vendredi 5 mai 2006

No Bullshit

[Mes disque à moi (et rien qu'à moi) - N°5]
Aftermath - The Rolling Stones (1966)

Là au moins c’est cool, parce que j’ai pas besoin de faire une présentation du groupe. Les Stones, tout le monde connaît, c’est pratique. Et vous noterez au passage que j’aurais pu sélectionner n’importe quel album du groupe sorti entre 1965 et 1973 parce que ce sont tous des chefs d’œuvres (à l’exception notable de Their Satanic Majesties Request, comme de par hasard le préféré de Philippe Manœuvre dans sa discothèque idéale – mais c’est normal puisque le concept de sa rubrique et de son bouquin c’est de prendre pour référence le disque que personne de sérieux ne citera en référence juste pour faire chier le monde).
 
Aftermath donc, premier chef-d’œuvre d’une longue série pour ce qui, rappelons, est juste le plus grand groupe de rock'n'roll de tous les temps (n’en déplaise aux peine-à-jouir qui adorent les détester). Pourquoi lui ? Parce que c’est mon disque. C’est tout. Je pense que chacun à son Stones préféré et le mien c’est celui-ci, pour vous dire je l’ai acheté trois fois ! D’abord le vieux vinyle version UK (oui parce qu’il y a deux versions du disque et la version anglaise ne contient pas, accrochez-vous, « Pain It Black » !!! c’est pas rien) puis quand il a été mort un CD, mais en version US, puis de nouveau le CD de la version UK lorsqu’elle a été (enfin) rééditée en 2002 – en SACD et paraîtrait que ça change tout le SACD (assertion d’autant plus commode pour les vendeurs de disques que les autres rééditions des Stones dataient de mathusalem et avaient un son atroce). Bref !
 
Aftermath, je crois qu’il a toujours été là. J’ai l’impression d’être né avec l’intro de sitar de « Pain It Black » dans les oreilles. Evidemment je sais bien que ce n’est pas le cas, mais n’empêche : après le Led Zep n°3 ç’a été mon second disque « de vieux ». D’ailleurs peu à peu je me suis mis à ne quasiment plus écouter de la musique de vieux, au grand dame de mes petits cousins qui prenaient pour un fou celui qui jusqu’alors leur avait toujours tout fait découvrir.
 
Ce n’est pas forcément l’album des Stones le plus connu, car finalement des grands tubes du groupe on ne retrouve que « Pain It Black ». Mais c’est sans doute le plus beau. Comme un collier de onze petites perles rock n’roll (« Stupid Girl », « Think »), blues (« Doncha Bother Me »), simili country (« High & Dry »)… plus des grosses perles tout court : « Under My Thumb » et son texte si fin, si drôle, si sulfureux – on parle toujours de la voix de Mick Jagger mais un jour on finira bien aussi par reconnaître que c’est un authentique poète – tellement plus sulfureux que toutes les merdes pseudos provoc’ qu’on nous déverse aujourd’hui. C’était le bon temps : laisseriez votre fille sortir avec un Rolling Stone ? Ca choquait les bourgeois et les puritains… mais finalement, beaucoup moins que ça ne le ferait aujourd’hui. « Under My Thumb » est le genre de chanson qui ne pourrait plus sortir de nos jours sans être frappée d’un parental advisory : explicit content.
 
Catégorie grosses perles tout court il y aussi, bien évidemment, « Lady Jane ». A l’époque les Stones n’avaient pas besoin de faire sortir les violons dégoulinants de sirop pour émouvoir. Une voix et une guitare suffisaient. Et puis « It’s Not Easy » qui semble aujourd’hui désuète mais servit tout de même de biberon à quasiment tous les bébés rockers de 1966 à nos jours (les Guns’N'Roses essayèrent bien une vingtaine de fois de reproduire ça, et on ne parlera même pas des White Stripes parce que nous sommes sur un golb acerbe mais non médisant).
 
C’est presque simple finalement. Pas de fioritures, pas de sophistication à deux balles et pas de grandes prétention intellectuelles… fatalement, quand on est ado, on a envie de préférer ça aux Beatles. Parce que c’est brut de décoffrage et efficace, pas comme les Beatles, pas comme tous ces trucs qu’on est obligé d’écouter dix mille fois avant de les comprendre. Aftermath, une seule écoute suffit pour en tomber amoureux. Il faut juste se laisser tenter… et on le prend en pleine poire, sur le champ. Les mélodies y sont immédiates et les émotions simples sans jamais être simplistes.

Ce que le rock n'roll était au départ en somme…
 
… et n’aurait jamais dû cesser d’être.
 
 
Trois autres disques pour découvrir les Rolling Stones :
 
Beggars Banquet (1968)
Let it bleed (1969)
Sticky fingers (1971)