mardi 2 octobre 2007

Nikki Gemmell - La Mariée dans tous ses états

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Le remarquable article que Gaëlle consacra à ce livre m’avait réjoui au moins autant qu’il m’avait interloqué. Non pas tant parce que je découvrais stupéfait que les femmes mentaient à leurs hommes (j’en avais déjà une vague idée) que parce que je me demandais ce qu’un homme pourrait bien penser de The Bride Stripped Bare, roman (déguisé en journal) encensé à tous les coins de web par… des femmes !

Hasard ou coïncidence, figurez-vous que je suis un homme. Il semblait donc que j’étais en fait le mieux placé pour répondre à la question que je me posais. Ni une ni deux : je commandai l’objet. Restait à le lire, ce que j’ai mis du temps à faire – sans doute effrayé à l’idée de savoir ce qui pouvait bien se passer dans la tête d’une femme.

Las ! Je dois vous avouer que je ne suis pas complètement un homme. Ayant été élevé principalement au milieu des femmes, n’ayant quasiment que des femmes pour amies, ayant même par le passé été jusqu’à assister à des soirées filles (oui, oui, j’étais un peu leur mascotte !!!), je ne me suis pas le moins du monde senti dépaysé… tout du moins jusqu’à ce que j’essaie de me mettre dans la situation suggérée par l’auteure dans sa post-face, à savoir : imaginer que ce soit ma femme qui ait écrit le livre. Et là forcément mon petit cœur s’est mis à palpiter…

N’allez pas croire que Nikki Gemmell y raconte quoique ce soit de révolutionnaire : l’insatisfaction chronique de sa narratrice, ses fantasmes ou ses angoisses… tout cela n’est ni plus ni moins que le terreau d’un bon 80 % de la littérature elle-même. Tout réside dans la manière : l’auteure de Lovesong narre les déboires de sa plus toute jeune mariée avec un mélange d’humour, de colère et de frénésie terriblement efficace – c’est à dire : terriblement étourdissant pour le mâle lambda (ce que je suis, hélas, aux dernières nouvelles). Tour à tour émouvante, sexy ou vitriolée, sa prose fait mouche à tous les coups et rend hommage à la complexité et la multiplicité des femmes comme ce fut sans doute rarement fait dans un roman. En somme c’est un régal au moins autant qu'un bon coup de latte dans le peu d'orgueil masculin qui me restait (à déconseiller formellement à tous ceux qui pensent que les femmes ne simulent pas, autant dire : à un paquet de mecs). Même si évidemment le livre a perdu pas mal de son génie lorsqu’un journaleux idiot a révélé que Nikki Gemmell en était l’auteure : souhaitant le publier anonymement, elle avait visiblement pris un soin maniaque de le faire ressembler aux journaux anonymes des dix-huit et dix-neuvième siècles, réussissant même, prouesse d’entre les prouesses, à déguiser son style ! Et il a fallu qu’un gros malin à l’affût d’une augmentation foute tout ce boulot par terre...

Reste à savoir si ce petit livre est à recommander à tous les hommes (quitte à le faire rembourser par la Sécu) ou bien doit leur être absolument défendu… car même si je dois bien reconnaître avoir dévoré The Bride Stripped Bare, je ne suis pas certain d’avoir tellement envie d’entrer dans la psyché de couple de la femme que j’aime. Ai-je réellement envie de savoir ce qui l’habite au plus profond d’elle ? L’Inconnu, ç’a aussi son petit charme, à plus forte raison quand vous savez pertinemment que le Connu pourrait bien vous déstabiliser.

Terminons sur une note un peu plus taquine, tout de même : il paraîtrait que Nikki Gemmel attende de lire la version masculine de son livre. Le défi est tentant, néanmoins une question m’a un peu titillé en apprenant ça : dans quelle mesure l’auteur de cette version masculine pourrait-il échapper à un procès en misogynie ?... Je n’ai pas encore su répondre à cette interrogation. Mais au moins j’ai lu The Bride Stripped Bare, et je vous le recommande très chaudement… à toutes et tous !


👍👍👍 The Bride Stripped Bare [La Mariée mise à nue] 
Nikki Gemmell | Fourth Estate, 2004

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