samedi 27 novembre 2010

BBMix - Épisode 1 : la vache ! la scène est super grande !

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Sixième édition pour le BBMix, et cette fois-ci nous en sommes, non sans rager un peu à l’idée d’avoir manqué l’an passé un superbe plateau (avec notamment Gravenhurst et Ultra Orange). Mais celui de cette année a largement de quoi compenser cette frustration. Au menu ? De l’inconnu et de l’incontournable, du jeune et du vieux, de la déjante et de la mélancolie. Le tout vendu à un prix défiant toute concurrence (10 € !!) et servi dans une salle superbe, le Carré Bellefeuille, qui n’aura pas mis longtemps à entrer dans notre top des salles franciliennes où il fait bon vivre. Certes, pas de fosse digne de ce nom, et des fauteuils qui n’auront pas servi à grand-chose la plupart du temps. Mais aussi et surtout un cadre très agréable (Dieu sait que c’est important en hiver) et un son de très bonne qualité (ce qui n’est pas si courant). Bout à bout, tout cela ressemble fortement au package idéal pour passer trois jours mémorables, à peine ébranlés par la nécessité de traverser tout Paris pour accéder au Graal (Boulogne, pour nous, c’est quasiment le bout du monde, on aurait presque plus vite fait d’aller en Picardie ou en Normandie).

La vache ! La scène est super grande ! est le premier constat qui s’impose, et il aura mine de rien un impact important sur la suite de la soirée. On imagine tout ces petits groupes indie débarquant à Boulogne-Billancourt (dont ils ne doivent pour la plupart même pas soupçonner l’existence) et découvrant une scène deux à trois fois supérieure à ce qu’on leur offre habituellement. L’angoisse se mêle alors au plaisir, car les scènes de cette taille, il faut savoir les remplir. Prenez Too Young To Die, dont le ska-punk bondissant (pléonasme) ouvre le festival : ils ont beau être sept et courir dans tous les sens, ils ont l’air minuscules et leur chanteur a bien de la peine, malgré un abattage certain, à embrasser l’ensemble du public du regard. On jurerait que ses yeux sont aimantés à la droite de la scène, là où se trouve tous ses potes, qu’il ne quitte pas des yeux, manifestement en quête de soutien. C’est que les Too Young To Die sont jeunes, voire très jeunes. On imagine sans mal le stress, et finalement ils s’en sortent plutôt pas mal. Les cuivres, notamment, sont très convaincants, et nonobstant ce problème de scène super grande, le groupe est parfaitement en place. Reste un léger détail : le ska-punk n’est pas notre came, l’on n’y peut hélas pas grand-chose. Dans le genre, ça nous a paru plutôt pas mauvais, même si on pense à La Ruda à peu près un morceau sur deux. Mais nous ne sommes probablement les mieux placés pour en juger, vu que La Ruda et nous, euh…

Les Too Young To Die s’en sortent donc plutôt pas mal malgré la pression ; encore ont-il cette inestimable chance, se situant dans une galaxie totalement différente du reste de la prog’, d’ignorer qu’ils ouvrent pour non pas une, mais deux bêtes de scène. Car avec l’arrivée de Bobby Conn et de ses sbires, dont on ignore tout ou presque, c’est une autre soirée qui commence. Nettement plus déjantée, soniquement surpuissante et d’une efficacité renversante. En treillis mais terriblement glam, le groupe enquille les popsongs électrisantes, avec violon kitsch et synthé bricolo. On pense à un genre de Pulp heavy, tout aussi dégingandé mais carrément plus percutant. Un sacré coup de tonnerre qui enchante le public et nous fera filer acheter le dernier album en date (en fait une réédition de Rise up (Fire Records), paru en 1998 et malheureusement moins péchu de ce que l’on a entendu hier soir) en nous disant que quoiqu’il advienne de la suite, on ne verra pas mieux ce soir. Eh bien écoutez, ça se discute.

bonaparte

On en discutera d’ailleurs longtemps après, de Bonaparte, trublions teutons dont le show relève autant (sinon plus) de la performance que de la musique. Les mots manquent pour qualifier un spectacle (le terme, pour une fois, n’est pas usurpé) à la finesse toute germanique, multicolore, costumé et sexy. Au bout de quelques minutes et alors que les danseuses, fort joliment vêtues (mais pas pour longtemps) nous ont balancé quelques biscuits, on se dit qu’on aura décidément tout vu dans notre vie. On est loin du compte puisqu’en cinquante minutes de temps de tout ce que l’univers compte de délires série Z sera passé au crible, avec une énergie stupéfiante. Ces gens doivent être épuisés après chaque concert, impossible autrement. Et les danseurs (oui parce qu’il y a des garçons aussi, un peu plus habillés la plupart du temps) encore plus, qui changent de costumes à une vitesse phénoménale, parfois pour moins d’une minute de chorégraphie. Bonaparte, c’est certain, n’a pour sa part aucun problème pour remplir l’espace (on aurait plutôt tendance à se demander comment fait le groupe sur les scènes plus petites). Le seul problème, c’est que niveau musical ça ne le fait pas plus que ça. Disons que c’est plaisant, efficace, mais un peu pénible sur la fin tant le collectif, manifestement incapable de temps morts, joue tout dans l’énergie et ignore la nuance. La section rythmique bastonne en permanence, le son fait boum boum boum, et comme le confirme l’écoute de leur dernier album, My Horse Is Like You, les chansons dépourvues de leur tenue d’apparat sont assez anecdotiques. Reste qu’il est évident que tout ceci est conçu avant tout pour et uniquement pour la scène, le son n’étant quasiment qu’un support à une performance au sens le plus strict du terme. A voir en chair, os et rimmel, avec assurance d’en prendre plein les mirettes et de ne pas être déçu.

Pour d’obscures raisons techniques qui ne sont pas vos putains d’oignons, nous ne verrons qu’une petite partie des Warlocks, cinq chansons tout au plus. C’est toutefois à regrets qu’on part, car si leur musique est dépourvue de la plus petite once d’originalité (ce qui n’est pas un scoop), l’ensemble est tout à fait probant et autrement plus intense que – au hasard dans la catégorie « je n’ai jamais écouté The Jesus & Mary Chain et je ne vois pas pourquoi on nous compare à eux » – un Black Rebel Motorcycle Club. Le son est excellent, le répertoire (qu’on connaît mal) de qualité. Comme de juste le groupe a du mal à occuper toute la scène, mais de la part de shoegazers on ne peut que l’excuser.

La suite c’est ce soir, avec notamment les très bons Radio Dept. Donc, pour vous, demain dans ces colonnes.