vendredi 20 janvier 2012

Matt Elliott. Évidemment

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Cela va finir par devenir fatigant pour tout le monde. Pour moi, qui finirai un jour par ne plus écouter le nouveau Matt Elliott que pour décider si je lui mets d'office la note maximale, ou bien si j'attends quelques mois de voir comment il évolue. Pour vous, qui en avez sans doute déjà assez de le voir couvert de dithyrambes par votre site préféré, une à deux fois l'an. Pour lui-même, sans doute - il y a de quoi être blasé à force d'être un peu plus encensé à chaque nouveau disque. Seulement voilà : certains artistes ne savent pas décevoir, même lorsqu'ils prennent des risques - celui-ci en a pris beaucoup et des considérables depuis le premier album de la Third Eye Foundation il y a de cela seize ans.

Bien sûr, Matt Elliott ne fera jamais réellement l'unanimité. A l'instar d'un Leonard Cohen, à qui on l'a souvent comparé, son univers, volontiers contemplatif ou funeste, peut facilement irriter, ou tout simplement indifférer. Il est de ces artistes dont la singularité force autant le respect qu'elle peut laisser de marbre. Dont les admirateurs ont généralement du mal à comprendre qu'on puisse ne pas adhérer à leur démarche mais qui, en leur for intérieur, se sentent renforcés dans leur admiration pour cette raison même.

Ceux-là - je pourrais aisément me perdre ici dans un nous collectif et unanime - attendaient avec une impatience non-dissimulée de savoir comment ce songwriter intemporel allait négocier l'après-Songs - cette trilogie d'albums romantiques et fiévreux qui le firent passer en quelques années du statut de curiosité à celui de pointure. D'autant que lui-même nous avait laissé supposer, au cours d'un entretien passionnant, que son cinquième opus sous son nom amorcerait une nouvelle mue.


Épargnons-nous les faux suspens : il n'en est rien. Depuis ses débuts sous cette forme (The Mess We Made, en 2003), Matt Elliott ne fait que tracer le même sillon, paysagiste appliqué à défricher sa propre musique à chaque nouvelle étape. De plus en plus folk. De plus en plus osseuse. The Broken Man, et l'on se demande comment on a pu en douter, poursuit dans cette voie. Imaginer que la fin des Songs marquerait une rupture radicale, c'était déjà accepter l'idée largement erronée que ces trois œuvres étaient parfaitement inter-dépendantes. Or, entre Howling Songs (2009) et Drinking Songs (2005), une distance considérable avait déjà été parcourue.

S'ouvrant sur un flamenco zombie ("Oh How We Fell"), The Broken Man remet d'emblée les pendules à l'heure : le retour de la Third Eye Foundation n'était qu'une parenthèse, sinon un leurre. Matt Elliott est et reste un singer-songwriter de classe supérieure, jouant de variations rythmiques et d'influences bigarrées, comme de sa voix grave et profonde - ici plus en avant que jamais. Toujours désespérément romantique - au sens véritable du terme - l'ensemble se repaît désormais d'acoustique, élimine les derniers soubresauts électroniques des précédents opus et, surtout, opte pour une atmosphère intimiste et de plus en plus dénuée d'emphase.

Les principales victimes de cette option son évidemment les chœurs, marque de fabrique d'Elliott, qui se retrouvent relégués au second plan (sans toutefois disparaître) pile au moment où ils étaient en passe devenir un gimmick. A leur place, privilège est donné à une interprétation dense et habitée ("Dust, Flesh & Bones"), sur des lignes mélodiques resserrées et bien moins théâtrales que ce à quoi l'auteur de Failing Songs nous avaient habitués. On sent qu'il s'en a fallu de peu pour que The Broken Man ne soit un album uniquement en guitare/voix, l'une et l'autre donnant le ton d'un album dont on regrettera seulement la brièveté. Car pour le reste, il est difficile, lorsque l'on est sensible à cette infinie mélancolie slave (pléonasme), de ne pas ressortir profondément troublé par cet ouvrage sur la brèche, crépusculaire et souvent bouleversant.


👍👍 The Broken Man 
Matt Elliott | Ici, d'ailleurs..., sortie le 24/01/2012

14 commentaires:

  1. Le dernier gros disque de fin 2011. Euh ... Premier gros disque de 2012 !

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  2. Il reste un peu de chœurs, là, non ?

    Bon, je file sur Megaupoad vérifier si ça vaut le coup.

    Ah nan, pas megaupload...

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  3. Thierry >>> effectivement, l'album est sorti en digital dès décembre. C'est de ça que tu parlais, bien sûr ;-)

    Mario >>> il reste des chœurs, je n'ai pas dit qu'ils disparaissaient. Mais ils ne sont plus systématiquement mis en avant.

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  4. Je suis tellement loin d'avoir fait le tour de la trilogie que je me demande s'il est judicieux que j'achète celui ci, meme si je suis sur qu'il est très bon...

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  5. Hum... ne fais pas ta mijaurée, tu sais très bien que tu finiras par l'acheter un jour ou l'autre :-)

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  6. Les traditions se perdent.

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  7. Je parle bien sûr de l'annuel MEGAFLOOD d'anniversaire ;)

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  8. Bon anniversaire mon gros bonhomme!!

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  9. tu me connais trop, je n'ai jamais su résister à une édition limitée vinyle....

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  10. Ce n'est pas toi qui es faible, mon ami, c'est juste l'homme.

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  11. Ce n'est pas toi qui es faible, mon ami, c'est juste l'homme.

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  12. Ah ben tiens jme disais bien que son nom me disait quelque chose, je l'avais entraperçu sur ton blog, sans y prêter vraiment attention.
    J'ai eu l'occasion hier de l'écouter en concert, dans une chtite salle en plus et j'ai réellement apprécié ça, il a une voix en plus...

    Musique intime dans un lieu intime, du ponheur à tout heure!

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