vendredi 12 juin 2009

Butch McKoy - Slowly Goes the Night

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Certains albums ne peuvent s'appréhender en se satisfaisant de l'histoire officielle, souvent mensongère en matière de rock'n'roll (voir par ailleurs). On pourrait bien sûr piocher dans les bios, dossiers de presse et autres articles pour tenter de cerner Butch McKoy, mais la vérité est toute autre : ce jeune français est né au cours d'une soirée extrêmement chaude et, selon les témoins, un brin sordide à laquelle participèrent, au début des années quatre-vingt, un Michael Stipe particulièrement éméché et un Nick Cave qu'on qualifiera pudiquement de complètement déchiré. Cela semblera sans doute un peu difficile à croire aux jeunes qui nous liront, tout abreuvés qu'ils sont de l'intoxication rockandfuckienne ; ça n'en est pas moins vrai. Il faut dire aussi que Michael Stipe en 1982, ce n'était pas tout à fait celui qu'on connaît aujourd'hui. Et que Nick Cave, ce n'était quand même pas pour rien qu'il organisait chaque soir une nouvelle fête d'anniversaire.


On pourrait donc dire que Butch McKoy est un songwriter américo-australien pourvu d'un passeport français (l'orgie ayant eu lieu à Paris, dans un bouge fermé depuis pour raisons sanitaires), car en rock c'est un peu comme en football : le meilleur moyen d'avoir des grands joueurs est encore d'en trouver un qui ait un peu de sang brésilien ou argentin. Mais ça, bien sûr, vous ne le lirez pas dans les biographies officielles, qui préfèrent raconter que Butch McKoy est tout ce qu'il y a de plus français - sans doute le gaillard tient-il à conserver son anonymat.

Bon... ok, ok : Welcome Home est bien un album français, inutile d'essayer de vous faire gober le contraire (la pochette est tout de même bleu-blanc-rouge). Il n'empêche que lui trouver une filiation française est si périlleux qu'il vaut mieux, sans doute, imaginer que Butch a fait ses classes comme roadie de 16 Horsepower, qu'il a tapé le boeuf avec Nick Cave voire que son parrain s'appelait Bryan McLean. C'est bien dans cette lignée qu'il se trouve, et non dans celle d'un quelconque rock franchouillard, encore moins dans les eaux infréquentables du revival folk-française-mais-qu'est-chantée-en anglais (on laissera chaque lecteur essayer de découvrir lui-même à quelle aberration de la nature je fais allusion). En effet quand les bavardages pseudo-country de ces jeunes gens feraient pleurer de rire n'importe quel américain, Butch McKoy, lui, vient de signer un album si parfaitement maîtrisé que comme ça, sans aide de ma part, jamais vous n'auriez pu supputer qu'il venait de Paris. On pourra toujours ergoter sur est-ce que c'est bien ou pas bien - peu importe. Le fait est que McKoy, comme Jack The Ripper et quelques autres, appartient à une génération de français dont l'identité s'est forgée dans un rock anglo-saxon de (très) bon goût - en l'occurrence celui de Woven Hand ou de Jeffrey Lee Pierce (liste des saines références non exhaustives).

Torturé et lumineux, le Butch enchaîne donc les titres habités et même hantés ("Go Away" et "Watching the TV" resteront sans doute parmi les meilleures chansons de 2009), se laisse parfois tenter par le lyrisme ("My Den Is Yours") mais baigne trop ses compositions de ténèbres pour sombrer dans le balourd ("Feel" trouve un superbe équilibre entre les deux). Parfois carrément poisseux, son album fleure bon le désert et même (c'est si rare par chez nous) le danger imminent. Dans un monde merveilleux, les esthètes feraient un triomphe à ce très bon disque d'indie-folk américaine. Dans la vraie vie hélas, ils ignorent injustement un excellent disque français. Comment s'étonner après qu'on n'ait qu'un goût modéré pour l'histoire officielle ?

Découvrez la playlist Butch McKoy de thomthom1293

👍👍 Welcome Home 
Butch McKoy | Bruit Blanc, 2009


EDIT : l'album n'est disponible que numériquement pour l'heure ; il est également en écoute intégrale sur deezer.
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13 commentaires:

  1. "encore moins dans les eaux infréquentables du revival folk-française-mais-qu'est-chantée-en-anglais (on laissera chaque lecteur essayer de découvrir lui-même à quelle aberration de la nature je fais allusion.)"

    C'est le problème avec l'amour fou, j'ai toujours su que vous me répudieriez un jour.

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  2. Heureusement que les drapeaux anglais et américains ne sont pas bleu, blanc, et rouge, ça permet d'eviter toute confusion :-)

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  3. il m a l air bon son album, faut que j aille écouter ça (merci pour le lien deezer)
    Par contre, t aurais pu quand même citer son groupe, I LOVE UFO, qui a sorti l'excellent "wish" il y a qques années. En +, le morceau que tu a mis en écoute est une reprise de son groupe. Voici l'original :
    http://www.jiwa.fr/track/I-Love-Ufo-104678/Wish-album-159890/Go-away-1191550.html

    Et une ptite vidéo en + :
    http://www.youtube.com/watch?v=lBF7TRmdjKE

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  4. J'ai jeté une oreille. Le morceau Go Away est vraiment bon. Tout ce que j'ai entendu ne m'a pas plus mais c'est pas mal du tout (première écoute)

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  5. bonjour,

    pour votre info, le morceau GO AWAY a été écrit à l'origine par Butch pour Butch... avec I LOVE UFO ils l'ont adapté pour l'album "Wish". Sinon, sachez qu'un nouvel album de I LOVE UFO vient d'être mixé, bientôt en mastering... sorti fin d'année ou début 2010... ce sera le même label que celui de Butch (Bruit Blanc)

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  6. Ernesto >>> c'est le problème avec les grands artistes, il faut toujours leur rappeler qu'on les aime sans quoi ils doutent à la première occasion ;-)
    Votre commentaire n'aura cependant pas été inutile, car j'ai ainsi réalisé que jamais je n'utilisais le terme REVIVAL à propos d'artistes que j'apprécie, même quand ils en font, du revival. Ca ne me viendrait jamais à l'idée de dire qu'Anthony Joseph fait du revival, ou The Coral, ou V...

    Arbobo >>> c'était un peu ça la blague, oui (mais merci, grâce à toi ma femme vient de comprendre ^^)

    Giii >>> merci (de quoi je ne sais pas).

    Nyko >>> en fait je savais qu'il jouait dans un groupe nommé I Love UFO... mais comme je ne connais pas du tout, ça m'aurait semblé assez incongru d'écrire "Butch McKoy, connu pour ses travaux avec ILUFO..." :-)

    Merci beaucoup pour ces liens, je sens que je vais me régaler.

    Matthieu >>> merci pour toutes ces précisions. On va guetter le prochain album alors (enfin pour ma part je vais déjà chercher celui d'avant...).

    Bonne suite de journée à tous.

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  7. Extrait très agréable (je ne connaissais bien sûr pas du tout).
    Sortie digitale, c'est joliment dit, mais encore ? Comment le trouve-je ?
    (non, ne répondez pas, Thom, si c'est en mp3, je ne l'écouterai jamais)

    BBB.

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  8. Mais dites donc... c'est pas con du tout, comme question :-)

    Genre sur sur le site du label ? enfin ça me paraît un bon début...

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  9. je sais que tu sais, mais une perche et tendue pour être saisie, non?
    :oD

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  10. Arbobo >>> oui c'est vrai ;-)

    BBB. >>> pour vous servir.

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  11. Bonjour, je m'occupe du label qui sort Butch McKoy... effectivement ce n'est que du digital... mais le label a des disques... contactez-moi bruitblancbiz@gmail.com... désolé pour la pub

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  12. Pas de problème, en l'occurrence ça s'imposait.

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