vendredi 23 mars 2007

Nikki Gemmell - Sad Song

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Nikki Gemmell, qui autant l’avouer m’était totalement inconnue il y a une semaine, a remarquablement choisi le titre de son troisième roman. C’est bien d’une chanson qu’il s’agit. Celle, composée de mots, que la narratrice fredonne à l’enfant qu’elle porte. Celle où elle lui avoue ce qu’elle n’a jamais confié qu’à son journal, où elle lui dit tout : qui elle a été, qui elle est, comment elle l’est devenue…

A douze ans, elle a foutu le feu à son école… vous vous souvenez des petits villages (ils nous poursuivent en ce moment !) ? Eh bien Lillie, notre narratrice, vivait alors dans un petit village au fin fond du bush australien (qui n’a jamais aussi bien porté son nom). Un acte de pyromanie dans un tel endroit, c’était la condamnation assurée : huit années durant Lillie vivra recluse dans sa chambre, étudiant à la maison et ne voyant personne d’autre que ses parents. Jusqu’au jour où le supplice (qui n’en est pas un : elle a fini par totalement oublier le reste du monde) prend fin… croit-elle. Car en fait de libération, sa mère l’envoie littéralement en exil, chez Cédric, son grand-père, en Angleterre. Là-bas, Lillie va franchir le traditionnel cap du passage à l’âge adulte… dans la douleur, certes, mais avec une force de vie magnifique…

Il s’agit d’une chanson, disais-je, que l’auteure a composé à partir de mots délicatement choisis, de respirations, de refrains entêtants tel celui du « sourire d’adulte »… une chanson qui touche, remue, qui se tord et cahote souvent. Parfois même la voix déraille un peu, perd de sa justesse tout en gagnant à chaque chapitre un peu plus d’intensité. Ce livre n’a assurément rien d’autobiographique, mais il s’en dégage un accent de vérité émotionnelle littéralement renversant, comme si Nikki Gemmell mettait son cœur complètement à nu pour emplir celui de sa Lillie, femme-enfant tantôt adorable tantôt exaspérante, assoiffée de liberté mais incapable de la gérer une fois que celle-ci se présente… comme si tout devait toujours lui échapper, et comme si sa force de vie était à la fois sa plus grande qualité, celle qui la rend si sublime aux yeux des hommes (et du lecteur), et son pire défaut : elle est tout simplement incapable de la maîtriser.

Et nous, on est là. On assiste à cette aventure d’une métamorphose fasciné et impuissant, enchanté par l’écriture délicate et poétique d’une auteure ne ressemblant à aucun(e) autre… et l’on referme le livre comblé, mais plongé dans un abyme de mélancolie.

La chanson était belle, sa tristesse infinie.


👍👍 Lovesong 
Nikki Gemmell | Random House, 2001