vendredi 29 avril 2011

Miam Monster Miam + Marie France - Plasticité. Electricité.

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Après des années à prêcher la bonne parole Freakvilloise sur Interlignage et Le Golb, il était plus que temps de ronger Dans le Mur... du Son (pour qui cet article a été initialement rédigé, NDA) de l'intérieur, n'ayant échappé à personne que toute occasion de parler de rock francophone dans ces pages est une agression caractérisée de la ligne éditoriale de cet incorruptible site. On notera cependant que, finalement pas si salaud, je ne vais tout de même pas chercher du francophone honteux, sujet à controverses ou remettant en cause la définition du bon goût (bref : pas Luke). S'il y a bien mec susceptible de réconcilier tout être humain normalement constitué avec le rock'n'roll chanté en français, c'est cette vieille canaille de Miam Monster Miam, a fortiori sur scène, où ses Loved Drones bastonnent comme l'excellent groupe garage qu'ils sont et où, porté par l'humeur de l'instant, l'adorable chanteur-songwriter-producteur-illustrateur-ventriloque belge se métamorphose en improbable rockstar à lunettes et guitare verte. Quand on connaît la gentillesse et l'humilité du garçon, la transformation en branleur gesticulant, doigtant et yeahyeahant est d'autant plus savoureuse, quoique l'on ne sache jamais précisément, sur scène comme sur disque, quelle est la part d'exercice de style sincère et celle de parodie goguenarde.

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Femme Plastique n'est pas le meilleur album de cet étonnant loustic (il a produit, pour lui ou pour les autres, tant de pépites qu'il serait difficile de maintenir éternellement un tel niveau d'excellence), mais il faut reconnaître que le passage à la moulinette live grandit indéniablement le répertoire en question. Le titre éponyme, groovy en diable, semble plus que jamais évadé du Cosmic Show de Jad Wio ; 'Le Roi des paranos' fait office de vrai-faux tube jouissif, 'Blues Automatik' évoque le meilleur Beck de la période lo/fi, tandis qu'avec le renfort d'Alex Rossi, 'J'aurai ta peau' s'avère cradingue et punk comme il faut. Sans oublier 'Erotoman', joué "à la façon d'une musique de film de Dario Argento", c'est-à-dire noyé dans des relents gainsbouriens faisant surtout écho à L'Homme libellule, excellent précédent album de Miam Monster Miam.

Et puis bien sûr... il y a les invités, car du Loved Drones en live ne serait pas grand-chose sans les reprises déjantées ('Intoxicated Man' et 'Blitzkrieg Bop', le cas échéant) et la visite de courtoisie des copains et cousins éloignés. Les présences d'une Pascale Borel ou d'un Jacques Duvall (pour un 'Il doit y avoir un truc' fantastique) ne sont certes pas d'extraordinaires surprises, mais chacun apporte sa touche et fait de son morceau un petit moment à part. Jusqu'à l'arrivée de "la véritable femme plastique", l'immense Marie France. C'est alors quasiment un second concert dans le concert qui débute.

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Fascinante Marie France. Sexy, déjantée... sans complexe et sans âge. Même le groupe paraît subjugué, qui en l'espace d'un clin d’œil redevient Phantom, backing-band rugueux de la Dame au temps de Phantom featuring Marie-France (peut-être le meilleur album de garage-rock francophone jamais enregistré, et en tout cas l'un des tous meilleurs de ces dernières années). Comment pourrait-il en être autrement, du reste ? Il suffit que la chanteuse mette un pied sur la scène pour que le concert soit devenu son concert, son show, qu'elle mène tambour battant à grands coups de 'Les Nanas' et autres 'Déréglée', chansons exceptionnelles délivrées dans des versions hargneuses à souhaits, et bien assez punchy pour qu'on lui pardonne de ne pas interpréter son titre le plus fabuleux ('J'arrête', pour ne pas le nommer). Autant vous dire qu'être assis au premier rang et avoir Marie-France qui danse à quelques centimètres de vous est une expérience assez marquante...

Alors bien sûr, tout n'était pas parfait - rien ne l'est jamais en ce bas monde. L'audience était assez claire-semée, et la salle n'avait pas de fosse, ce qui est toujours frustrant devant ce genre de concert. Mais le concert en soi fut remarquable, un des tous meilleurs qu'on ait vus cette année. Quant on sait que parmi ceux-ci étaient des bêtes de scène comme Cheveu ou Jon Spencer, l'information n'est pas des moindres. D'autant que que le groupe remet ça ce soir même, même endroit même heure (c'est-à-dire 20h00).