lundi 12 septembre 2016

Saint-Lazare, bien sûr.

Nous y sommes : voici l'ultime volet de La Rubrique à Zaph. Des chroniques "tranches de vie" comme on savait en faire il y a dix ans sur ce blog, pour la plupart inédites et rédigées en 2012... à l'époque de la retraite du Golb. Cette fois-ci, un vrai voyage dans le temps... dans tous les sens du terme

Certains aiment les voitures, les canapés, les bars ou les restaurants. Certains préfèrent la montagne à la mer, quand d'autres ne se voient pas finir leur vie en appartement. J'aime les gares et les hôtels. Je ne voyage pourtant jamais. Mon rapport à ces lieux est on ne peut plus fonctionnel et utilitaire. C'est peut-être pour cela que je les aime tant : ce ne sont pas des lieux de vie. Ce ne sont même pas des lieux que l'on est supposé aimer. S'ils sont animés, ils n'ont pas d'âme qui leur soit propre. Ils n'appartiennent à personne – donc un peu à chacun d'entre nous.

J'aime la Gare Saint-Lazare et j'ai du mal à me faire à l'idée qu'après toutes ces années, elle ne soit plus en travaux. Je m'étais habitué à son bruit, à ses entrées condamnées, à ses couloirs de sortie labyrinthiques. Je me rappelle à quoi elle ressemblait cinq ans plus tôt, époque où je ne faisais qu'y passer. Son côté tellement ridicule, avec son immense salle des pas perdus toujours vide. Et son unique bar. Et ses quatre pauvres voies extra-muros. Il avait quelque chose d'un gentil géant maladroit, ce grand monument un peu inutile et délabré, tout d'espace mal exploité. Aujourd'hui, l'endroit est rutilant. Il y a des gens, partout. Des escalators dans tous les sens et dans tous les coins. Des boutiques ! Je n'y vais plus jamais. Je boycotte. Non, ce n'est pas vrai : je n'y vais plus parce que j'habite loin, désormais. Mais la coïncidence est lourde de symbolique.


Si je fais le compte, entre ma jeunesse en Normandie et les années en proche banlieue, la Gare Saint-Lazare doit être l'endroit de Paris où j'ai passé le plus de temps dans ma vie. Combien d'heures assis sur ses marches, à fumer et à lire le journal en attendant une correspondance ? Combien de verres vidés au bar juste en face, parce que c'était pénible d'habiter en banlieue et que j'étais trop paresseux pour m'enfoncer plus avant dans le cœur de la ville ? Dans le fond, je n'ai jamais vraiment placé Saint-Lazare en région parisienne. Sans doute parce qu'il a longtemps été le seul que je connaissais dans la capitale, j'ai toujours plus ou moins vu ce quartier comme une extension de Rouen – cette ville où je ne vais plus mais où pourrissent encore quelque part des morceaux de moi. Saint-Lazare est d'ailleurs l'endroit au monde qui concentre le plus de visages de mon passé. C'est presque devenu un musée. Chaque fois, ce sont une, deux... trois personnes perdues de vue qui y croisent mon chemin, me bousculent dans l'escalier, me demandent du feu ou de leur indiquer une direction. Elles ne me reconnaissent presque jamais et je leur en veux tellement peu que je me contente de les laisser reprendre leur route, que j'imagine – peut-être à tort – plus intéressante que de faire semblant de s'extasier de tomber sur une vieille connaissance que les années n'ont pas gâtée. À quoi bon, de toute façon ? Si je voulais revoir d'anciennes têtes, j'utiliserais Facebook, Copains d'avant... tous ces trucs de gens persuadés sans se l'avouer que leur post-adolescence est un idéal de vie insurpassable (si ses enfants savaient que le plus beau jour de la vie de Camille est lorsque que Vanessa Kielmann l'a embrassé après la victoire de la France en 98). Non merci. Ce n'est pas parce que l'on n'a pas d'avenir qu'il faut vivre dans le passé. C'est morbide, le passé. Surtout lorsque l'on a un présent comme le mien. C'est aussi gnangnan que cruel, le passé, lorsque l'on rencontre une ex de fac au physique quasi figé dans le temps tandis qu'on a pris vingt kilos, perdu tous ses cheveux et laissé le tabac jaunir nos dents. Et bien sûr, il va sans dire que c'est toujours l'ex belle et inchangée, celle qui n'a pris qu'une demi-ride et même perdu cinq-cent grammes, jamais celle qui n'a pas su se débarrasser de ses kilos de grossesse... qui nous reconnaît dans la rue. L'univers entier est régit par ce genre de principes stupides et néanmoins immuables.

Alors je fuis ces visages, celui de Mélanie G. et celui de Stéphane P. J'esquive les silhouettes de Coralie C. et Jean-Baptiste B. (ils sont donc toujours ensemble depuis la seconde ?), et en même temps je finis toujours par revenir traîner Gare Saint-Lazare, par m'y installer une heure ou deux quand toutes les autres âmes ne font qu'y passer. True Story : à la minute où j'écris ces lignes passe Emmanuel G., un vieil ami de fac, très proche, depuis longtemps momifié par mes souvenirs. Une poussette au bout d'une main, trois doigts de petite fille maladroitement captés par l'autre, il a l'air d'avoir maigri depuis, quoi ? Neuf ans ? Dix ? Je tourne la tête et adresse un sourire à la serveuse, qui a péniblement atteint la vingtaine et semble très intriguée par ce que j'écris (elle doit s'imaginer le bourreau travail, le type qui ne se repose même pas le samedi, plutôt que l'écrivain-raté-mais-qui-essaie-quand-même – ça ne fait pas rêver les jolies saisonnières, écrivain. Même pas celles adeptes du fard à paupières vert pâle).

Alors que je prends le chemin du retour, pas peu fier d'avoir pour une fois résisté à l'attrait de l'alcool et de m'être limité à un café (ok, deux), une voix interpelle un Thomas ! qui n'est sans doute pas moi. Je ne veux pas que ce soit moi. J'ai déjà trop vécu cette scène. Mais la voix insiste. THOMAS ! Je me retourne et me trouve nez à nez avec Evangeline Lilly, avec les yeux noirs et plus de taches de rousseur (ces trucs qui vous semblent une malédiction durant l'enfance mais qui, plus tard, vous confèrent il faut le dire un certain cachet). Je me sens rassuré, d'un coup : je suis à peu près certain de n'être jamais être sorti avec Evangeline Lilly. Ni même d'avoir été dans sa classe au lycée. Il me semble d'ailleurs être un peu plus jeune qu'elle.

— Mince, c'est fou... c'est vraiment toi...

Je ne dis rien. Je ne vois pas quoi dire. Nous avons souvent eu l'occasion de discuter dans des rêves érotiques, et je veux bien reconnaître qu'ils étaient d'un réalisme presque sordide. De là à ce qu'elle me reconnaisse dans la rue...

— Ça fait quoi ? Vingt ans ?
— Un peu moins, je pense.

À vrai dire, je n'en ai strictement aucune idée. Je suis juste poli. Tout le monde n'est pas obligé de suivre mon exemple et d'être content qu'on ne le reconnaisse pas. Tout le monde devrait, mais tout le monde n'est pas obligé d'être génial.

— C'est marrant, je pensais à toi l'autre jour...
— Ah bon ?
— Oui. Enfin pas à toi spécialement, mais au stage, en général. Et donc à toi aussi (sourire entendu). Tu vas rire mais je crois que je ne pense quasiment jamais à toi sans penser à tes collants jaunes !

Je vais peut-être rire mais en attendant, elle a décidé de me devancer. Cela dit, je ne peux pas lui en vouloir : ils étaient gratinés, ces collants. Comme l'indique leur couleur. Je ne sais plus pourquoi ils étaient jaunes, d'ailleurs. Sans doute trouvais-je cela joli. J'étais très capable de ce genre de chose, quand j'étais gosse. J'ai tout de même fait ma rentrée de sixième en arborant des croque-lacets à l'effigie des frères Rapetou. Certes, c'était une idée de ma mère et de ma grand-mère afin d'éviter que je meure de honte à ne pas savoir faire mes lacets tout seul. Mais je mentirais si je disais ne pas avoir trouvé ça super cool. Ou ne pas avoir rapidement découvert ce concept de honte dont ma mère voulait tant me préserver.

— C'est dommage qu'on se croise justement aujourd'hui, parce que je les porte encore de temps en temps.

Fleur rit de plus belle, et je me dis que franchement, Evangeline Lilly avec deux couronnes, ça le fait moyen.
Et alors, reprend-elle une fois son abusive hilarité dominée, qu'est-ce que tu deviens ? Tu as le temps de prendre un café – mon train est annulé et je n'en ai pas d'autre avant dix-neuf heures ?

C'est la fin de l'année scolaire 1994 et Mademoiselle Duchasseux et Madame Vozni ont décidé que pour les cinquante ans du collège Jean de la Fontaine, c'est moi qui incarnerai le poète au cours des festivités. Les autres interprèteront des versions scénographiées des fables, un spectacle très ambitieux quand on y pense, dans lequel Alexandre Legros et moi-même sommes les seuls à avoir l'insigne honneur de jouer un texte original. C'est flatteur, et d'un autre côté Alexandre Legros joue plutôt mal – il n'est donc pas sûr que je doive me sentir génial pour autant. Tant mieux, vu que je me sens ridicule. Je déteste Alexandre Legros depuis qu'il m'a latté les couilles pendant la retraite de communion (allons dans la Paix du Christ), je trouve que je joue comme un pied et comme si cela ne suffisait pas, tout le monde se moque des collants jaune que je dois porter quasiment tous les après-midis. J'ai aussi pris les chaussures du dimanche de mon père (sans lui dire) et je porte une perruque. Bizarrement, Fleur Delaunnay n'a pas gardé ces deux détails en tête. Ils étaient pourtant bien plus classes.

Je ne me rappelle pas vraiment ce que Fleur Delaunnay fait dans le spectacle. Je crois qu'elle danse (parce qu'il y a de la danse et de la musique, aussi. Ambitieux, vous dis-je). Ou quelque chose dans ce goût. Ce qui est marrant c'est que près de vingt ans plus tard elle m'expliquera avoir été danseuse professionnelle avant de devoir arrêter pour raisons de santé (en réalité pour avoir un enfant, mais Dans le milieu les gens disaient vraiment comme ça : « pour raison de santé »... tu y crois ?) En 1994, elle danse sans doute – elle danse sûrement : je la vois danser sur du Boney M – mais je ne saurais lui prédire un tel destin. Elle n'est qu'une petite brune potelée comme il y en a des milliers d'autres. Et en plus elle a des taches de rousseur. Autant dire qu'elle est morte au monde pré-masculin. Moi, je suis amoureux d'elle comme on est amoureux au collège, c'est-à-dire que je suis amoureux de l'amour avant d'envisager qu'il puisse avoir un visage ou un cerveau. Avoir une petite copine est dans l'ordre des choses. C'est à la fois banal et terriblement important. Non : c'est la chose la plus importante au monde. Qu'il s'agisse de Fleur Delaunnay ou d'Isabelle Martin, qu'importe. En l'occurrence, c'est Fleur Delaunnay. Je pense à elle le soir en m'endormant. J'écris son prénom au blanco sur ma calculette. Si on me disait que dans vingt ans, j'aurai tout oublié d'elle, au point de ne même pas me rappeler l'avoir un jour connue...

— Et toi, alors ? Tu es marié ? Des enfants ?
— Non, rien de tout ça.
— Célibataire endurci, alors.
— Célibataire, en tout cas.

Le ciel a commencé à s'éclairer et Fleur a ôté son gilet Gucci tandis que je tire sur ma chemise pour tenter de dissimuler mon t-shirt Batman délavé et trop petit. Sa poitrine est ample et en entrevoyant son décolleté je réalise que c'est probablement la première que j'aie jamais touchée. À moins que je ne me trompe. Quel est le pire ? Que je sois incapable de me souvenir de la première fille dont j'ai touché les seins, ou bien que j'en sois à ce point incapable que la première ex de collège venue parvienne à m'évoquer des souvenirs qui n'existent pas ?

Le bar se vide et le café l'a cédé au vin. Fleur parle tout le temps, c'est à peine si elle respire. Ce doit être la seule chose qui n'a pas changé depuis 1994. Enfin : je crois qu'elle parlait déjà tout le temps à l'époque. Je n'en sais trop rien. J'ignore pourquoi elle a disparu de ma mémoire. Il y a des amours de pré-adolescence qui m'ont marqué. Je ne pourrais pas donner de détails précis, je lutterais pour retrouver des prénoms. Je sais cependant qu'ils ont existé. Fleur n'en fait pas partie. Je me souviens petit à petit, mais ce sont surtout des images, qui me reviennent. Ses longs cheveux frisés (qu'elle porte désormais raides). Sa robe à fleurs, un peu ton sur ton. Et le soleil ! Les amourettes de fin d'années sont les meilleures, au collège. On peut s'asseoir dans l'herbe, au pied du buste de La Fontaine (il ne fait aucun doute que le sculpteur ait préféré taire à la postérité la partie inférieure de son corps, ses fameux collants jaunes en tête). Il y a toujours quelqu'un qui a eu la bonne idée de venir avec une guitare et qui ressasse maladroitement l'intro de « Come As You Are » (Kurt Cobain vient de mourir et la musique avec lui, nous le chanterons faux pour l’Éternité – jusqu'à la fin du collège, donc). Les filles s'amassent autour de lui et les garçons, jaloux mais magnanimes, l'accompagnent en braillant du yaourt. Fleur cherche un banc car elle ne veut pas salir sa robe dans la pelouse fraîchement tondue. L'idée ne m'aurait même pas effleuré et quelque part, silencieusement, ma mère la remercie d'avoir sauvé au moins un de mes jeans.

— Tu sais, n'empêche qu'après j'ai attendu ton coup de fil tout l'été.

S'appeler pendant l'été, on ne dirait pas, c'était un signe fort. Une manière d'officialiser, quand on n'avait qu'une douzaine d'années et que les vacances signifiaient, sauf très rares exceptions, qu'on ne se verrait pas pendant deux mois. Fleur vivait à seulement une douzaine de kilomètres de chez moi, à Frocville. Douze petits kilomètres, mais nous n'avions pas vingt-cinq ans à nous deux. Elle aurait aussi bien pu vivre en Finlande.

— Chez ma grand-mère, oui.
— Oh... ça ne m'étonne pas que je ne l'aie pas fait. J'étais un peu téléphonophobe, en ce temps-là. Je n'osais déjà pas appeler ma propre grand-mère...

Souvenir de courses effrénées à travers la maison pour être la personne la plus éloignée qui soit du téléphone en train de sonner. Incroyable ce besoin que j'avais toujours de faire caca au moment où la sonnerie se déclenchait.

— J'étais un gamin.
— Je sais, ce n'était pas un reproche voyons (un sourire) Je ne te reproche même pas de m'avoir royalement ignorée à la rentée !
— Oui, alors j'étais un gamin ET un branleur.

Elle rit. Elle rit beaucoup. Elle n'arrête pas de rire. C'est moi ou bien elle est toujours comme ça ?

— Sur le coup évidemment j'ai eu envie de te tuer...
— Évidemment.
— Surtout quand tu t'es mis à sortir avec Amélie Grosseins.

Elle rit elle rit elle rit. Elle rit bien. Moi, j'ai juste envie de disparaître sous la table. J'avais complètement oublié Amélie Grosseins (Éclancher, de son vrai nom), qui comme tant d'autres filles précoces avait dû en voir et en entendre. Et pourtant Dieu sait qu'elle a pu me faire pleurer lorsqu'elle m'a plaqué après un mois et demi de passion à aller d'un bout à l'autre de la cour en se tenant la main, à s'emballer avant de monter dans le bus, à se faire coucou une fois que le bus partait et qu'elle rentrait à pieds, ou à tourner autour du préau en glissant une main dans la poche arrière de nos jeans respectifs – geste foncièrement plus technique que romantique.

— Je crois que je n'ai jamais été aussi jalouse de toute ma vie. C'est débile, quand j'y repense... chaque fois que je vous croisais, j'avais envie de pleurer.
— Si tu savais...

Si tu savais... tu en saurais beaucoup plus que moi, vu ma fascinante capacité à ne me rappeler que des filles que je n'ai pas eues. Cela m'a déjà frappé il y a quelques mois, au cours d'une conversation avec un ami, qui me demandait avec combien de femmes j'avais couchées. Fièrement, je lui ai répondu par une vague fourchette – car moi môssieur je ne suis pas un beauf : je ne compte pas. Sauf que j'ai réalisé en y repensant que la fourchette était beaucoup plus grande que ce je disais, et que j'avais littéralement oublié certaines personnes. Je m'étais cru tellement plus classe, sur ce coup. Mais lui, il pouvait citer tous les prénoms de ses centaines de conquêtes. Il pouvait dire où et quand. Je suis sorti avec Amélie Éclancher au collège. J'ai été dans sa classe au lycée. J'ai même couché plusieurs fois avec elle à la fac. Et je ne saurais même pas dire quelles études elle faisait ou quelle musique elle écoutait. Je ne saurais même pas dire si on se voyait chez moi ou chez elle.

— Rassure-moi : tu ne m'as pas stalké, hein ? C'est oublié, depuis le temps ?

Le sourire de Fleur est radieux. Et un peu taquin, je crois.

— Oui, ça va. J'ai mis du temps, mais j'ai fini par m'en remettre. Je me suis mariée deux fois depuis, on peut considérer que j'ai tourné la page. Mais je ne t'ai jamais vraiment oublié... tu as été mon premier amour, quand même. Et mon premier baiser ! On ne peut pas oublier son premier baiser.

Ouf. Tout va bien. Je me rappelle à peu près mon premier baiser. J'aurais du mal à situer le deuxième, mais le premier, c'est bon.

— Je vais devoir y aller, sinon je vais louper mon train.
— Bien sûr. Non, laisse – c'est pour moi.
— Ok... j'aime pas trop ça, mais ok. Je t'inviterai la prochaine fois.

Un Pas dans vingt ans, j'espère se dessine au bord de mes lèvres, et puis finalement non. On va éviter ce genre de cliché.

— Avec plaisir... si tu repasses dans le coin...
— Je viens presque toutes les semaines. Ma fille habite ici avec son père.
— Oh... je ne savais p...
— Je suis DÉSOLÉE mais il faut vraiment que j'y aille, regarde-moi l'heure !

Fleur Delaunnay se met à griffonner son numéro sur une page de mon bloc-notes, puis tend le bras vers son petit sac à dos kaki qui la fait encore plus ressembler à Evangeline Lilly dans Lost.

— Eh bien... c'était vraiment une bonne surprise, Thomas... je te dis à plus, alors ?

Je n'ai pas encore formulé de réponse qu'elle s'est déjà mise à courir en direction de la gare, qui la happe en quelques minutes. Cette gare, tout de même. Je devrais l'éviter. Elle est bonne pour la mémoire, mais mauvaise pour le cœur. Et le plus triste, c'est qu'en me disant cela je me dis dans le même temps que j'y retournerai sans doute incessamment sous peu. Ne serait-ce que la semaine prochaine, prendre un autre verre avec Fleur. Car je vais l'appeler, bien sûr. Pas parce qu'elle me rappelle ma jeunesse. Maintenant qu'elle n'est plus là pour l'agiter sous mon nez, je me rends bien compte que je m'en fous, de ma jeunesse. De mes collants jaunes ou de la première paire de seins que j'ai touchée. Je ne vais pas lui téléphoner parce que je lui dois un coup de fil depuis près de vingt ans, ni même parce que je la connais. Mais justement parce que j'aimerais bien.

27 commentaires:

  1. Quel beau texte...
    Belle manière de conclure cette mini-rubrique, qui va beaucoup me manquer.

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  2. Zaph, tu pourrais pas user de son influence pour que la rubrique continue ? ;)

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    1. Ou sinon on pourrait peut-être oublier tout ça et créer enfin "la rubrique à Serious" :D

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    2. Hé, j'étais là avant :P

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    3. Je pourrais aussi créer une rubrique qui réunisse votre grande passion à tous les deux : troller Le Golb 24h sur 24 :-D

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  3. Tu es comme moi, tu n'aimes pas le passé mais ton blog en est rempli. C'est vrai que c'est ce qui fait les meilleures chroniques. Celle ci est superbe.

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    1. Merci Xavier.

      Je dirais même que plus le temps passé, plus le passé est partout sur ce blog. Relire des textes d'il y a dix ans... ça me fait parfois des effets tout aussi étrange que d'aller me promener à Saint-Lazare...

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    2. tu me rassures, je pensais être le seul à relire de temps en temps mes vieux articles... (parfois au détour de quelques problèmes techniques ;)

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    3. Ah non non, même que pour composer l'onglet "10 ans de Golb", j'ai relu TOUS les articles sans exception ^^

      Et parfois, c'était vraiment une souffrance.

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    4. waouh! tu as beau lire vite, ca a du te prendre pas mal de temps !
      la souffrance, c'était pour des articles qui te semblent pas bons? moi c'est pire, j'ai l'impression que beaucoup d'articles d'il y a quelques années étaient plus inspirés ou percutants que ceux que je rédige aujourd'hui !

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    5. En fait il y a un peu les deux. Ceux de la période, disons, 2006-07, m'ont vraiment occasionné beaucoup de souffrance, mais à l'inverse il y a après une période faste (2010-13, on va dire) où je passais mon temps à me dire "putain, j'étais vachement bon en ce temps-là" ...

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  4. Eh ben... j'avais totalement oublié celle ci.
    Wow. Concentré ultime de Golbitude, de St Lazare a Frocville, du college et de la biere, évidement Nirvana, et La Fontaine pourquoi pas. (Quand on y réfléchis, La Fontaine a ete le premier a ecrire sur le gestiontavu.)

    Bien calculé, ca, de garder celle ci pour la fin pour qu'on mesure bien a quel point cette éphémère rubrique va nous manquer et pour qu'on en reclame plus alors meme qu'on sait qu'il faut pas trop y croire.

    Damned.

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    1. Tu l'avais oubliée ? C'est marrant parce qu'à l'époque, tu dois être la seule personne à qui je l'avais faite lire qui l'avait vraiment aimer (les autres s'accordant à peu près dire que j'y faisais des choses que j'avais "déjà faites" avant. Soit. Personnellement, je trouve surtout que je les faisais ici beaucoup mieux qu'ailleurs). Mais tu l'as peut-être tout simplement oubliée parce que c'est une des premières de Guldorama (de mémoire je dirais l'épisode 7 ou 8) et qu'il y en a eu beaucoup d'autres derrière.

      Je promets que rien n'était calculé. J'ai tellement d'articles d'avance dans chaque rubrique qu'en général, sauf actu particulière, je tire au sort celui que je publie (ces chroniques ne sont pas non plus sorties par ordre d'écriture puisque leur ordre réel dans le "roman" est Saint-Laz / Laverie / Marches de la Gloire... et Aventures dans le train dans le tome 2 inachevé ^^). C'est donc une pure coïncidence si ce texte-ci sort en dernier, certainement pas un calcul :-)

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    2. Ben faut croire que je suis un piètre archiviste.
      J'ai toute l'oeuvre mais bien mal indexée je pense.

      Apres je crois totalement ce que tu racontes: c'est possiblement parce que ca ressemble a ce que tu as pu faire dans le passé, justement que je l'avais aimée, moi, du coup. Enfin j'imagine.



      Bon, je vais le dire parce que quand même...

      ON EN VEUT +!

      (Meme du nouveau, hein)

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    3. Du nouveau ? Mais... j'ai pas de "nouveau" !

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  5. "There is old wave,
    there is new wave
    and there is Sinawave"

    Ok, ok --->
    J'aurais essayé !

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  6. Eh oui, on en voudrait plus.
    Parce que si finalement on connait peu le vrai Thomas, quand on lit ces chroniques à la première personne, on a l'impression de retrouver un vieux copain, et pas de ceux qu'on préférerait éviter, plutôt de ceux qui nous manquent.

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    1. Oh là là, tu vas me faire pleurer, enfoiré ^^

      Hé mais tu sais, moi aussi j'en voudrai bien plus. Cette rubrique n'était après tout qu'un immense prétexte pour recevoir plus de commentaires de ta part en quelques semaines que durant les cinq ou six dernières années ;-)

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  7. Bon, j'ai passé pas mal de temps moi aussi à St Lazare (qui désert ma téci de Mantes-la-Jolie) et il ne m'est jamais rien arrivé de tel.

    J'en déduis que j'ai une vie de merde.

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    1. En même temps tu extrapoles, je n'ai jamais dit que ce que raconte ce texte m'était réellement arrivé ^^

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  8. Ah peut-être, mais j'ai vraiment une vie de merde :-)

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