vendredi 30 septembre 2011

Kouyaté & Neerman - Villes invisibles

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Ce n’est plus de la fusion, mais de la musique en mutation permanente. Elle semble hybride, vivante… changeante d’une seconde à l’autre. La cerner devient très délicat – se laisser hypnotiser par elle, en revanche…

Il y a trois ans déjà, un peu moins peut-être, Kouyaté et Neerman nous avaient enchantés avec un superbe Kangaba, album dont la valse hésitation entre jazz, musique traditionnelle et électronique donnait le tournis et le sourire tout à la fois. On ne s’attendait pas forcément à la revoir si rapidement, mais cette surprise n’est finalement pas grand-chose comparée à celle constituée par la qualité exceptionnelle ce nouvel album.


Rien n’a foncièrement changé, pourtant tout est absolument différent. Après avoir splitté la pochette de leur premier opus avec leur instrument respectif, Kouyaté – Neerman – dont même le nom de scène est splitté – affirment une fois de plus leur goût pour les oxymores orgiaques avec ce Skyscrapers & Deities dont le titre même donne le ton. A cette nuance près, peut-être, que tout cela suggère une dualité quand la grande affaire du duo franco-malien est depuis le départ la juxtaposition. Il ne s’agit pas de confronter gratte-ciel et modernité à quelques ancestrales divinités 1, pas plus qu’il n’est question d’orchestrer un combat singulier entre le balafon de Lansiné Kouyaté et le vibraphone de David Neerman. Il s’agit de réunir tout le monde dans une même danse, d’hybrider le tout pour aboutir à de nouvelles formes aériennes et (très) planantes. De nouveaux paysages.

Ainsi alors que Kangaba jouait beaucoup des contrastes entre le bois du balafon et le métal du vibraphone, Skyscrapers & Deities propose-t-il d’entrée un mariage bien plus homogène et toujours plus inclassable, dont l’hypnotique et hanté Kalo Dié constitue, en ouverture, l’exemple typique. Si la dominante reste jazz, on ne s’aventurera pas à accoler à tel ouvrage une étiquette trop rigide, que le duo ne manquerait de toute façon pas de faire voler en éclat à la première occasion (relecture mutante du Requiem pour un con ou psalmodie possédée du camarade Anthony Joseph sur la remarquable Haiti 2). Quand certains albums ont la curieuse idée de se laisser écouter, Skyscrapers & Deities est de ceux bâtis pour mieux se noyer dedans. Dans sa sensualité comme dans sa richesse ; dans sa vraie poésie ou sa fausse langueur. Grand disque.



👍👍👍 Skyscrapers & Deities 
Kouyaté-Neerman | No Format, 2011


1. « Deities » est – évidemment – à prendre au sens folklorique du terme.
2. Un renvoi d’ascenseur de haute voltige après que Neerman ait apporté sa contribution sur le Bird Head Son du Spasm Band.

14 commentaires:

  1. Le premier album était un délice, j'ai hâte d'entendre celui-ci.

    BBB.

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  2. ah ça fait plaisir ! Moi aussi j'ai eu le coup de coeur pour ce disque dont je n'attendais pas grand chose vu que je ne connaissais pas. En ce moment c'est celui que j'écoute le plus, je crois bien.

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  3. Très bon album en effet, d'une élégance et d'une originalité exceptionnelles.

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  4. tu sous-entend que le label no format a cessé d'être prétentieux et chiant?

    ça m'intrigue ^^_

    (je dis ça mais j'ai bien aimé kyrie kristmanson. l'exception qui confirme la règle)

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  5. Content de voir une petite unanimité autour de ce disque, même modeste (l'unanimité, pas le disque ^^)

    Arbobo, je serais bien en peine de te répondre, je crois que je n'ai qu'un seul disque de chez No Format.

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  6. Ah mince, en fait après avoir regardé mes étagères, j'en ai au moins deux de plus : Chocolate Genius Inc et surtout l'album le plus fou, le plus barré et baroque de Marcel Kanche, Le Dogme des VI Jours. Je ne trouve pas ça chiant. Prétentieux tout au plus ^^

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  7. C'est quoi un label ?

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  8. remarque c'est plus le label qui m'agace (beaucoup !) que leurs artistes ^^

    je vais me lancer sur ce kanche que je ne connais pas encore

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  9. Je ne suis pas sûr de suivre la subtile nébuleuse de ton raisonnement... ^^

    Tu lui reproches quoi, en fait, à No Format ?

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  10. ils ont un discours d'une prétention extrème, genre "NOUS on fait pas la même musique les autres, on explore les marges NOUS, on fait de l'inédit",

    or ils publient aussi des trucs assez sages pas forcément inclassables, et leurs prods sont également assez lissées au niveau du son et du mixage, d'où à mes yeux un décalage monumental et une démonstration de prétention à la limite du foutage de gueule.
    Mais je n'inclue pas forcément les artistes, qui ne sont pas responsables de la manière dont le label se présente. Mais je maintiens que pour l'instant au mieux j'ai trouvé plaisants les disques que j'ai écoutés (kyrie kristmanson), au pire très chiants (chocolate genius, que j'ai trouvé creux)

    :-)

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  11. j'avais aussi trouvé assez insipide le Mamani Keita, dont j'avais pourtant aimé le duo avec marc minelli, ce n'est donc pas avec leurs artistes que j'ai un problème, et du coup je poserai une oreille sur le marcel kanche ;-)

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  12. C'est sûr que si tu prends Chocolate Genius, ce n'est pas traumatisant de nouveauté...

    J'avoue que je ne connaissais pas vraiment ce discours. Tu sais, comme Angela plus haut, je ne sais plus vraiment ce qu'est un label en 2011 ^^

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