vendredi 16 novembre 2007

Stereophonics - Les Chroniqueurs aussi prennent de la bouteille...

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Les Stereophonics ne sont pas des aigles. Dire le contraire serait mentir. Leur rock est dépourvu du moindre génie, plutôt bas de plafond et franchement pas palpitant. Longtemps ils furent ma bête noire, le groupe que j’adorais détester et taclait à tout va. Et puis le temps a passé, entraînant la hype avec lui. En 2007 les Stereo’s publient leur sixième album dans une indifférence aussi générale que méritée (c’est sans doute leur moins bon à ce jour), mais au moins ont-ils désormais un statut proportionnel à leur musique. Celui d’un groupe sans envergure capable de chansons plaisantes (il est bien rare qu’un de leur disque ne contienne pas un ou deux refrains charmants), aussi peu versé dans la prétention que dans la concession – ce qui au final le rend plutôt sympathique.

Il faut dire aussi qu’entre 1997 et la résurrection prétendue du rock’n’roll en 2001, rares ont été les groupes à encore oser la pop toutes guitares dehors sans se faire snober par des journalistes trop occupés à compter les samples du dernier Daft Punk. Comme tout fan d’AC/DC qui se respecte, Kelly Jones n’a jamais rien à eu secouer des modes et des engouements, préférant écouter en boucle ses vieux vinyles de Feelgood, des Stones ou de Hüsker Dü plutôt que succomber aux sirènes de l’économie de marché. Rien que pour cela, il mérite un peu plus que les mollards dont je l’ai couvert des années durant. D’autant qu’avec le recul…


… avec le recul, Word Gets Around est plutôt un bon disque. Rien d’étourdissant, certes, mais après tout les Stereophonics ne sont qu’un groupe de pub-rock. Offrez-leur un petit club avec deux spots et un ampli archaïque, imprégnez le tout d’une bonne odeur de tabac froid mâtiné de bière chaude, foutez au bord de la scène une demi-douzaine de prolos joyeusement éméchés… et ils vous feront des merveilles. A la limite ils n’ont strictement rien à foutre dans un studio – depuis quand les groupes de pub-rock publient-ils des disques ? Ils jouent la musique la plus proche de l’esprit rock qui soit, celle qu’on s’envoie dans les pubs de Newcastle le vendredi soir en revenant du boulot, puante d’électricité sur laquelle s’ébroue un chanteur au timbre rocailleux et aux lyrics totalement insignifiants. Les Stereophonics, comme leurs glorieux ancêtres (Eddie & The Hot Rods, Rich Kids ou Blockheads – qu’ils évoquent d’ailleurs souvent), ne sont bons qu’à vider têtes et pintes, ce qui tombe plutôt bien : ils n’ont jamais eu d’autre ambition.

Alors c’est parti pour le grand déballage des popsongs qui sautillent. A ce petit jeu, « More Life in a Tramp Vest » est de loin la meilleure. Comment résister à ce truc, franchement ? Impossible, à moins d’être un dépressif trop ordinaire. « Chek My Eyelids for Holes », « Last of the Big Time Drinkers » (pub-rock, vous dis-je !) et « Too Many Sandwiches » sont du meme bois, le genre de titre qui filerait des boutons à un fan d’Archive (idée on ne peut plus réjouissante). « Not up to You » est agréable, « A Thousand Trees » charmante… rien de transcendant, mais des mélodies plutôt bien troussées et une saine énergie.

L’objectivité force à reconnaître que tout n’est pas bon sur Word Gets Around. Il y a même du très mauvais, comme « Same Size Feet » ou ce « Look Chaplin Like » chiant comme du The Music (ou du The Verve, ce qui revient au même). De manière plus générale il manque une grande chanson pour rendre ce disque réellement intéressant, et les deux ballades (« Traffic » et « Billy Davey’s Daughter ») sont un peu niaises (cependant le pub-rock est en soi un genre totalement niais). Mais dans l’ensemble ça fonctionne, on remue, on sifflote. On regrette un peu de pas être au pub pour savourer ça comme il se doit, néanmoins une excellente variante est d’écouter les Stereo's à fond en conduisant. Vous seriez surpris de constater à quel point les kilomètres s’avalent alors sans broncher…


👍 Word Gets Around 
Stereophonics | V2 Music, 1997