vendredi 8 avril 2011

Low - Déroutant

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[Article précédemment paru sur Interlignage] Le drame survient à la plage 8 : sur le morceau intitulé "A Nightingale", Low décalque le refrain de sa chanson "(That’s How You Sing) Amazing Grace", parue il y a une dizaine d’année sur Trust, d’une manière si flagrante qu’elle ne peut être que volontaire, même si l’on n’en comprend guère l’intérêt. L’auto-citation, c’est connu, est le commencement de la fin. Cette auto-citation-ci est d’autant plus troublante qu’elle survient au terme d’un neuvième album studio qui, sans jamais être mauvais, laisse perplexe depuis déjà une grosse demi-heure d’écoute.

On pourrait presque le voir comme un compliment, d’ailleurs : laisser perplexe après plus de quinze ans de carrière, peu de groupes peuvent s’en vanter, y compris parmi les meilleurs. Mais le cas de C’mon est particulier… son titre lui-même l’est. C’mon ? Come on ! C’est quoi ce titre, sans déconner ?

Eh bien c’est le titre d’un album curieux, difficile à cerner tant il semble changer de couleur à presque chaque (bon) morceau, a priori sans ligne directrice, à l’exact opposé des ses deux prédécesseurs (The Great Destroyer et Drums & Guns) qui avaient marqué les esprits en adoptant des parti-pris soniques extrêmement tranchés auxquels ils se tenaient de bout en bout. Avec C’mon, on va plutôt de surprise en surprise : "Try to Sleep" s’ouvre sur une mélodie guillerette au xylophone, "You See Everything" tâte d’un psychédélisme élégant rappelant un peu le Radiohead de la fin des nineties, le tout ouvrant sur "Witches", titre franchement pop évoquant le "Lucky Man" de The Verve (!!!) et soutenu par le banjo de Dave Carroll (des excellents Trampled By Turtles).

Un tel enchaînement suffisant en soi à laisser perplexe, la suite a de quoi dérouter : le morceau suivant est une ballade crépusculaire de toute beauté ("Done"), et la seconde moitié voit le groupe revenir à ses fondamentaux et jouer du Low beaucoup plus traditionnel, sur l’émouvant "$20" ou le plus anecdotique "Majesty/Magic". Si bien que l’on en ressort assez partagé, évidemment conquis par l’irascible mélancolie des Américains, mais jamais totalement convaincu par l’album en lui-même. Ce groupe qui avait toujours su se réinventer avec panache semble parfois en panne d’inspiration, mais moins dans le songwriting que dans le projet global. Les compositions sont presque toutes bonnes, là n’est pas la question ; ce C’mon un peu décousu ne manque pas d’idées, mais d’une vision. De cette conscience aiguë de ce que l’on grave sur disque qui différencie les bons albums des grands. Celui-ci est bon, et même très bon en regard de ce que produisent aujourd’hui les groupes de la même génération que Low. On devrait pouvoir s’en satisfaire, sans toutefois y arriver complètement. Mais au bout de dix-sept ans, cela n’a rien d’infamant.



C’mon de Low (12/04/11)

10 commentaires:

  1. Il faudra voir sur la durée de l'album mais cette chanson là est vraiment très bien...

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  2. le début de l'album est tellement catastrophique que je n'ai pas encore trouvé le courage de voir si ça s'améliore plus loin

    la désagréable impression de revivre la décrépitude mièvre de House of love, en pire

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  3. C'est vrai qu'il y a du très moche, sur cet album !

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  4. Pareil qu'Arbobo. Le début de l'album m'a complètement dissuadé d'aller très loin.
    Poubelle !

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  5. Dur dur... Low fait partie de mes 10 groupes favoris de tous les temps. Et cela sera toujours le cas après cet album même si c'est le plus faible de leur discographie.
    Des morceaux pas mal sans plus (quand on sait de quoi ils sont capables!!!) et d'autres d'une insondable vacuité. Pas de bol, comme le soulignent justement les autres contributeurs, ces morceaux creux, mièvres et vains sont placés en tout début d'album.
    Low se fait hara kiri et moi, j'attends toujours qu'ils retrouvent la grâce et le génie de leur période fin 90's début 00's, la meilleure, avec le gigantesque Things we lost in fire en point d'orgue.
    On y croit.

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  6. Je vous trouve tous extrêmement sévères, notamment avec le début de l'album. "Try to Sleep" m'a surpris par son ambiance in-habituellement joviale, mais musicalement on n'est pas non plus à des années lumière de ce que Low a fait ces dix dernières années. Parler de "décrépitude", pourquoi pas, mais je pense que Low a plus de ressources que n'en avait House Of Love (quel étrange rapprochement ^^) ; il y a des faux pas sur ce disque, mais ce ne sont que les premiers, Low a malgré tout terminé les années 2000 en restant sur quatre albums très différents et réussis, chacun dans son style. Il me semble qu'il mérite qu'on lui accorde le bénéfice du doute avant de l'enterrer prématurément... d'autant que si on compare cet album à ceux de la plupart des "pointures rock indé" en 2011, il n'y a pas photo, Low même inégal et affaibli est bien au-dessus du marasme actuel.

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  7. Ben oui, il n'est quand même pas si mal, ce disque... Je ne l'ai pas encore suffisamment bien écouté pour avoir un avis tranché, mais il ne m'a pas non plus paru si catastrophique (même s'il semble, c'est certain, moins bon que ceux d'avant... décidément, c'est un peu une épidémie en ce moment...)

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  8. Ah ! Merci de m'apporter un peu de soutien !

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  9. Je ne comprends pas non plus ces critiques sévères du dernier Low qui est vraiment très bon. Rien à voir avec les morceaux compliqués des derniers albums. C'est sans doute ce qu'ils ont fait de mieux depuis longtemps. Après c'est toujours pareil, tout dépend du temps que tu veux bien consacrer à un album... 2 minutes 30, ou 4 ou 5 passages...

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  10. Je n'irai pas jusqu'à là, mais c'est un bon album, c'est sûr.

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