jeudi 12 octobre 2006

Pff... marre de lire des chefs-d'oeuvre !

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Lorsqu’il arrive au Fort Bastiani, où il doit prendre son premier poste, le jeune lieutenant Drogo n’a qu’une envie : partir. Comme les autres.

Pourtant, il va rester. Comme les autres.

Sur le quatrième de couverture, il y a cette phrase tellement hilarante que je la recopie : Ce premier roman de Dino Buzzati est une des œuvres les plus importantes de la littérature contemporaine.

Bon évidemment, soixante-six ans après sa première publication sous pseudo, soixante-et-un ans après sa première publication sous le nom de Buzzati et cinquante-sept ans après sa première publication en France, ce n’est plus tout à fait de littérature contemporaine qu’il faut parler, puisque c’est devenu un classique. Non pas de la littérature contemporaine, ni même du vingtième siècle… non, un classique. Tout court. Un classique que je n’avais pourtant jamais lu

Quel choc, mes amis ! A se demander comment j’ai pu vivre vingt-cinq ans sans connaître ce livre… à se demander comment j’ai pu oser prétendre être cultivé jusqu’à présent ! ne fût-ce que pour la littérature italienne, ce roman est incontournable, peut-être le livre le plus important de ce pays depuis Dante. Quant au reste, à savoir la littérature mondiale… fichtre ! une question m’a parcouru et ne m’a pas lâché durant toute la soirée d’hier : comment peut-on réussir à insuffler autant de sens de lecture différents, autant d’idées et autant d’interrogations dans un texte si court (à peine 240 pages dans mon édition) ? Comment est-ce possible ? Pourtant je connaissais déjà Buzzati. Je connaissais son écriture, et pour être totalement franc, je ne trouve pas qu’il ait un style époustouflant. Mais il est en revanche doté d’une puissance d’évocation incroyable.

Un ami me disait :  "Nous vivons tous les jours notre Désert des tartares." Rien n’est plus vrai que cette courte phrase. Il existe dix mille études et trois cents sites consacrés à ce texte, et c’est finalement un bloggueur anonyme qui en a saisi toute la substance et l’a résumé en neuf mots (dont le titre). Oui, nous avons tous notre Désert des tartares. Bien sûr. Évidemment. Et chacun, selon ses angoisses, ses obsessions et ses douleurs personnelles pourra voir dans ce livre ce qu’il aura envie (besoin) d’y voir. Il pourra même le relire dans quelques années et y voir autre chose encore selon ses préoccupations du moment.

Tout simplement parce que c’est un texte vital et universel.

Et maintenant, comme ça fait quand même trois chefs-d’œuvre de suite que je lis, je pense que je vais me faire un petit Marc Lévy, sinon vous allez croire que je crie au chef-d’œuvre à tous les coups…


👑 Le Désert des tartares 
Dino Buzzati | Le Livre de Poche, 1940