lundi 23 février 2009

Brrrr... on se croirait dans Rebecca...

[Mes livres à moi (et rien qu'à moi) - N°24]  
Rebecca - Daphné du Maurier (1938)


A quoi reconnait-on une bonne héroïne de thriller ? 


Oui là-bas dans le fond ?


A sa blondeur ? Oui, bien sûr.


A sa jeunesse ? Ça oui - forcément.


A sa naïveté ? Je veux bien mais admettez que ça va un peu de pair avec la jeunesse (non non non... vous ne me ferez pas dire que ça va avec sa blondeur)


Hein ? Oui... vous dites, monsieur ?


A son manque total de bon sens ? C'est votre dernier mot ?...


Mais oui ! Evidemment : on reconnait avant tout une bonne héroïne de thriller à son manque total de bon sens (ma mie en ferait d'ailleurs une excellente). Une héroïne de thriller ça se fout toujours le sourire aux lèvres dans des situations pas possibles - soit... mais ça se fout surtout dans des situations que n'importe quelle personne susceptible de réfléchir cinq minutes saurait éviter sans problème - ou du moins sans que la moitié des personnes qui l'entourent ne soient victimes d'horribles drames pour ce faire. Tenez par exemple : épouser un veuf encore mortifié par la perte de sa première épouse. Pas la peine de se creuser les méninges pendant cent-sept ans pour sentir le mauvais plan, non ? Si une de vos amies s'embarquait dans une histoire pareil, à coup sûr vous lui diriez fais gaffe chérie - tu vas te retrouver dans Rebecca. Soit : à la décharge de notre héroïne elle ne peut pas avoir lu l'histoire de Rebecca, puisqu'elle est en train de nous la raconter.


Telle est d'ailleurs le grand coup de poker de Daphné Du Maurier dans ce qui demeure aujourd'hui encore son chef-d'œuvre : parvenir à nous happer totalement avec une histoire extrêmement simple, presque banale, et bâtir son intrigue uniquement avec des climats étouffants (car le fin mot de l'histoire, somme toute, est sans grand intérêt). Avec elle, toujours la même rengaine : un postulat des plus basiques dans lequel la réalité subitement déraille (le mythe du Prince et du Pauvre dans The Scapegoat, les oiseaux qui se dérèglent dans The Birds...), et c'est parti pour quatre-cents pages anxiogènes à souhaites, paranoïaques, toutes de silences pensants et de grisaille menaçante. La formule a beau être immuable... on a beau connaitre l'histoire de Rebecca par cœur... on a beau avoir vu le film cent fois... ça marche pourtant à tous les coup, tant Du Maurier possède un art consommé tant du suspens que du portrait. On pourrait en faire des pages et des pages, mais à la limite pas besoin d'aller jusque-là : chronologiquement parlant, Rebecca est le tout premier thriller de l'histoire de la littérature... c'est aussi, accessoirement, l'un des plus envoutants.


Trois autres livres pour découvrir l'Aristochatte Daphné Du Maurier :


Jamaica Inn (1936)
Frenchman's Creek (1941)
The King's General (1946)
...

20 commentaires:

  1. encore une fois, désolé toussa... mais ça n'étonnera pas l'auteur du blog, je connais plus le film d'Hitchcock sorti deux années après la parution du livre de miss du Maurier...

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  2. Dites, Thom, c'est court. Fatigué ?

    BBB.

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  3. J'avais beaucoup aimé ce livre et son ambiance etouffante. Je viens d'ailleurs de replonger dans du Maurier après avoir lu "Vera" d'Elizabeth von Armin, qui m'a beaucoup fait songer à "Rebecca". Tu connais ?

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  4. Doc >>> fais gaffe, ton commentaire a presque un rapport avec l'article :-)

    BBB. >>> fatigué, non... mais des fois il n'est pas utile d'en faire des pages et des pages pour dire ce qu'on a à dire ^^

    Lilly >>> je connais von Armin, mais pas Vera. Cependant... ce sont effectivement, dans l'absolu, deux auteures présentant de nombreux points communs. Faudrait que je jette un oeil à Vera à l'occasion...

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  5. Oui, c'est vrai qu'en plus, Rebecca n'a pas le profil du "chef d'oeuvre oublié".

    BBB.

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  6. Disons que Hitchcock a fait beaucoup se réputation, alors même que son auteure était déjà une star littéraire à l'époque.

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  7. voilà un nom d'auteur qui m'a toujours tenu à l'écart,
    peut-être parce que dans ma mémoire bordélique il s'entrechoquait avec guy des cars

    (ou peut-être tout bêtement parce que les thrillers psychologique,s je les fréquente rarement en livre, va savoir pourquoi)

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  8. C'est marrant... quand j'étais gosse, les Du Maurier trainait en effets dans les cartons chez mes grand-parents... à côté de Guy Des Cars. Il faut dire qu'ils étaient deux des auteurs les plus lus, en France, dans les années 50 / 60

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  9. oui t'as raison Thom, un juste retour à l'ordre est judicieux ;-)

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  10. Et tant pis pour ton titre :-)

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  11. J'ai rêvé la nuit dernière que je retournais à Manderley...

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  12. Brr... arrête, on se croirait dans Rebecca... ;-)

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  13. (pour toi profane : la phrase de KMS était évidemment une private - c'est en fait la première phrase du roman)

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  14. Moi j'ai toujours eu un grand faible pour Rebecca ainsi que pour les deux romans que tu cites en dessous, drôle de coïncidence ! J'aimais bien aussi 'L'auberge de la Jamaïque" mais je me demande si je ne le trouverais pas très vieilli en le relisant aujourd'hui. En revanche, Rebecca, la Crique du Français, Le général du Roi... resterons toujours des souvenirs forts et des livres chers à mon coeur. Et cet envoûtant "J'ai rêvé la nuit dernière que je retournais à Manderley", l'atmosphère hantée de cette maison à laquelle on accède par une route sinueuse cernée d'arbres noirs, a inspiré nombre de thrillers depuis, à commencer par l'excellent "Sac d'Os" de Stephen King. Rebecca pour une fille, c'est aussi un roman sur la tentation permanente de se déprécier, de ne pas imaginer ce qui, chez soi, peut séduire l'homme qui vous a séduite...

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  15. Effectivement... enfin cela dit, cette tentation existe aussi chez les hommes. Et je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'être une fille pour retrouver ça dans Rebecca (c'est vrai aussi que Louise - la femme qui sommeille en moi - m'y aide beaucoup... :-)

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  16. (sinon tu as oublié de citer l'Ancre des rêves dans les excellents livres inspirés de Du Maurier)

    (du coup je le fais)

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  17. Tu as tout à fait raison ! Je pense que ce livre fait partie depuis toujours de mon paysage mental...

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  18. J'ai tout à fait raison, oui. L'Ancre est un excellent livre :-))

    Et effectivement... Rebecca est le seul livre dont l'influence soit latente quand on sent l'Ancre des rêves... enfin "influence", je veux dire par-là qu'en fait j'imagine en les lisant les mêmes "bords de mer" (tu vois ce que je veux dire).

    Sinon tu parlais plutôt de la Jamaïque... en fait je l'ai relu il y a pas longtemps, et je l'ai trouvé toujours aussi bon. Je ne sais pas s'il a vieilli... par contre ce qui est sûr, ce quand on connait Rebecca par coeur (comme c'est mon cas, du moins en 2009), ça peut sembler un peu "fade" par moment, un peu comme un brouillon du chef-d'oeuvre à venir. Impression que je n'avais évidemment pas eu au moment de ma première lecture.

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  19. C'est déjà bien si tu trouves la Jamaïque toujours aussi bon, c'est rassurant ! Je ne sais pas pourquoi j'ai peur qu'il ait vieilli.
    Sinon pour l'influence de Rebecca sur mon roman... c'est marrant parce que je ne l'aurais pas vu si tu ne me l'avais pas fait remarquer. Comme quoi on sait rarement par quoi on est hanté... je compte sur toi pour me le dire quand j'aurai fini le prochain roman ;-)

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  20. Au contraire : je te souhaite que je n'y vois pas la moindre influence ;-)

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