jeudi 30 décembre 2010

Des crissements. Des écorchures.

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En décembre 2000, j'achetais par hasard... disons : presque par hasard, un disque qui allait tourner inlassablement durant des mois. Pourquoi je l'avais acheté ? Je ne sais plus vraiment. Le groupe faisait un petit buzz à l'époque, je crois, suite à sa contribution à la B.O. de Baise-moi. Mais je n'avais pas vu le film - encore moins écouté sa B.O. J'avais cependant bien dû en entendre parler quelque part, au fin fond de ma campagne, pour l'acheter si peu de temps après sa sortie et pour aller spécifiquement vers ce disque dans la FNAC de Rouen - celui-ci et pas un autre.

Je dis disque, c'est parce que c'est ainsi qu'il se présente. Le second album de Virago n'est pas véritablement un disque, il relève plutôt de la tornade. Il passe sur vous à toute blinde, emporte tout sur son passage. Dès le premier riff, tout ou presque est dit : on n'est pas là pour rire (on ne va effectivement pas le faire), mais pour ployer sous un déferlement de rage, de hargne. De douleur. Le premier passage n'est pas de tout repos. Il est bon de réécouter ce genre d'album dans une époque où le moindre groupe pop avec un peu de disto est immédiatement catalogué noise. Chez Virago, on écoutait The Jesus Lizard et Sloy, on connaissait ses classiques (Fugazi, GvsB, Helmet) et l'on savait que le bruit ne se conjuguait jamais qu'avec la fureur. C'était bien longtemps avant que la scène connaisse un revival et qu'on la mixe avec tout et n'importe quoi (garage, new wave, et puis quoi ? La soul, pour 2011 ?). C'était il y a dix ans.

C'était il y a dix ans et je découvrais éberlué ce que je considère encore aujourd'hui comme l'album le plus poisseux que je connaisse. Quand on écoute Premier jour, les seules images qui viennent sont celles de terrains vagues, de parkings sous-terrains déserts, de hangars sordides. Tout paraît sale et désolé, et la reprise finale, celle de "Love on the Beat", sonne encore plus glauque et malsaine que l'originale. Tout en tensions et guitares acérées, les morceaux sont exemplaires. L'on y allie rigueur mélodique et suffocation électrique ("Un instant"), menace trouble à en avoir la chair de poule ("Le Premir jour de mai"), heavy nauséux et fascinant ("Tu m'as fait ça"). Le reste se compose d'assauts hardcore parfaitement conjugués en français ("Les Pôles", "La Condition"), de comptines macabres ("Hélène", "Un beau palais"). Le tout est des plus anxiogènes, mais j'imagine que vous l'aviez déduit de vous-mêmes.

Bizarrement le groue a splitté peu après. Je n'ai jamais vraiment su pourquoi, j'ai d'ailleurs appris la nouvelle bien des années plus tard. Il m'arrive de me dire que c'est le lot de tous les meilleurs groupes français, ceux qui trouvent d'emblée leur voie et leur patte. Ils finissent toujours splittés, au final. Peut-être parce que personne ne s'intéresse à eux, quelques centaines d'aficionados mis à part. Ses membres sont partis ici ou là, jouent désormais dans différents groupes dont je n'ai jamais trouvé les tornades, et dont j'ignore même si elles existent. De Virago ne restent qu'un EP (dispensable) et deux albums (Introvertu, plus brut, est assez traumatisant également). Et bien sûr ce sentiment de malaise, qui ne me quitte pas chaque fois que je remets Premier jour sur la platine. Cela ne m'arrive d'ailleurs plus très souvent, je ne sais jamais trop dans quel état l'écouter - et plus encore dans quel état en sortir.



Premier jour, de Virago (2000)

9 commentaires:

  1. Je me souviens parfaitement bien de ce disque. Vraiment bluffant. Je ne savais même pas que le groupe n'existait plus (enfin depuis 10 ans je le supposais quand même ^^)

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  2. Quelle baffe. Je ne connaissais pas du tout, je ne savais pas qu'on avait eu un tel groupe en France. Je me demande si le premier album se trouve facilement ausi.

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  3. Je ne sais pas. Déjà à l'époque, j'avais mis du temps avant de trouver les disques en magasin. Mais j'imagine qu'avec Internet ce genre de truc s'est nettement arrangé...

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  4. Thomas, ça y est, tu peus être fier de toi.
    J'écoute du rock en Français ! Et tu sais combien vous avez tous essayé de me convaincre.

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  5. Je viens de faire un tour d'honneur, nu autour de la table du salon :-)

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  6. oh qu'il est bon celui-ci... et en live aussi, il savaient y faire les grenoblois !
    j'avais lu qu'ils s'étaient reformés il y a 1 ou 2 ans pour une unique date parisienne hélas...

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  7. Je ne savais pas. Je ne les ai jamais vus live, en plus...

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  8. Un des meilleurs disques français que j'ai jamais entendus. Mais je l'ai beaucoup entendu, lui, par contre ;)

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  9. Ah ! C'était le bon temps, pas vrai ? ^^

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