mardi 9 janvier 2007

La Vendetta - Vive le pathos !

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La Vendetta est une petite curiosité, un texte totalement à part dans l’œuvre de Balzac. Ce court récit (à peine cent pages dans mon édition – certes en tous petits caractères) téléporte les Scènes de la vie privée en Corse, ce qui en soi n’est pas fréquent (de mémoire je dirais que ça ne s’est produit que trois ou quatre fois… sur un nombre de romans tout de même conséquent), d’autant que notre auteur connaissait cette région comme sa poche. Mais surtout, La Vendetta le voit s’atteler à un genre qu’il a toujours négligé (voire méprisé) : le mélo.

Que pouvait-il écrire en effet de plus lacrymal que cette histoire de mariage impossible entre la plus belle fille de la ville (Ginevra) et l’homme haï de toute sa famille (Luigi) ? D’autant que ce dernier a eu une vie parfaitement et totalement pathétique, avec massacre de toute sa famille par celle de sa dulcinée, blessure terrible sur le front de Waterloo – on en passe…

Forcément le résultat est souvent caricatural, mais cela ne pose pas de réel problème parce que…eh bah parce que c’est de Balzac que nous parlons ! Or Balzac se montre si souvent caricatural et outrancier qu’on ne peut pas vraiment le lui reprocher : cela fait partie de sa marque de fabrique au même titre que les descriptions ou l’implantation du contexte socio-politique – simplement on en parle beaucoup moins.

(m’est avis cependant que Balzac, caricaturiste ? serait un sujet de thèse à fouiller – s’il y a des candidats…)

Alors Balzac se métamorphose en version littéraire de Pierre Brasseur et pontifie, pontifie, pontifie à tout va… il pontifie tellement que même un lecteur de Nicolas Rey verrait que c’est exprès – pas possible autrement.

(euh…non, peut-être pas un lecteur de Nicolas Rey, quand même… je vais sans doute un peu loin dans la provoc)

Du coup ce qui a été écrit, dans un premier degré de rigueur, pour faire pleurer fait rire un peu, beaucoup, passionnément… de plus en plus à chaque page… prend au final l’allure d’une parodie cinglante d’une littérature qui, en 2006 comme en 1830, continue à se vendre par palettes entières.

Décidément, on a beau le connaître, on a beau s’y attendre, on est toujours épaté par Balzac. Ce mec, c’était vraiment plus qu’un écrivain : un millier de génies littéraires concentrés dans la même enveloppe corporelle…


👍👍 La Vendetta 
Honoré de Balzac | Le Livre de Poche, 1830