mardi 3 juillet 2007

Roddy Doyle - Henry Rocks!

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Attention on ne rigole plus : avec A Star Called Henry Roddy Doyle, sympathique auteur de The Van et de The Woman Who Walked into Doors, a clairement l’intention d’écrire Son Grand-Œuvre.

En brossant le portrait du légendaire Henry Smart, héros républicain irlandais au caractère emporté et à la gouaille célèbre (enfin nous dit-on), Doyle cherche à l’évidence à écrire comme beaucoup d’autres avant lui Son Grand Roman A La Dickens… sauf que lui n’est pas loin de réussir son coup. L’idée de base étant en soi particulièrement réjouissante : le caractère de Henry Smart, au début du bouquin, tient en trois lignes… ce sont les évènements historiques qui vont le forger, faire de lui ce héros truculent auquel on s’attache de page en page au point de ne plus avoir envie de le lâcher. Comme toujours la plume de Doyle fait des merveilles sans avoir l’air d’y toucher, à savoir que comparé à d’autres Doyle n’est pas un virtuose, mais qu’il avait compris dès ses débuts que sobriété et efficacité allaient souvent de paire. Nul besoin d’ailleurs d’en faire des tonnes : Henry prend rapidement le pas sur tout le reste, comme s’il échappait au contrôle de son auteur et avait décidé en cours d'histoire que finalement ce serait un roman sur lui plutôt que sur l’Irlande…

C’est aspect est le plus séduisant du livre ; c’est peut-être aussi le moins convaincant : l’ensemble, relativement long (plus de cinq cents pages), aurait sans doute pu être allégé d’un ou deux passages donnant réellement l’impression que Henry Smart est en roue libre. Les personnages de romans seraient donc capables de cabotinage ? Après tout : pourquoi pas ?

L’idée n’a rien de rebutant, d’autant que Doyle, même discret, évite de perdre de vue trop longtemps son propos. Qui n’est assurément pas d’écrire une apologie du nationalisme, bien au contraire : au fur et à mesure que Smart semble échapper à l’auteur, son destin paraît lui échapper à lui-même. Le prolo volontiers gueulard et nationaliste va au final devenir une icône républicaine adulée par le peuple, les femmes et même par certains de ses ennemis, véhiculant une image à des années lumières de ce qu’il était au début du livre… voilà qui ne me manque pas de piquant, et achève de rendre plus que recommandable un roman qui, s’il souffre un peu de la comparaison avec le Ripley Bogle de McLiam Wilson (autre simili-bio déglingo-irlandaise), n’en demeure pas moins excellent.


👍👍 A Star Called Henry [La Légende de Henry Smart] 
Roddy Doyle | Vintage, 1999