). C'est plus un cas de re-contextualisation.

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    2. il ne s'agit pas tant de défendre ou brandir la thématique, mais plutôt d'y réfléchir, de voir comment les choses s'articulent, ce que l'oeuvre dit (ou ne dit pas) de l'homme. A ce titre mon commentaire portait d'ailleurs plus sur ton anecdote personnelle que sur Orelsan. Cela rejoint la thématique du fantasme, à laquelle je réfléchi régulièrement. Comment et jusqu'où l'oeuvre est un support aux fantasmes de l'artiste? celui ci doit il y poser des limites? et la société ? Fantasme vs réalité... etc etc....
      cet edito et la plupart de ceux du Golb (ce qui explique que j'y sois si attaché) nourrissent mes reflexions, confortent une idée ou au contraire y apportent des éléments nouveaux ou contradictoires...

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    3. Ah tu parlais de mon truc à moi ? Je ne sais pas si c'est l'exemple le plus pertinent. Mais oui, tu as raison de soulever la question du fantasme (au sens large). Nos fantasmes sont tous révélateurs de quelque chose, mais ils ne sont effectivement que des fantasmes. C'est justement l'une des choses auxquelles j'ai beaucoup réfléchi quand le mouvement #MeToo a explosé... et surtout quand au bout de quelques jours on a commencé à lire partout des #NotAllMen. Il me semblait que l'étude de conscience à laquelle il était nécessaire que chacun se livre ne devait pas simplement se résumer à ses actes, sans quoi c'est un peu facile et le monde ne risque pas de changer.

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  8. Il a dû te faire un peu mal cet article, non ? Toi qui déteste les gens qui crient au politiquement correct ;)

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    1. Euh non. Pas du tout. Pourquoi ? Tu sais je ne suis pas un idéologue, je suis juste quelqu'un qui réfléchit, se pose des questions, trouve des réponses ou n'en trouve pas. Je peux me trouver d'accord avec tel groupe de personnes le matin et tel autre le soir, et ça ne m'empêchera pas de dormir - au moins j'aurais pensé par moi-même. Bien entendu que je suis quelqu'un de progressiste et de féministe, ça ne signifie pas qu'à chaque fois qu'une douzaine de personnes progressistes et féministes sautent sur un sujet, je saute avec sans réfléchir. Je déteste la manière dont les gens qui hurlent au politiquement correct confisquent un débat, pour moi c'est ni plus ni moins qu'un point Godwin, si tant est même que ce soit autre chose qu'un réflexe pavlovien débile procédant d'une vision totalement fausse de la société dans laquelle nous vivons (qui n'a jamais été aussi libre, à tout point de vue). Pour autant, je n'ai jamais dit non plus qu'il ne pouvait pas parfois y avoir des excès de politiquement correct, et tu auras du mal à trouver un texte où je défends autre chose qu'une liberté d'expression totale et absolue (particulièrement pour les artistes). Ce site en est d'ailleurs la preuve, la modération de commentaires y est inexistante et c'est probablement le dernier blog au monde dont l'auteur accepte de se faire insulter sans sucrer le moindre commentaire.

      Bref non, tout va bien merci :-)

      Et au passage, je ne suis pas peu fier d'avoir réussi à écrire un texte sur un tel sujet sans utiliser les expressions "politiquement correct" et "bien-pensance", comme quoi c'est possible ;-)

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  9. La France a vraiment un problème avec ses jeunes. Je parie que si on étudie les profils des "signataires" on aura une majorité de gens de plus de 35-40 ans avec des profils sociologiques + ou - identiques. Tous les jeunes que je connais (et j'ai quatre enfants entre 10 et 20 ans donc en ajoutant les copains ça fait du monde) adorent Orelsan y compris les filles. Personne ne voit dans ses chansons ce que tous ces vieux coincés y voient, ils prennent tout ça au second degré et apprécient quelqu'un qui parle avec leurs mots de choses qu'ils connaissent. Donc c'est vulgaire, violent et parfois sexiste mais le monde qu'ils connaissent est comme ça après tout. Donc finalement c'est toujours la même vieille histoire de la pop...

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    1. Il est très possible en effet qu'il y ait un effet générationnel là-dedans, encore qu'Orelsan ne soit pas si jeune que ça.

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  10. J'ai vu en effet passer ça hier lorsque j'ai précisément montré le clip "Basique" à un ami. Et je n'ai même pas été surpris plus que cela.

    C'est que, à un moment, personnellement, je trouve cela navrant. C'est juste navrant de se bouger, ou de se mobiliser, pour ce genre d'action. Pas plus recommandable d'ailleurs que l'écart commis par cette chanson datant de plus de dix ans. Que l’intéressé lui-même regrette. Y a tellement d'autres problématiques, de conflits, d'urgences, de combats à mener que la restitution de pauvres statuettes...

    Je me souviens à l'époque du tollé que sa déprogrammation des Francos de la Rochelle avait suscité: personne ne connaissait Orelsan en dehors de "Sale P*te" et les artistes programmés la même année s'étaient mobilisés en sa faveur, critiquant justement la tentation de la censure.

    C'est très juste de rappeler un peu d'historique et de fonds sur les chansons des artistes cités. On peut ajouter Brassens qui, de P*tain de toi à Fernande (même L'orage tiens), s'en allé de sa petite touche franchement myso. Mais bon. C'est, peut-être, accorder encore un peu trop de crédit à un artiste qui n'en avait probablement pas espéré tant, du moins de cette ampleur, et qui malheureusement se traîne un boulet sulfureux depuis trop longtemps. Parce que je veux bien entendre que certaines personnes n'ont peut-être pas le recul pour prendre de la distance vis-à-vis de la violence contenue dans une chanson de 2006 (?, je sais plus) mais bon, je ne sais pas moi, elle a écouté ce qu'a fait Orelsan depuis Mme Taubira ? Et je suis loin, mais alors très loin, d'être un aficionado du chanteur.

    J'attends juste d'une personne érudite qu'elle fasse un peu preuve de sagesse, d'analyse, et de minimisation rapport à cette pauvre petite tempête dans un verre d'eau.

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    1. Ouch, c'est toi qui attire mon attention sur la réaction Taubira, que je n'avais pas entendue.

      Comme tu le dis il y a d'autres causes, mais celle-ci a le mérite d'être tellement facile à défendre. On est dans la continuité d'une époque où tout le monde donne son avis sur tout avant même de l'avoir forgé, les sites comme Change sont des outils intéressants mais ils encouragent aussi une forme de paresse intellectuelle assez détestables. Hurler avec les loups, après tout, est un réflexe banalement humain. Je ne suis même pas certains que 30 000 personnes (ou combien, quelques jours plus tard ?) aient pris le temps de lire la pétition et constaté qu'on y appelait carrément à la censure. A partir de là, on ne va pas leur demander en plus de prendre le temps d'écouter Orelsan...

      Après, je ne voudrais pas non plus que cet article tire contre son camp ; je connais beaucoup de gens qui sont profondément dérangés par ces chansons d'Orelsan, qui ne sont pas du tout à l'aise (voire vénères) à l'idée qu'il se retrouve honoré de la sorte, et qui n'appellent pas du tout à la censure ni même à la "destitution". Cela concerne finalement une minorité de personnes, dont je suis d'ailleurs convaincu qu'elles ne sont pas si féministes que cela, mais cette minorité est en constante augmentation et je trouve ça profondément inquiétant.

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  11. Avoue que ce qui t'emmerdes, c'est pas le fond du dossier, le deux poids deux mesure, etc. c'est qu'on s'en prenne à un Normand!

    Plus sérieusement, je suis peut-être biaisé en raison de mes goûts et de mes opinions politiques, mais j'ai quand même salement l'impression que c'est toujours aux artistes issus du même genre qu'on demande des comptes, des excuses, non ?

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    1. C'est clair qu'il y a sûrement de ça, et encore quelque part on a du bol, le mec est blanc. Sans quoi on en prenait pour six mois. Cela dit je pense que dans le contexte de crispation actuel, une fois n'est pas coutume, ç'aurait pu tomber sur à peu près n'importe qui. Faut lire certaines réactions quand même, c'est hallucinant, on a l'impression qu'on vient de décerner une Victoire d'honneur à Cantat.

      Le mec est de l'Orne, autant dire que c'est un étranger pour moi. Culturellement je suis plutôt habitué à me foutre de la gueule de ses congénères, d'ailleurs comme tout Haut-normand qui se respecte, je déteste l'Orne et n'y fout les pieds que sous la contrainte ^^

      (mais blague à part c'est vrai que dans certains titres incriminés par personne et assez peu connus, il m'est arrivé de reconnaître des trucs de ma jeunesse, des allusions ou des atmosphères qui font que même si je ne suis pas le plus grand fan du monde d'Orelsan, le mec m'a toujours inspiré une certaine sympathie)

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  12. En gros, quand c'est un artiste que tu aimes bien, tu es dans l'analyse. Quand c'est une série que tu n'aimes pas, aucun problème par contre pour fustiger la misogynie.
    A lire sur un ton taquin et non agressif...
    On a tous nos indignations sélectives ;))

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    1. Non. Je pense que tous les lecteurs du Golb me sont témoins que j'assume en général parfaitement mes contradictions, mais en l'occurrence il n'y en a pas. Dans tous les cas, il est juste affaire de contextualisation.

      Je fustige la misogynie, comme tu dis, lorsqu'elle ne trouve pas sa place dans une démarche artistique quelconque, ou lorsqu'elle est à la fois très voyante et clairement inconsciente et structurelle. En revanche, je ne fustige pas par exemple la misogynie de la dernière saison de Twin Peaks (beaucoup de gens se sont offusqués de voir le double de Cooper tuer une femme à coup de poing dans la gueule et violer plus ou moins tout ce qui bouge - même si c'était hors-écran ; il y a une logique et une cohérence là-dedans, le personnage est l'incarnation du Mal Absolu, il est donc tout à fait normal qu'on le voit se livrer à des actes choquants qui provoquent le malaise... et pourtant, comme tu le sais peut-être si tu lis souvent ce blog, je déteste les histoires de viol dans les fictions, rien ne me hérisse plus que ça).

      Le cas d'Orelsan est évidemment différent mais fondamentalement, à partir du moment où il s'agit d'écrire au second degré un texte dont le personnage central - même s'il est un double de l'auteur - est un loser frustré, vulgaire et violent, ce n'est pas la même chose à mes yeux que lorsque tu écris un polar parlant de tout autre chose dans lequel toutes les femmes sont soit des mères, soit des putes.

      Le problème, c'est que les gens, même intelligents, n'ont bien souvent qu'un degré de lecture, une seule grille qu'ils appliquent dans tous les contextes (et le féminisme est une grille de lecture non seulement pertinente mais aussi extrêmement puissante - quand tu commences à t'interroger sur le sexisme sous-jacent des fictions que tu regardes ou lis, tu n'en sors jamais, tu vois des trucs qui te font bondir presque tout le temps, certains trucs que tu aimais avant te paraissent subitement odieux... je parle d'expérience). Tu ne peux pas dissocier certaines chansons d'Orelsan du reste de son œuvre, du contexte de celle-ci, du personnage qu'il incarnait à cette époque et qui était une caricature de blaireau white trash con et vulgaire. D'un point de vue analyse esthétique, c'est au mieux un contresens, au pire de la malhonnêteté d'intellectuelle, car la dimension satirique et hyperbolique de l’œuvre d'Orelsan est absolument transparente, on ne peut même pas dire qu'il cultive les ambiguïtés comme, je ne sais pas, un Gaspard Proust par exemple (qui dit exactement la même chose à la ville qu'à la scène et qui à mon avis aurait tout à fait été capable d'écrire la phrase "je vais de te marietrintigner").

      Bref, le fait qu'il s'agisse d'un artiste que j'apprécie (mais pas plus qu'un autre, d'ailleurs) n'entre pas en ligne de compte, j'aurais pu défendre Tex exactement de la même manière (je veux bien t'accorder en revanche que je ne l'ai pas fait... mais c'est surtout parce que fondamentalement, autant je trouvais la polémique autour de sa blague débile, autant je n'étais pas choqué qu'il soit renvoyé dans la mesure où je considère que quand tu bosses à la télé depuis 25 ans, c'est effectivement une faute professionnelle de ne pas être capable de faire la différence entre une blague pourrie que tu peux faire dans le privé et un truc que tu peux balancer devant des millions des téléspectateurs. L'argument du sketch ne me semblait pas effectif dans le présent cas, et la manière dont il s'est immédiatement drapé dans une posture de "c'est de l'humour pour dénoncer" m'a plus donné envie de lui mettre... une claque qu'autre chose).

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