mardi 10 février 2009

Pourquoi pas Nickel Eye ?

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Ô janvier, morne mois (1). Pourquoi faut-il que chaque année se répète la même histoire, celle de quatre semaines maudites durant lesquelles les sorties musicales se comptent sur les doigts d’une main ? Sans rire : il y a bien une rentrée littéraire de janvier – pourquoi pas une rentrée musicale ? Comme en 2008 et comme sans doute en 2010, il faudra cette année encore attendre février et mars pour être comblés. Et d’ici-là s’ennuyer ferme… ou (hypothèse positive) profiter de l’occasion pour s’attarder sur des albums dont on n’aurait probablement pas pipé mot s’ils étaient sortis en mai.

C’est le cas du premier album solo de Nikolai Fraiture, plus connu en tant que bassiste métronomique des Strokes que comme songwriter digne de ce nom – et ne nous leurrons pas : là encore, l’idée d’écouter un album solo d’un Stroke ne nous excitait pas spécialement sur le papier. Il faut dire aussi que comme une grande majorité d’individus pourvus d’oreilles on avait été quelque peu échaudé par le dernier disque d’Albert Hammond Jr. Le camarade Stroke de Fraiture, à la guitare pour sa part, n’a-t-il pas réussi en deux ans la prouesse d’agréablement surprendre avec un charmant premier album… pour mieux dépiter avec le second ? Ajoutez à cela un disque totalement insignifiant à l’actif du batteur Fabrizio Moretti et vous comprendrez qu’en cette période de grand froid on aurait été prêt à écouter à peu près n’importe quoi… sauf un Stroke en solo. Seulement voilà : « Stroke en solo » est régulièrement synonyme de « n’importe quoi » ! Du coup, pris à notre propre piège, nous voilà à nous coltiner l’écoute de The Time of The Assassins – que Fraiture publie ces temps-ci derrière le pseudo pour le moins transparent de Nickel Eye.


De ce point de vue reconnaissons que même s’il convient de doucher certaines ardeurs les premiers échos, tous positifs, n’étaient pas mensongers. The Time of the Assassins tient plutôt bien la route, et si l’on n’y trouvera rien de particulièrement transcendant Fraiture s’y est cependant entendu pour proposer un album agréable et cohérent, à inscrire dans la lignée du premier Hammond Jr (Yours to Keep…) – catégorie artisanat pop sans prétention. Ce n’est d’ailleurs pas le seul point commun entre les deux disques tant on est étonné par une similitude pour le moins troublante… : le bassiste et le guitariste ont tous deux des voix assez proches l’une de l’autre… ce qui signifie vous l’aurez compris qu’à l’instar de Hammond, Fraiture fait lui aussi souvent penser à un Julian Casablancas qui aurait abusé du Lexomil. Même voix blanche et trainante, mêmes accents rageurs lorsque le tempo s’emballe…

Cette évidente convergence soulignée, force est d’admettre que Nickel Eye, pour sa part, a réellement fait l’effort de s’éloigner des sentiers battus par les Strokes pour signer un opus moins prévisible que peuvent l’être – par instants – ceux de Hammond (on ne parlera même pas de Little Joy, dont le seul but semble être de vouloir donner raison à Noël Gallagher lorsqu’il déclare que « Les batteurs ne connaissent rien à la musique » et qu’il n’y a « rien de pire qu’un album de batteur »). Nettement plus acoustique, The Time of the Assassins orchestre une rencontre peu commune entre folk et new-wave – avec un net avantage à ce dernier aspect.

Non que Fraiture apporte quoique ce soit à la new-wave (c’est quand même le bassiste des Strokes, soyons sérieux cinq minutes), mais sa basse fait suffisamment de merveilles pour enrichir des compositions qu’on pourrait aisément confondre avec des classiques oubliés du genre (notamment "You & Everyone Else", curienne en Diable et – pour tout dire – assez excellente).

Le face folk s’avère pour sa part tout aussi conventionnelle mais ne manque pas de charme, avec notamment quelques ballades touchantes (la très Pogues "Fountain Avenue", la rieuse A"nother Sunny Afternoon", ou encore l’émouvante "Where the Cold Wind Blow"), le principal reproche qu’on puisse faire à Fraiture étant d’avoir signé au final un album totalement schizophrénique – les deux genres ne se rencontrant en effet que très rarement. Difficile du coup de déterminer si l’on est en face d’un premier album prometteur ou d’une escapade à classer sans suite, difficile même de dire si l’on espère l’un ou l’autre. L’idéal demeure sans doute de se contenter de prendre The Time of the Assassins pour ce qu’il est : une collection de chansons dans l’ensemble efficaces, dispensable mais non dénuée de fraicheur. C’est déjà bien assez pour un mois de janvier.


👍 The Time of the Assassins 
Nickel Eye | Rykodisc, 2009
 
(1) Article paru en janvier sur Culturofil ...

3 commentaires:

  1. Très sympa, cet album!

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  2. ben oui pourquoi pas ? très sympa effectivement mais les strokes sont la 1ere chose à laquelle on pense avec cet extrait, tout comme quand j'ai entendu little joy sur nova sans rien savoir de son cv (d'ailleurs il est si mauvais son disque ? je m'étais dit qu'il faudrait aller écouter de plus près ...)

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  3. Le premier truc après Cure tu veux dire ? :-)

    Il y a des titres plus folk et assez différent de celui-ci, en fait, qui est plus strokiens en effet... et qui est le seul que j'avais au format mp3, d'où sa présence ici :)
    Enfin ceci dit, vu que je n'arrive plus à insérer mes propres mp3 dans deezer, ce genre de question ne me posera bientôt plus de problème :-(

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