lundi 17 octobre 2011

Horizons perdus

[Mes disques à moi (et rien qu'à moi) N°98]
Wildweed - Jeffrey Lee Pierce (1985)

Je me prépare pour le jet de tomates. Genre l'autre, il préfère retenir de Jeffrey Lee Pierce son sympathique album solo plutôt que les deux premiers disques mythiques du Gun Club. Si c'est pas du choix snob, ça...

Je n'essaierai pas de les esquiver vos tomates : une fois n'est pas coutume, je ne sais pas quoi répondre. Je suis conscient, quelque part au fond de moi, que Wildweed n'est pas l’œuvre la plus indispensable de Pierce. Objectivement, en tout cas. Je ne sais pas quoi répondre mais je peux tout de même affirmer que ce choix ne doit rien à un quelconque snobisme, j'adore cet album comme peu, et je ne trouve aucunement les ouvrages plus "populaires" (enfin - on se comprend) du gars en quoique ce soit surestimés (même si bon... après Mother Juno...). Je suis même tout prêt à reconnaître que Wildweed n'est certainement pas l'album le plus représentatif de ce pourquoi une poignée de types de par le monde (including nos camarades de Next et Nick Cave) vouent un culte quasi-religieux à l'auteur de "Sex Beat" et de "Mother of Earth". Mais voilà : je suis fou de Wildweed. J'en suis tellement fou que j'ai brièvement (dix jours) chanté dans un groupe qui s'appelait comme ça (même s'il n'avait rien d'autre à y voir). J'ai eu aussi un blog qui se nommait ainsi. Heureusement que ce n'est pas un prénom - mon chat n'y aurait pas échappé.



Je crois que si j'avais été un musicien, ce que je n'ai jamais été, et que si ce musicien avait été doué (tant qu'à faire), j'aurais aimé être ce type-là à cette époque-là précisément. Jeffrey Lee Pierce en 1985, fraîchement débarrassé de son groupe (il le reformera un an après), sur la pochette de Wildweed (l'une des plus belle des années quatre-vingts). Fusil sur l'épaule, chasseur solitaire - et il ne manquait pas de cœur - perdu quelque part au fin fond de la cambrousse anglaise, regard braqué sur l'horizon. On ne sait si on le capte en pleine errance ou bien s'il se prépare au combat. Les chansons n'excluent aucune des ces deux hypothèses. "Love & Desparation" le dispute à "Sex Killer", cet hymne inconnu que quasiment personne n'a repris. La plus bouleversante est sans doute "Midnight Promise", sale, désespérée et salement désespérée. "Oh, whisper you love me / Slips out of the dawn / And into an alley where the curtains are drawn / Into a room where somebody gets on you"

Il faut se préparer à l'entendre, ce Wildweed. Il se mérite. Souvent, ses fans mentent dessus, sans vraiment s'en apercevoir, parce qu'ils le connaissent et l'aiment jusque dans ses travers. Lorsque l'on ne connaît de lui quelques chroniques, on est souvent surpris. Je m'attendais je me rappelle à un album très folk (ce qu'il n'est pas une seconde), très dépouillé, alors que c'est exactement l'inverse - il passerait même pour une œuvre pompière à côté des rugueux albums du Gun Club qui le précèdent. Notez mon effort pour ne pas vous mentir par omission, comme on l'a fait avec moi : Wildweed est formellement parlant un album de rock indépendant tout à fait normal, très pop même, par instants. Avec certes un idiome blues particulièrement structuré, avec une obsession maladive pour l'Americana. Avec, surtout, une voix suintant la douleur, reflet d'une âme forte et brisée à la fois, capable de rugir ("Celopatra Dreams on") comme de s'évanouir dans un râle ("From Temptation to You"). J'ai dit que j'aurais aimé être ce type-là. Je ne sais pas si j'aurais aimé avoir sa vie. Peut-être, je ne sais pas. Peut-être que si c'était le prix à payer... enfin tout cela n'est pas important en ce qui vous concerne, n'est-ce pas ? L'important c'est que vous ayez rangé les tomates et vous soyez empressés, si ce n'est déjà fait, de (re)découvrir l'un des plus beaux albums du monde.



Trois disques pour découvrir Jeffrey Lee Pierce (avec le Gun Club, donc) :

Fire of Love (1981)
Miami (1982)
The Las Vegas Story (1984)

10 commentaires:

  1. C'est bien simple: le titre, précis, qui m'a fait apprécier JLP et, par extension, le Gun Club, c'est tout simplement Sensitivity (qui est une logique transition quand on part de Noir Désir pour découvrir ensuite le Gun Club - eh oui, "remonter le fil" ;-) )

    Et sur quel album elle est, celle-là, hein?

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  2. Evidemment grand disque, grand personnage, culte, héros, difficile de ne pas tomber dans le lieu commun et tu t'en sors pas mal.

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  3. Je suis un drogué de Fire of Love, mais je ne connais pas du tout les autres albums du Gun Club, et a fortiori l'album solo de JLP. L'intro de la chanson m'a pas trop convaincu, mais finalement la chanson a un vrai charme, une ambiance particulière, je pense que j'écouterais l'album.

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  4. Il est quand même pas génial cet album (beaucoup vieilli). Je préfère de loin Ramblin...

    désolé ^^

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  5. Mazette : next cité au même titre que Nick Cave ... Voilà qui est très flatteur(même si pour ma part et pour des raisons que j'ai exposées sur notre blog , je n'aime plus le moustachu ).
    Tu parles de la pochette et c'est vrai qu'elle est très belle . JFL Pierce était très beau ausssi . Enfin, des fois . Pas toujours , en fait . Dans le film que lui a consacré Henri jean Debon on le voit , bouffi et pathéthique avec sa stratocaster qui lui arrive presque sous le menton à cause de son ventre ...Je ne sais pas si tu as vu ce film . Je n'y suis pas arrivé . Trop dérangeant .
    Ce qui fait la singularité et la force de l'oeuvre de JFL Pierce ,c'est qu'elle est inégale, certes , mais toujours passionnante . Sur les lives du groupe on peut l'entendre chanter de façon assez calamiteuse puis ,sur le titre suivant , être renversant .
    Le groupe est cité , tout le temps . C'est super , c'est un juste retour des choses .Tout ce qu'on aurait ou souhaiter à JFL , c'est qu'il ait pu voir cela . Ca l'aurait changé eds vieux punks qui pogotaient sur Sex Beat à ses concerts .
    A propos ed concerts , il faut que je m'y mette et que je mette sur mediafire ou megaupload les lives que je possède , tiens .
    PS : ça n'a rien à voir mais je tenais à te remercier . je m'explique : je n'aime pas les séries TV . sauf le mentaliste (on ne se moque pas , moi je trouve ça super ). Sur tes conseils, j'ai essayé The Wire . mais j'aime pas trop . J'ai essayé Louie . mais j'aime pas trop non plus . Et puis je suis passé à life On mars . Et ça a été un véritable coup de coeur . MERCI !

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  6. Oh, un de mes tout premiers albums empruntés à la médiathèque, ce devait être vers 1995... je l'avais enregistré sur cassette. Aujourd'hui encore je me souviens bien de "Love & Desparation" et "Midnight Promise"... Il y avait aussi un titre qui s'appelait "Open the Door Osiris", ce nom de chanson m'avait fasciné même si je ne me rappelle plus du tout à quoi ressemblait ce titre.
    N'est il pas sorti avec une autre pochette? celle ci ne me dit rien du tout...

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  7. Guic >>> Mais écoutez Simone, c'est incroyable, figurez-vous qu'elle se trouve justement sur Wildweed !

    EL-JAM >>> l'art de la synthèse, comme toujours.

    Joris >>> chouette... cela dit, si tu ne connais que Fire of Love, je pense que tu peux te jeter d'abord sur les deux autres albums que je recommande.

    mika >>> quel ronchon, quel ronchon... c'est que Ramblin' Jeffrey Lee est plus intemporel, mais Wildeweed, arf...

    Daniel >>> je n'ai pas vu ce film, non, faudrait que je le cherche, même si je ne sais pas si j'aimerais.

    Concernant les séries eh bien, de rien, il y en a un peu pour tous les goûts, il suffit de trouver celle qui correspond le mieux au tien, en somme.

    Xavier >>> Alors là, je ne sais pas. Cette histoire d'autre pochette ne me dit rien du tout.

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  8. toujours par bon pour explorer?

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  9. ha si, en fait

    wildweed est tip top,presqu'autant que fire of love, c'est dire, mais miami est imbuvable en termes de son (prod de merde due a chris stein) hormis sur "mother of earth", pas produit par stein (de mémoire), mais rien que por ce titre, on peut retenir miami^^

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  10. Ah oui, "Mother of Earth", quand même ^^

    Tu as bien fait de poser la question (et de voir par toi-même) sur IE, ç'a été rétabli dans la nuit mais je n'ai plus pensé à enlever le petit avertissement d'avant commentaire.

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