jeudi 14 décembre 2017

Donkey Kong Country Returns 3D - Splendeur et misères des singes savants

L'émerveillement. La fascination. L'angoisse. La tension. L'apaisement. Parfois la surprise, la peur ou la crainte. Souvent la joie. De temps à autres, la frustration.

Il est rare que j'évoque un jeu vidéo en employant des champs lexicaux d'ordre émotionnels. Il est rare que j'éprouve beaucoup d'émotions tout court, lorsque je lance un jeu. Ce n'est d'ailleurs pas ce que j'en attends. Un jeu est un jeu - je l'ai assez écrit dans cette rubrique pour avoir le droit, une fois tous les deux ans, d'affirmer le contraire. Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu. Il l'est aussi, bien sûr. Mais c'est quelque chose que l'on peut vite oublier.

Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu, non, c'est un rêve éveillé. Celui d'un enfant qui aurait grandi dans les années quatre-vingts et n'aurait jamais pensé voir quelque chose de semblable dans sa vie. C'est une manière de voir les choses que l'on ne croise pas souvent, je crois, chez les amateurs de jeux vidéo. Leur monde se divise globalement en deux pôles inconciliables, avec d'un côté les joueurs qui grandissent et vivent avec leur temps, et de l'autre les vieux machins qui trouvent globalement que c'était mieux avant. Sur Le Golb, nous avons déjà établi que ce n'était pas le cas, et Donkey Kong Country Returns 3D de le démontrer avec une insolence assez extraordinaire. Durant les deux premières parties, on est littéralement assommé par la beauté de ce jeu, la finesse de ses graphismes, de ses musiques, de son animation - ultra-détaillée, ultra-fluide. C'est un émerveillement de chaque instant qui s'auto-entretetient en continu jusqu'à la moitié du deuxième monde, au moins. Il y a quelque chose de féérique, ainsi reçu par les yeux d'un gosse qui a connu les balbutiements des consoles de salon, puis les prémices des machines portables. Lorsque ma mère me piquait la Game Boy pour jouer à Tetris en cachette, Donkey Kong Country Returns relevait de la science-fiction pure et simple. Lancer un jeu à la 3D si élégante, à la réalisation si parfaite, sur une console portable, c'est un peu comme de sortir dans la rue un matin et de découvrir que tout le monde se déplace en voiture volante. Avant-hier encore, je m'extasiais de Super Mario Land, un jeu en noir et blanc ne comptant que quatre courts niveaux. Je ne suis pas certain d'avoir pris note de tout ce qui s'est passé entre temps mais ce qui est sûr, c'est que chaque fois que je me remets Donkey Kong Country Returns 3D, je me dis que j'ai eu de la chance de traverser ces deux époques avec la même candeur.


Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu, disions-nous, c'est un rêve éveillé... qui peut rapidement tourner au cauchemar. Car si Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu, c'est aussi au sens où il n'a pas été conçu pour les petits joueurs du dimanche. Ou plutôt parce qu'il offre la possibilité de s'adapter à tous les publics, une idée finalement rare et dont on ne comprendra jamais qu'elle ne soit pas la norme : les limitations techniques ou spatiales n'étant (quasiment) plus un problème, n'importe quel jeu des années 2010 devrait vous laisser le choix d'être un petit joueur ou un hardcore gamer (ce sont pourtant presque toujours les premiers qui l'emportement). Donkey Kong Country Returns 3D, de ce point de vue, est un véritable cadeau pour les amateurs de challenge. Ce n'est pas un jeu, non : c'est un sport. Le jeu de plateformes ultime, de par son level design vicieux comme de par sa vitesse par moments vertigineuse, qui met réellement à l'épreuve vos réflexes, donc vos nerfs, donc votre capacité de concentration. Un sport parce que, comme pour n'importe quel activité sportive, seule sa pratique intensive vous permettra de progresser. Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas réellement un jeu difficile. Je l'ai fini dans un laps de temps assez court (mais en y jouant beaucoup plus qu'à d'autres). C'est un jeu exigeant, où tout n'est que timing, instinct, anticipation et vivacité d'esprit. Réunir toutes les "lettres K-O-N-G", toutes les pièces de puzzle, ouvrir et terminer tous les niveaux cachés... ne relève pas de l'impossible, mais cela demande de la patience et de l'entraînement. Preuve en est qu'en le reprenant un ou deux ans après l'avoir fini, on s'aperçoit que si, comme pour tous les sports, ses principes ne s'oublient jamais... la condition physique, pour sa part, se perd rapidement. Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu que l'on peut commencer puis laisser de côté un mois puis reprendre et terminer comme si de rien n'était. Il n'y a aucune chance de le finir en procédant de la sorte. Et si ce paragraphe vous fait peur, c'est que vous n'avez pas saisi (sans doute par ma faute), la portée profondément addictive de ce soft. Comme tous les bons jeux difficiles, Donkey Kong Country Returns 3D ne l'est jamais assez pour être décourageant. Certains passages (le niveau avec les araignées en tête, ou encore les temples des derniers mondes) vous mettront parfois dans des états proches de l'ataraxie mais l'illusion qu'ils sont faisables sera toujours suffisamment présente pour que vous ne lâchiez pas l'affaire (en plus tout, tout autour, est tellement BEAU). Et triomphiez une fois la mission accomplie - ce dosage parfait fait de Donkey Kong Country Returns 3D le jeu de plateformes le plus gratifiant de tous les temps. Vous vous voyez réellement progresser. Vous vous surprenez à vous dire, chose rare, merde, je suis vraiment fort à ce jeu !. Qui n'en est pas un.


Donkey Kong Country Returns 3D n'est pas un jeu, je crois que c'est maintenant prouvé, et encore n'ai-je pas énuméré la moitié de ses qualités (je n'ai même pas cité les deux splendides niveaux réalisés en ombre chinoises). C'est un incroyable alignement de planètes. Une symphonie de l'ancien monde jouée avec des instruments venus du futur. C'est une chose d'affirmer que ce n'était pas mieux avant, mais c'en est tout de même une autre de pouvoir le démontrer. Mes yeux n'étant plus ceux d'un enfant qu'en très occasionnellement désormais, rares sont les jeux récents que j'aie spontanément envie de placer au-dessus de leurs glorieux ancêtres. C'est évidemment d'autant plus vrai dans les genres rois des années quatre-vingts et quatre-vingt-dix. La politique récente de Nintendo, en mode retour aux sources de toutes ses licences phares, l'a d'ailleurs démontré par l'absurde : aussi bon qu'aient pu être certains des revivals de la firme japonaise, personne n'aurait la folie de les placer au-dessus de leurs aînés. Donkey Kong Country Returns 3D, lui, peut bel et bien postuler, dans mes charts mentaux, au titre de meilleur jeu de plateformes de tous les temps. Il est en tout cas et de loin le meilleur jeu de sa série, ce qui n'est pas le moindre des compliments quand on se rappelle à quel point les deux premiers Donkey Kong Country marquèrent leur temps et les suivants. J'aurais pu vous parler de tout plein de choses pas très gaies aujourd'hui, mais je me suis dit allons : Noël est dans dix jours, cherchons quelque chose de bien, quelque chose de joyeux, quelque chose qui irait bien sous le sapin de n'importe qui aimant jouer. Et j'ai trouvé ça.


👑 Donkey Kong Country Returns 3D
Plateformes, Nintendo 3DS | Monster Games/Nintendo, 2013

22 commentaires:

  1. Bel article ! Je suis d'accord à 100 %, c'est vraiment un des meilleurs jeux de plateformes auxquels j'ai jamais joué (mais je suis un peu trop jeune pour avoir connu les classiques de la Super NES et de la Mega Drive à l'époque). Je n'ai jamais essayé de me le refaire, peut-être vais-je le ressortir pendant les vacances de Noël. Bonne idée ! ;)

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  2. Jamais joué à ce jeu mais par contre j'ai des souvenirs bien sympa du premier Donkey Kong et......ouais ouais ok, je suis vieux :(

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    1. Tu parles de Donkey Kong (le premier Mario) ou de Donkey Kong Junior (le premier où on dirige DK ?)

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  3. Tout à fait d'accord. Sur sa beauté, sur sa difficulté aussi (il doit encore me manquer une des lettres de monde des araignées.
    Le suivant, pour l'instant dispo seulement sur Wii U (tu le dis pas, mais ce DK est le portage de celui de la Wii "normale"), est déjà plus facile, avec des personnages "annexes" supplémentaires qui rendent le tout plus facile, donnent plus de plans B. Logique que je l'aie préféré, donc?

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    1. Je le dis pas parce que le même jeu sur la Wii, c'est très joli (peut-être même plus) mais ça paraît déjà moins merveilleux que sur une toute petite console portable.

      Donc il te manque plusieurs lettres Kong, vu qu'il y en aussi dans les niveaux qu'elles débloquent ;-) Mais cela dit tu ne manques pas grand-chose, le monde bonus est très beau aussi mais il est assez court et le meilleur du jeu est quand même derrière.

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  4. Niveau difficulté on est quand même plus proche du cauchemar que du rêve. J'ai fait les deux versions, Wii et DS, j'en ai fini aucune ! Je pensais naïvement que le jeu serait plus facile quand il est sorti sur 3DS... il va encore plus vite ! :o(

    Mais sinon c'est vrai qu'il est magnifique.

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    1. Oui, je te confirme qu'il va plus vite sur 3DS mais c'est je pense uniquement parce que l'impression de vitesse est encore plus forte un petit écran.

      Il ne faut pas exagérer la difficulté non plus, comme je le dis dans l'article, c'est un jeu totalement finissable. Je ne suis pas un die-hard gamer et pourtant je l'ai terminé en quelques semaines, à partir de là, tout est dit ^^

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    2. Honnêtement, tu as réussi à battre le boss de fin?

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    3. Moi non plus je n'ai jamais réussi à finir ce (magnifique) jeu! :(

      (mais je suis une petite joueuse)

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    4. PEEB >>> honnêtement ? Non. En fait il m'a fait chier, et là je me suis aperçu que le monde bonus était débloqué quand même et j'ai taillé ma route ;-)

      MONA >>> Maiiis non... tu manquais juste d'entraînement :-)

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  5. Je me rappelle avoir hésité à acheter une 3DS juste pour ce jeu. Si j'étais riche je crois que je le ferais (pareil pour la Wii U et Tropical Freeze).

    J'ai arrêté Nintendo après la 64 (comme tout le monde ^^), mais (pas comme tout le monde ^^) ce n'est jamais Zelda la franchise qui m'a faut avoir des regrets. C'est Donkey Kong. Ces jeux étaient vraiment extraordinaires, toujours en avance sur leur temps. Même les moins bon, comme DKC3, il m'arrive de les ressortir pour y jouer cinq minutes et d'y passer la soirée.

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    1. Il est quand même pas terrible, Donkey Kong Country 3. Outre qu'on est dans la totale resucée, la réalisation est médiocre comparé aux deux précédents, on sent très bien que ç'a été produit à la va-vite pour capitaliser un max avant de mettre la Super Nintendo au placard.

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  6. Je découvre à peine cette série avec le premier épisode (il me semble), qui figure sur la mini Super NES que je viens d'acquérir. C'est vrai que c'est fluide et assez sympa. J'ai mis de coté pour l'instant (je progresse très lentement à Mario RPG), mais c'est probablement le prochain auquel je m’attellerais....

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    1. La mini Super-Nes, eh bien ! Môssieur a les moyens ;-)

      Oui c'est super cool Donkey Kong Country, et ce sont des jeux qui n'ont vraiment pas beaucoup vieilli. En fait, je les trouve encore meilleurs avec le recul, j'étais pas forcément un fan absolu à l'époque mais quand je les ai ressortis il y a une dizaine d'années maintenant je me suis dit "oh putain, c'est trop fun ce truc, ça va viiiiiiite".

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    2. Je crois que j'ai eu de la chance, sans m'en rendre compte sur le coup. en fait mon bassiste qui est un collectionneur hardcore de consoles (en particulier retro gaming), en avait commandé plusieurs par divers biais et en a proposé à la ronde. Je me suis dit que ca avait l'air sympa, et que je pourrais faire découvrir Mario Kart aux enfants. ce n'est qu'après que j'ai compris que c'était un objet recherché. bref il m'en a couté une centaine d'euros, je trouvais ca raisonnable pour une console.

      ce qui est sympa c'est que je découvre ainsi pas mal de jeux cultes, puisqu'à l'époque je n'avais pas de console de salon, je ne jouais que sur Arcade ou chez des potes de temps en temps (puis sur la Lynx que j'ai acquis en 3eme). Il y a une vingtaine de jeux ce qui va me tenir un temps énorme, vu le peu de temps que j'ai à y consacrer. Je compte finir Mario RPG, attaquer ensuite Zelda qui a l'air génial et ensuite Donkey Kong auquel j'ai joué quelques tableaux et qui comme tu le dis est très rapide, jouable, joli et encore assez moderne. c'est aussi un heureuse concordance avec le démarrage des articles Jeux videos sur le Golb!
      seul regret sur la mini SNES pour l'instant, l'absence de Bomber Man, l'un des jeux qui m'a le plus fait délirer quand je jouais à 4 chez des potes.

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    3. Je te taquine, en prix de vente de base la mini-Super NES n'est pas si chère que ça (je crois même qu'elle coûte moins de 100 euros), le truc est que Nintendo organise avec un certain panache les ruptures de stock, ce qui fait que dans six mois tu pourras aisément multiplier le prix par 3 ou 4.

      Tu n'as pas encore fini Mario RPG depuis la dernière fois qu'on a discuté ? Hé, faut se bouger un peu ;-)

      C'est quoi les autres jeux que tu as récupéré avec ? (je suppose que ce sont avant tout les jeux développés par Nintendo, mais bon, par curiosité...)

      Je suis un fan absolu de Bomberman, donc je compatis (mais cela dit Bomberman existe sur toutes les machines possibles et imaginables, c'est pas bien compliqué de s'en faire une partie quand on veut ^^)

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  7. Mais ouais, je joue à peine une fois par semaine. et en plus je suis tombé sur un os, un Boss qui se dédouble et qui me bouffe 40 pdv à chaque coup là où Mario ne lui en enlève qu'un ! je suis pas près de le finir....

    Les Jeux:
    Contra III: The Alien Wars
    Donkey Kong Country
    Final Fantasy VI (l'occasion de découvrir cette série très connue)
    F-Zero
    Kirby Super Star
    The Legend of Zelda: A Link to the Past (m'a l'air superbe)
    Mega Man X (je connais quelques épisodes, toujours très bons)
    Secret of Mana (tu en as parlé comme d'un jeu génial, il me semble)
    Star Fox
    Star Fox 2 (celui ci est inédit sur cette console)
    Super Ghouls 'n Ghosts (je l'ai sur Playstation, sans doute le jeu le plus dur auquel j'ai joué. je ne vais jamais très loin, et il n'y a pas de vie illimitée.)
    Super Mario Kart
    Super Mario RPG: Legend of the Seven Stars
    Super Mario World
    Super Mario World 2: Yoshi's Island
    Super Metroid
    EarthBound
    Kirby's Dream Course (j'ai essayé j'ai rien compris)
    Street Fighter II Turbo: Hyper Fighting (j'ai passé mon adolescence à y jouer. sans doute un des rares jeux où je suis très très bon)
    Super Castlevania IV
    Super Punch-Out!! (pareil, essayé mais je m'en suis pris plein la tronche sans comprendre comment ca marchait...)

    Oh, Bomberman existe sur PS2 ???? il me le faut à tout prix !

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    1. Sur PS2 je sais pas trop, mais sur ordi, oui ^^

      C'est quand même dommage de s'initier au RPG avec Super Mario RPG quand tu as Final Fantasy VI et Secret of Mana dans le tas, soit les deux meilleurs RPGs de cette époque !

      Sinon, les observations en vrac :

      - c'est cool, il y a vraiment de tout.
      - Kirby's Dream Course alors qu'il y a Mario Kart, c'est vraiment pour faire plaisir aux fans de Kirby ^^
      - Earthbound est vraiment un des RPGs les plus originaux de la console... et des plus surcotés, aussi ;-)
      - j'étais pas sûr qu'il y aurait Yoshi's Island ! Belle initiative.
      - si tu trouves Super Ghoul's Ghosts difficile, attends un peu d'avoir joué à Contra (et encore, celui-ci n'est pas le plus dur de cette série)
      - effectivement je n'avais jamais entendu parler d'un Star Fox 2 (enfin de toute façon j'aime pas Star Fox).
      - globalement les incontournables y sont mais il manque quand même quelques pépites (c'est inévitable) : Super Bomberman 2 (donc), Chrono Trigger, Donkey Kong Country 2, Final Fantasy IV, Terranigma, Super R-Type... enfin bon, tu as de quoi faire quand même ^^

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    2. merci pour ces précisions, on verra bien les jeux auxquels j'accroche, ceux que j'arrive à terminer etc... Je suis de toutes manières beaucoup moins endurant que quand j'étais gamins, je ne suis plus capable de recommencer pendant des heures le même passage: un des inconvénients d'avoir accès à un nombre de jeux illimité... (à ce propos je suis curieux de savoir jusqu'où tu as pu arriver à Ghoul's Ghost ou Super Ghouls Ghost...)

      sinon j'ai regardé plus précisément, le Final Fantasy c'est le III (qui correspond au VI au japon). J'espère que ca reste un bon épisode...

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    3. Oui oui, c'est le même jeu, les Américains n'ont jamais eu certains des premiers FF, donc pour eux le III est le I, le IV est le II et le VI et le III.

      Je serais bien incapable de te dire où j'ai été dont Super GnG, ça fait trop longtemps que je n'y ai pas joué. Mais pas loin, c'est clair ^^

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    4. (cela dit le pire de tous est le premier, Ghosts'n Goblins)

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