mardi 11 décembre 2007

Reaper Man - Death Is Not the End, qu'y disait...

...
La Mort peut-elle arrêter sa carrière au sommet ? La Mort peut-elle prendre sa retraite ? Après la mort, on fait quoi, quand on est La Mort ? Et quel bordel ce serait dans le fond, un monde sans La Mort… la vie sans La Mort, cela aurait-il sens ?

Bon… je ne vous cache pas que j’ai été un peu déçu : je pensais qu’après sa retraite La Mort deviendrait consultant en combat à mort WWE pour Sport +. Eh bien non. Je me suis dit alors que peut-être il aurait droit à un golden parachute ? Même pas. C’est là qu’on voit que ce livre a seize ans, et c’est là qu’on se rend compte que les bouquins de Pratchett aussi se démodent – surtout ceux qui comme celui-ci ou Interesting Time (1994) se tâtent d’une satire d'une société de consommation qui n'a eu depuis de cesse de tirer vers le pire.

Ce qui n’empêchera personne de rire à l’humour fantaisiste et gentiment moral d’un Pratchett ici au sommet de son art, tellement au sommet que je me demande s’il a jamais écrit un livre supérieur à celui-ci. Chose rare avec cet auteur, Reaper Man , aussi long soit-il, ne contient quasiment aucune longueur. Et opère un joli coup de poker : rendre La Mort attachant (j’ai bien attachant sans « e » final – comme l’indique le titre La Mort est un homme). Ce n’était pas gagné, mes amis : notre héros (qui en fait est absent la moitié du bouquin) n’a rien d’un rigolo, ce qui est dommage d’ailleurs – on aurait bien aimé que La Mort soit un personnage disant connerie sur connerie pour détendre ses clients. Bref !

Certains comparent Pratchett à Swift, c’est sans doute un peu facile. Dans Reaper Man comme dans d’autres j’ai surtout pensé à La Fontaine (ce n’est pas le moindre des compliments dans ma bouche) : ce roman est une longue fable au terme de laquelle les morales ne manque jamais d’arriver (la mort fait partie de la vie, les services publics sont essentiels au bon fonctionnement d’une société… on en passe), c’est ce que lui reprochent certains de ses détracteurs et ce n’est ni tout à fait vrai ni tout à fait faux. Car au-delà de cet aspect la fantaisie est bien réelle, au sens littéral du mot : l’imaginaire, l’inventivité. De ce point de vue Terry Pratchett est un des écrivains les plus remarquables qui soient – et en plus son style goguenard est irrésistible. Aucune raison de passer à côté, donc, même si la comparaison entre un Reaper Man et les Pratchett plus récents se révèle des plus sévères pour ces derniers…


👍👍👍 Reaper Man [Le Faucheur] 
Terry Pratchett | Gollancz, 1991