dimanche 28 mai 2006

En un mot : BRULOT

[Mes disques à moi (et rien qu'à moi) - N°14]
Billion Dollar Babies - Alice Cooper (1973)

Ce n’est pas le disque par lequel j’ai découvert Alice Cooper.

Alice, je l’ai découvert avec le précédent, School’s out (vous vous souvenez ? Celui enrobé dans une culotte rose que j’avais trouvé dans la cave de ma mère).

Billion Dollar Babies, c’est celui-ci qui m’a fait flashé pour lui.

Ou pour eux ?

Cet album est en effet l'avant dernier d’Alice Cooper en tant que groupe. Car oui : les plus jeunes ne le savent pas, mais à l’origine, Alice Cooper n’était pas un artiste solo mais un groupe. Et pas des moindre ! Glenn Buxton à la batterie, Dennis Dunaway à la basse et surtout Mike Bruce à la guitare, un génie absolu dont on se demande encore aujourd’hui comment Cooper (qui s’appelait encore Vincent Furnier) a pu le laisser partir !

Sorti en pleine élection présidentielle, cet album de rock n’roll remuant, sautillant et groovy, très marqué par la scène glam anglaise (T-Rex et consorts), est un remarquable pamphlet anti-conservateurs qui s’ouvre avec le véhément « Hello, Hooray » et se clôt avec l’une des choses les plus sombre de toutes l’histoire du rock : « I Love the Dead ». Pour donner une idée aux plus jeunes : Marilyn Manson doit tout, non pas à Alice Cooper, mais à ce disque précis, voire même à cette chanson précise (« I Love the Dead »), dont il essaie d’écrire sa propre version depuis douze ans maintenant.

Le gros morceau de l’album, celui qui va réellement faire scandale et starifier totalement un groupe qui était déjà raisonnablement riche, c’est « Elected ». Le brûlot de service, la chanson qui met le feu aux poudres (par ailleurs une réécriture d’un ancien morceau : « Reflected », ce qui le rend encore plus savoureux). « Elected », pour parler comme les djeun’s, est une tuerie. Ce titre justifie à lui seul l’achat de l’album… mais rassurez-vous, il n’y a pas que ça : dans la famille « je décime les candidats aux présidentielles » je demande « No More, Mr Guy », dont le texte fumeux n’a toujours pas pris une ride. Et, de manière à ce que vous ne fassiez pas le déplacement pour rien, j’ajoute une dose de « Raped & Freezin’ » (punk avant l’heure), un soupçon de « Billion Dollar Babies » (hymne en puissance s’il en est), une pincée de « Unfinished Sweet » (effectivement interminable mais pas du tout doux), quelques perfidies de bon alois en période électorale (un « Generation Landslide » furibard, un « Sick Things » aussi vindicatif qu’hilarant), et un petit coup de ballade qui tue avec « Mary Ann ».

Ceux qui connaissent déjà le disque auront noté que je viens en fait de citer toutes les chansons. C’est normal, puisque c’est un chef-d’œuvre absolu, un classique des classiques, un des disques les plus importants des années 70 et sans doute de toute l’histoire du rock. On ne compte plus les groupes faisant référence aujourd’hui à Alice Cooper. Mais la plupart font référence à son look, son génie de la mise en scène et ses prestations théâtrales. Aucun ne fait réellement référence à sa musique, sinon peut-être quelques jeunes pousses comme les White Stripes (qui lui inspirèrent ce commentaire goguenard : « J’aime beaucoup les White Stripes, on dirait nous en 69, enfin un groupe qui fait évoluer la musique »). Alors pour éviter de mourir idiot, il serait bon de redécouvrir les albums, surtout celui-ci, dont le son est toujours aussi léché et parfait (merci à Bob Ezrin, décidément le plus grand producteur de sa génération).

Depuis, Alice Cooper sort toujours des albums « solos » à un rythme défiant la décence et à la qualité variable (le dernier en date l’an passé, Dirty Diamond, se hissant presque à la hauteur de ses classiques des 70’s).

On a totalement le droit de les aimer, de même qu’on a totalement le droit de les détester.

Par contre on n’a pas le droit de ne pas aimer ceux sortis entre 1969 et 1973 !


Trois autres disques pour découvrir Alice Cooper :

Love it to Death (1971)
Killer (1971)
Trash (1989)