vendredi 15 juin 2007

Haruki Murakami - Kobe, Mon Amour

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Si le héros d’Extension du domaine de la lutte était japonais et souriant, il s’appellerait sûrement Komura et serait le héros d'Un ovni a atterri à Kushiro. Bossant dans une boite ennuyeuse, ennuyeux lui-même, plaqué par sa femme qui voit en lui une coquille vide, Komura est un personnage lunaire comme on les aime à qui arrive une aventure pour le moins burlesque… ou tout le moins un début d’aventure pour le moins burlesque, puisqu’il ne s’agit que de la première nouvelle du recueil Après le tremblement de terre, qui séduit, emballe, jusqu’à se finir en queue de poisson. On ose imaginer ce que Murakami, avec cette écriture légère et poétique qui le caractérise, aurait pu faire des aventures de Komura…

C’est principalement ce qui m’a dérangé : chaque nouvelle m’est apparu de qualité mais m’a laissé systématiquement à la fin un goût d’inachevé. Impression curieuse… comme si Murakami avait glissé dans ce petit livre non pas six nouvelles mais six incipits de six romans différents. L’idée peut sembler étonnante, pourtant elle ne m’a pas lâché durant toute la lecture. Il faut dire qu’aucun des six textes n’a réellement de fin, ce qui n’a pas vraiment aidé à me détromper…

Quoiqu’il en soit Après le tremblement de terre, dont l’épicentre (ok, elle était trèèèèèèèèèès facile celle-là) est le tremblement de terre à Kobe en 1995, est un livre sympathique et attachant. Les hasards du tirage au sort des lectures sont parfois marrants : comme Jay McInerney dans The Good Life (à savoir le livre que j’ai lu juste avant celui-ci !), Haruki Marukami contourne la catastrophe pour aller débusquer le traumatisme post-apocalyptique au cœur du quotidien. Dans des détails, des couvertures de journaux, des phrases énigmatiques parfois. Les ressemblances s’arrêtent cependant ici : là où McInerney détourne le onze septembre à des fins satiriques Murakami, pour sa part, se contente de narrer de petites historiettes charmantes, relativement intemporelles… et parfois il faut bien l’avouer un poil culcul sur les bords. A moins que ce ne soit du second degré ? Hum.

Si Crapaudin sauve Tokyo est un texte au second degré, c’est du second degré pas drôle ; et si c’est un texte au premier degré, c’est assez préoccupant puisque c’est nunuche comme pas permis et signé de la main d’un auteur à qui certains promettent le Nobel. Je n’irai pas plus loin dans le questionnement, cependant vu la candeur de l’ensemble je crains qu’il ne faille pencher vers la seconde possibilité…

Enfin : c’était le petit coup de griffe de la critique. Pour le reste, il s’agit réellement d’un recueil plaisant, à défaut d’être enthousiasmant.


Après le tremblement de terre 
Haruki Murakami | 10/18, 2000