jeudi 4 mars 2010

VIOL - Retour du fils prodigue

...
C'est devenu un peu comme une coutume, qui persiste malgré le temps qui passe et la famille qui ne cesse de s'agrandir. Tous les ans, à peu près à la même époque, Ernesto Violin revient avec les beaux jours et un album qui les illustre à merveille. Et comme certaines traditions ont la vie dure, Le Golb s'en fait l'écho, quelque aigri vient moquer son objectivité, quelque malotru vient le taxer d'extrême complaisance... mais la plupart de ses lecteurs, bien sûr, s'en félicitent. Car s'il fut un temps où ce blog était le seul à chanter les louanges de l'artiste exceptionnel connu sous l'étrange patronyme de VIOL, cette époque est désormais révolue - comme en témoigne la place de l'excellent Love Boat dans le Classement des blogueurs 2009. Ou l'organisation top secrète, en ce 04 mars 2010, d'un véritable VIOL Day, visant à célébrer comme se doit le retour d'un artiste que oui : nous aimons. Dans tous les sens que ce verbe puisse recouvrir.


Cette nécessaire introduction posée (et plus les années passeront plus elle sera nécessaire, et plus elle sera longue), passons aux choses sérieuses. Par exemple à Welfare Heart, quatrième album (déjà) tentant l'improbable pari de gagner sur tous les tableaux. Car si les nombreux amateurs de Love Boat y retouveront tout ce qu'ils aiment chez VIOL (sens inné de la mélodie, mélange subtil de sincère naïveté et d'ironie discrète, voix à fleur de peau...), il est évident dès la première écoute que cet opus est bien plus varié et ambitieux que son brillant prédécesseur. L'exercice est toujours délicat pour un artiste, quoique sans doute un peu moins lorsqu'il est quasiment inconnu : étendre son univers sans pour autant se trahir n'est jamais aisé, et Violin s'en sort étonnamment bien, même si la diversité des climats peut l'espace d'un instant surprendre (du très pop au plus rugueux, en passant par un titre presque jazzy ou un autre fleurant bon le rade des docks de Baltimore) . On serait même autorisé à se dire que l'ensemble est peut-être un poil mons cohérent que par le passé - ou du moins plus éparse. Love Boat était une œuvre particulièrement dense, dont chaque titre donnait l'impression de répondre aux autres. C'est moins le cas ici, l'ouvrage étant clairement divisé en trois parties distinctes se faisant suite plus qu'elles ne s'entremêlent (à la quatrième écoute je me faisais la réflexion qu'il eut tout à fait pu être publié sous la forme de trois EPs). Peut-on vraiment le reprocher à Violin ? est une autre question, si l'on considère que l'une des critiques les plus souvent formulées à l'encontre de son troisième album était le côté (légèrement) répétitif qu'il revêtait sur la fin.

Welfare Heart n'a de toute évidence pas ce problème : il progresse de manière relativement logique, partant de l'insouciance pour se conclure sur un morceau particulièrement déchirant (probablement l'un des plus poignants de son auteur). Et dévoile au passage une collection de chansons dont certaines sont d'ores et déjà inscrites parmi les meilleures que l'on entendra en 2010 : "The Flavor of Love" renoue avec une pop à la fois touchante et entraînante et conclut d'une certaine manière la trilogie (imaginaire) entamée avec "Love Can't Tame the Drunk" et "Song Against Darwin" ; les parfaites "Diary of a Monk" et "Living in a Cemetery" s'inscrivent dans cette lignée de comptines lumineuses dont seul Violin à le secret, à la fois très simples et subitement parcourues d'un ver arrachant un sourire ou une larme. "Make Me Belive in Santa Again" est quasiment imparable (et accessoirement impossible à virer de son crâne une fois qu'on l'a entendue). Il faut un peu plus de temps pour appréhender la seconde moitié de l'opus, moins évidente et moins immédiate, mais là aussi les pépites ne manquent pas, entre un délicieux "Time Travel" et un "2000 Pigs in the Sea" parvenant à être tout à la fois biblique et drôle (j'imagine que ledit Violin bondira en lisant cette phrase - Je ne vois pas ce qu'il y a drôle à voir le Seigneur chasser le Malin ! ) (vous noterez que je ne fais même pas l'effort de faire semblant de ne pas aimer aussi ce garçon en tant qu'individu).

Comme souvent avec VIOL, l'ensemble donne parfois l'impression d'être évadé aussi bien d'un autre temps que d'un autre monde. C'est peut-être ce qui explique qu'arrivé la fin, on n'ait pas envie d'en sortir et qu'on s'empresse d'appuyer sur replay (ou de se refaire les albums d'avant). Il faut dire que ce monde là, de prime abord, semble bien plus sympathique que le nôtre. Les copines des moines ne se moquent même pas de leurs tonsures (déjà, les moines ont des copines), on passe la journée à attendre que le soleil se couche et l'amour est quasiment indestructible (ce qui ne l'empêche certes pas d'être tranchant). Surtout, le talent y est reconnu à sa juste valeur, ce qui ne risque pas d'arriver dans notre monde à nous. Dans lequel un jeune homme brillant peut, pour la troisième année consécutive, nous offrir un très bel album gratuitement, et sans rien attendre en retour.

Télécharger Welfare Heart



Welfare Heart, de VIOL (2010)



Le V-DAY continue chez CISSIE, KLAK, LAIEZZA & GUICHOUNET
...

29 commentaires:

  1. Hé ! Tu ménages tes effets, je ne savais pas qu'il y avait un nouveau Viol !

    RépondreSupprimer
  2. J'ai cliqué sur "télécharger" sans attendre la fin de l'article. C'est grave docteur ? ;)

    RépondreSupprimer
  3. Putain, heureusement que vous matraquez, je n'avais même pas fait gaffe que les albums de Viol :

    - sont ceux d'Ernesto Violin (prononcer vio-lain comme... la Jeanlain), un gonze que je croise par comms interposés de temps à autres (c'est comme si j'étais l'intime avec Thurston Moore : un vrai mec qui sort des vrais disques est là dans le comm juste à côté du mien, dingue !

    - ils sont à télécharger gratos ! même pas sur un site où ça propose de faire un don. Re-dingue !

    Et moi qui avait zappé ça alors que Thom et la bande s'échignent depuis plusieurs années à le faire découvrir, y compris de bonnes notes au CDG et CDB. dinguissimo !

    RépondreSupprimer
  4. Marion >>> oui enfin... il est sur la playlist depuis une semaine...

    Lil' >>> oh là oui ! gravissime !

    Christophe >>> à quoi ça sert que tonton Thom il se décarcasse ?

    RépondreSupprimer
  5. Une fois de plus un très bon album.

    RépondreSupprimer
  6. Après deux écoutes, je plussoie Lune Sérieuse. Très bon album, et "Make Me Believe" aïe aïe aïe... irrésistible :)

    RépondreSupprimer
  7. J'ai quelques réserves sur un ou deux titres mais dans l'ensemble, je trouve ce nouvel album bien meilleur que le précédent. Long live Violin !

    RépondreSupprimer
  8. l'intro de Flavor of love vient de me foutre sur le cul... magique!

    RépondreSupprimer
  9. Il va me falloir quelques jours pour me faire un avis, mais bien sûr c'est bien, comme toujours ;)

    RépondreSupprimer
  10. C'est vrai que les disques d'Ernesto Violin ont un sacré pouvoir addictif.
    C'est vrai aussi que cette vieille pop enjouée et touchante de sincérité se trouvait déjà sur "Love can't tame the drunk", quant à "Song against Darwin", elle était quand même plus pesante et grave.

    RépondreSupprimer
  11. Ce garçon est vraiment étonnant.
    Que de talent chez lui !
    Car en plus de son sens de la mélodie, salué à juste à titre, il faudrait parler de l'aspect de littéraire, de la subtilité de ses textes...
    Bravo à lui, s'il passe par-là (je le suppose).

    BBB.

    RépondreSupprimer
  12. Je suis content qu'il vous plaise.

    @ Klak, c'est vrai que "Song Against Darwin". Mais elle a le même côté "pop-song incandescente". Je trouve.

    RépondreSupprimer
  13. Découvert grâce à toi l'année dernière, je m'y colle ce week-end :)

    RépondreSupprimer
  14. Je ne savais qu'il y en avait quatre. Je ne connais que Love Boat. Ils sont où les autres ?

    RépondreSupprimer
  15. Benjamin >>> Si même le grand Benjamin F. se penche sur le berceau de Violin... ;-)

    H.V. >>> ils seront en ligne sur une page off prochainement, me souffle-t-on en régie. Mais je vous les filerai avant, bien entendu.

    RépondreSupprimer
  16. Bel album. Pas forcément mieux que celui d'avant, mais pas moins bien non plus. En plus le son est meilleur. Par contre je me demande : quite à enregistrer en numérique pourquoi choisir un format aussi pauvre (128kbps) alors que c'est tout aussi facile d'encoder en 320 ? Le son gagnerait franchement en profondeur. Ce serait pas du vinyle mais ça serait déjà mieux non ?

    RépondreSupprimer
  17. C'est marrant, j'y pensais l'autre jour. Mais en réalité c'est un faux débat, très peu de gens sont capables à l'oreille de différencier un mp3 en 320 d'un mp3 en 128 (ou autre)

    RépondreSupprimer
  18. Rentrons de plein pied dans le sujet qui fâche… (on ne pourra malheureusement pas être tout le temps en phase dans cette année 2010)… Je sais à quel point tu aimes ce que fait Ernesto, et ça me désole d'autant plus de te décevoir... mais j'ai trouvé son nouvel album pas terrible du tout. Les précédents étaient pour moi très "prometteurs", parfois inégaux, mais avec quelques très bons morceaux... et là, autant le dire franchement, je me suis copieusement emmerdé en écoutant ce Welfare Heart... non pas qu'il soit nul ou honteux, mais je le trouve... beaucoup trop gentillet (un comble de la part d'Ernesto qui m'a tant fait marrer avec ses critiques si sarcastiques de grands noms du folk et du rock) Dommage, car il a du talent, comme j'ai pu le constater sur les deux précédents, mais là, je ne ressens rien de fort, on dirait qu'il s'est bridé du début à la fin de l'album, j'ai l'impression qu'il ne tente rien, qu'il joue petits bras et essaie juste de faire passer une certaine joliesse... et rien d'autre... Je n'ai rien contre de jolis albums folk ou folk-rock dont le but est juste de nous livrer de belles chansons... mais là, c'est à la fois trop gentil, et pas suffisamment séduisant d'un point de vue mélodique pour faire passer la pilule… enfin, puisqu’il livre assez régulièrement des albums, vivement le prochain, j’espère y (re-)trouver mon compte… et puisqu’il est aussi possible qu’il lise ce que j’écris là, j’espère que ça va l’énerver et que ça se ressentira sur un prochain album plus tendu (avec comme single « Fuck GT »^^…)

    RépondreSupprimer
  19. Oh non, je ne vais pas me fâcher et je suis même relativement d'accord. Cet album est plus léger, pas aussi "fêlé" que les précédents. A part un ou deux morceaux un peu plus sombres, il n'y a pas de chansons comme "Death Letter" (à part peut-être "2000 Pigs in the Sea" qui a ce côté un peu barré dans l'interprétation).

    Maintenant moi, j'adore cette facette insouciante qu'on retrouve sur "The Flavor of My Love" ou "Living in a Cemetery". Mais je comprends parfaitement que ça ne te plaise pas plus que ça, et je n'en suis pas surpris te connaissant.

    Il n'y a qu'un point sur lequel je ne suis pas vraiment d'accord, c'est quand tu dis qu'il "ne tente rien"... parce que tout de même, "Time Travel" ou "The Bridge" sont des morceaux vraiment différents de ce qu'il a l'habitude de faire, qui vont chercher des influences moins évidentes. Je trouve même l'album relativement ambitieux pour une autoprod, parce qu'une fois encore on sent quand même qu'il y a l'envie de faire plus que d'enregistrer quelques chansons dans sa chambre histoire qu'elles existent... bref, de faire plus qu'une simple démo, même si c'est inévitablement limité par le manque de moyens (d'ailleurs, si j'ai une seule crainte pour les albums à venir, ce soit qu'ils soient de plus en plus ambitieux tout en étant condamnés à être ratés pour cause de moyens trop rudimentaires).

    RépondreSupprimer
  20. @Thom : Juste question de newbie avant que le grand Benjamin F (sic) ne se mette à écrire sur ce disque. Bordel de merde y a pas moyen de l'avoir en CD même en déboursant ses 30€ ??? Me dîtes pas que le garçon n'a pas de site et que l'album ne se refile que via des liens sous le manteau (j'ai peur de déjà connaitre la réponse^^). Bon allez je vais mater le SO6EP07 en attendant :)

    RépondreSupprimer
  21. Concernant le site, il est en chantier (en attendant reste le myspace, qui est ici : http://www.myspace.com/ernestoviolin). Pour le physique... bah une sortie numérique reste une sortie numérique (on connaît ça). Cela dit en des temps reculés où ses albums ne sortaient pas numériquement, Ernesto les envoyait à qui lui demandait gentiment. J'ignore s'il en a gravé quelques uns, mais j'imagine que si tu lui envoie un mail sur Facebook pour le lui demander, il ne te dira pas non.

    Chroniqué par le grand Benjamin F. ah putain. Là tout de suite, on passe à la classe au-dessus ^^

    RépondreSupprimer
  22. Ok ça va, je vais me le graver comme un grand :)

    Voyons voir, 500 VU par critique dont 50% qui lisent vraiment, dont 50% qui me font confiance au point d'essayer, dont 20% qui partageront mon enthousiasme. Et bah dis donc une bonne critique devrait bien lui rapporter 25 ventes gratuites virtuelles ! Waouh la classe pour lui (re-sic^^)

    RépondreSupprimer
  23. Attendre, quand le slogan de ton space c'est "20 Fans Can't Be Wrong", 25 ventes gratuites virtuelles (ou l'inverse) c'est énorme ;-)

    RépondreSupprimer
  24. "Il n'y a qu'un point sur lequel je ne suis pas vraiment d'accord, c'est quand tu dis qu'il "ne tente rien"... parce que tout de même, "Time Travel" ou "The Bridge" sont des morceaux vraiment différents de ce qu'il a l'habitude de faire, qui vont chercher des influences moins évidentes."


    Certes, sauf qu'on ne parle pas vraiment de la même chose... je parlais juste de sa musique, pas de son "évolution"... c'est la musique de cet album qui me donne l'impression de "ne rien tenter"... rien qui ne me fasse dire "ah, tiens, là, musicalement, il se passe quelque chose d'un tout petit peu singulier, original" etc... et si j'osais, je dirais même "rien qui ne me fasse dire : là, il se passe quelque chose..." Mais je ne le dirais pas, parce que je suis un type sympa^^

    RépondreSupprimer
  25. Oui bah, là tu exagères en plus je trouve, mais coup de bol c'est mon jour de bonne humeur ^^

    De toute façon comment pourrait-on accorder du crédit à un gars qui met plus à Burzum qu'à Viol et Silver Mt. Zion :-)

    RépondreSupprimer
  26. Bon juste pour dire que suite à la publication de ma critique du Viol, je m'étais un peu enflammé pour les 500 vu. Je sais pas si c'est le lundi de Pacques mais ça faisait longtemps que j'avais eu aussi peu de visites sur un article... :) J'ai du provoquer une loi de Murphy :)

    RépondreSupprimer
  27. Rassure-toi, c'est pareil chez les voisins.

    C'est malheureux à dire, mais les gens traînent plus sur les blogs quand ils bossent que quand ils ont du temps libre. Remettre la France au travail, qu'il disait... ^^

    RépondreSupprimer
  28. @Thomas : Y aurait vraiment un article à écrire là dessus. Que je publie ou non, mes stats des jours travaillés sont en moyenne trois fois supérieures à celles des jours non travaillés. A croire que le gens ne nous lisent que lorsqu'ils se font chier au taffe... :)

    RépondreSupprimer
  29. J'ai noté ça également. C'est encore plus vrai aujourd'hui mais d'une manière générale, le week-end est souvent calme...

    RépondreSupprimer

Si vous n'avez pas de compte blogger, choisir l'option NOM/URL et remplir les champs adéquats (ce n'est pas très clair, il faut le reconnaître).