mercredi 10 septembre 2008

Médecin de garde des sots

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Depuis deux ans et demi que Le Golb sévit dans cette étrange région qu'on nomme blogosphère, il ne vous aura pas échappé que je n'ai eu de cesse de tenter de mettre en perspective les échos entres les différents arts, une marotte comme une autre sans doute due à un constat qui m'a particulièrement troublé lorsque j'ai débarqué il y a déjà pas mal d'années sur la toile : les disciplines artistiques, la plupart du temps, y sont particulièrement cloisonnées - ce sans véritable raison (comme l'ont je crois démontré les deux Crossover des blogs 1). J'ai donc dépensé beaucoup d'énergie à rapprocher continuellement littérature et musique (de loin les deux domaines que je maîtrise le mieux), à essayer d'appliquer les références de l'une à l'autre, à chercher l'intertextualité où elle n'était pas toujours... ce pour au final me heurter systématiquement au même constat d'impuissance : la littérature est un art, la musique en est un autre, et les deux se loupent tout de même plus souvent qu'elles ne se rencontrent.

Preuve de cela ? La vanité totale de nos longs débats à propos d'une éventuelle (et fort conditionnelle) littérature rock, inexistante quoiqu'on en dise pour une raison somme toute très simple : la littérature n'a nullement besoin ni du rock ni même de la musique pour exister (et inversement), le concept de littérature rock ayant avant tout été déposé par une poignée de rockeux ignares incapables de s'intéresser à un roman qui ne recoupe pas leurs petites préoccupations nombrilistes (sinon carrément sectaires par moment). Dans l'imaginaire pour le moins limité du rockeux de base un roman rock est avant tout un bouquin multipliant les scènes de sexe et de défonce, à ce tarif-là n'importe quel clodo capable d'aligner trois mots sera rock et le nigaud Beigbeder pourra légitimement être considéré comme l'Iggy de la littérature - on comprend mieux la médiocrité consternante des sauveurs du rock que nous pondent les anglo-saxons à une vitesse uniquement égalée le gouvernement Fillon en matière de réformes. Pensez-vous que les rock-critics (car ce sont bien eux qui sont responsables de cela) auraient eu la finesse de chercher dans une hypothétique littérature rock quelque chose se rapprochant de l'étonnante liberté de ton, de forme, de fond... véhiculée par cette musique qu'ils aiment tant ? Que nenni : là où n'importe qui d'un tant soit peu cultivé chercherait dans cette mystérieuse littérature rock une esthétique, les plumitifs rock se contentent depuis des années de courir après les colifichets. En ce sens la récupération par les rockeux d'auteurs comme William Burroughs (parce qu'il se droguait, principalement) ou Charles Bukowski (qui méprisait le rock) 2 a quelque chose de tout aussi confondant que la prolifération récente de romans se réclamant du rock avec la même naïveté que Besancenot se réclamant du Ché ou ma petite cousine se réclamant de Britney Spears (quoi ? Qui a dit : Keith Me ?). Que certains veuillent considérer le rock comme un art majeur... pourquoi pas ? Ce n'est assurément pas mon point de vue, mais libre à eux - je serai toujours ravi de discuter de ce genre de chose. Que les mêmes essaient de me vendre une sous-littérature écrite avec les pieds par une poignée de tâcherons peinant à sortir de l'adolescence comme une émanation de cette musique qui me touche si profondément... et là, je vois rouge. Ou je ris - faut voir. Car si la hiérarchisation d'une musique se mesurait à la valeur de sa littérature dérivée, nul doute que tout le monde s'accorderait pour dire que le rock est un art parmi les plus mineurs qui soient. 3

A bien y réfléchir il y a de toute façon dans l'approche de l'un (le rock) et de l'autre (la littérature) trop de divergences culturelles pour que le rapprochement tienne la route bien longtemps. La première de toutes ayant déjà été soulevée ailleurs dans ces pages : il s'agit, bien évidemment, du culte de l'adolescence, du héros teenager, de la jeunesse éternelle... pour ne pas dire tout simplement du jeunisme. Un truc que l'imaginaire collectif rock a d'ailleurs piqué à la littérature, ignorant semble-t-il qu'en la matière Rimbaud était plus proche de l'exception que de la règle. De ce point de vue le rock - mais cela vaut en fait pour beaucoup de musiques populaires (à l'exception notable du blues) - est clairement à la ramasse par rapport à tous les autres arts, qui pour leur part ont bien compris (et depuis un bail) que le talent ne faisait que se bonifier avec le temps. C'est qu'un jour ou l'autre il faudra bien expliquer à Kevin, vingt-et-un ans et un roman punk à son actif, pourquoi les éditeurs refusent de publier son bouquin complètement immature tandis que les labels signent à tour de bras des groupes proto-punk-garage de deux ans ses cadets ! Mûrirait-on plus vite en matière de musique ? A priori, non. Disons qu'en toute logique, objectivement (tous termes absolument bannis du langage rock), il n'y a aucune bonne raison pour que le rocker soit le seul artiste qui soit parfaitement mature à vingt ans - ou l'écrivain le seul artiste qui ne le soit absolument pas au même âge. Il n'existe à notre connaissance aucune construction ADN spécifique aux rockers, pas plus qu'aux bluesmen ni aux cinéastes. Mis à part les danseurs pour d'évidentes raisons physiques, rien ne justifie que l'écrivain soit plus ou moins mûr que son voisin musicien au même âge... si ce n'est un conditionnement culturel qui ne laisse de m'étonner, attendu que le rock est probablement le seul domaine avec le football où l'on considère généralement que vous êtes un dinosaure passés trente-cinq ans. Et pourtant... force est de constater qu'arrivé à cet âge canonique le public comme la critique commencent à recevoir vos albums avec un zest de condescendance amusée qui ne fera que s'amplifier jusqu'à l'intolérable si tant est que vous n'ayez pas eu la judicieuse idée de mourir à l'âge du Christ. A croire que l'amateur de rock est nettement plus sensible que d'autres à ces concepts de mode et de hype qu'il conchie en permanence, assertion pas forcément idiote tant il adore plus qu'aucun autre brûler le matin ce qu'il adorait la veille au soir. On a vu des groupes (même parmi les plus grands) perdre la moitié de leurs fans parce que leur cheminement ne convenait plus à ces messieurs dames. Radiohead, ou plus récemment Portishead, en savent quelque chose. Ce qui, selon nos sources, amuse beaucoup David Lynch et Paul Auster.

Qu'on ne me fasse toutefois pas dire ce que je n'ai pas dit : je ne trouve pas forcément que c'est sérieux ou louable ou préférable que les écrivains peinent à se faire éditer avant la trentaine, ou qu'un très bon cinéaste de vingt-cinq ans galère pour faire financer ses films. Il va sans dire que bien souvent cette loi immuable (plus les années passent plus les jeunes romanciers ou cinéastes n'ont de jeunes que le statut) obéit à des contraintes bien peu artistiques ; non, ce que je trouve absurde, c'est qu'on soit capable de dire d'un rocker qu'il est fini au bout de trois albums et qu'en plus on se drape dans la sacro-sainte objectivité pour oser énoncer ce qui la plupart du temps n'est ni plus ni moins qu'une aberration. C'est sans doute vrai concernant quelques Syd Barrett, mais globalement la règle du Too much too soon est de loin la plus crétine parmi toutes celles régissant le rock (et pourtant Dieu sait qu'elles rivalisent toutes de crétinerie !). Le fait est qu'à lire certains commentaires dans la presse ou sur le Net il m'arrive de me demander si les codes du rock n'ont pas été construits à l'exact inverse des lois de la nature artistique, des concepts d'œuvre, de travail, d'accomplissement de l'artiste... etc. Le mythe de la mort à vingt-sept ans ? Peut-être... il n'empêche que si c'est absurde en soi (imaginerait-on l'œuvre de Bowie s'arrêter à ses vingt-sept ans... soit donc juste avant Diamond Dogs ? Que serait devenu le rock si Jagger ou Page étaient morts avant d'accomplir Sticky Fingers et Led Zeppelin IV ? Et on ne parlera pas de Dylan, qui tel qu'il est parti publiera son meilleur album sur son lit de mort...), ça l'est encore plus comparé aux autres arts. A trente ans l'œuvre de Wagner n'en était qu'à ses balbutiements. A trente ans Zola n'avait pas écrit la moitié des Rougon-Macquart, et la plupart des ses plus grands chef-d'œuvres restait à venir. A trente ans, Hitchcock en était encore au muet ! Quant à Balzac... à trente ans, il n'avait quasiment rien publié. On comprendra dès lors ma moue sceptique ou amusée ou irritée (selon l'humeur du moment) lorsque tel ou tel chroniqueur essaie de m'expliquer que Pete Doherty est fini, que tel ou tel rocker de vingt-huit ans a tout dit, que Radiohead après quinze ans de carrière n'a plus rien de neuf à apporter (comme si, du reste, apporter du neuf avait le moindre en ce sens en matière d'art, comme si la nouveauté était une valeur artistique au même titre qu'elle l'est pour une gamme de voitures)...

Rien d'étonnant dès lors que le rock fasse parallèlement à cela le culte des debut-albums, quand dans tous les autres arts on accueille le plus souvent les premières œuvres avec une politesse mesurée. Demandez à n'importe quel fan de rock quel est son disque préféré de son groupe préféré. Sept, huit fois sur dix la réponse sera : le premier. Le premier album comme le premier baiser, sans doute quelque chose hérité de ce pucelage si encombrant pour le nerd - allez savoir. Qu'on me trouve un seul fan de Hitchcock dont le film préféré serait The Pleasure Garden. Ou un fan de Lynch qui considérerait qu'il n'a jamais fait mieux qu' Eraserhead . Ou un dingue de Philip Roth trouvant le seul roman qu'il ait publié avant trente ans (Letting Go) essentiel. Ou un amateur de Zola persuadé que son chef-d'œuvre serait La Confession de Claude (premier roman si capital que quasiment personne ne l'a lu, à tel point qu'un nombre sidérant de gens très cultivés est persuadé que le premier livre de Zola est Thérèse Raquin... soit donc le quatrième !). En revanche des gens considérant que Led Zeppelin n'a jamais été aussi bon que sur I, que la seconde moitié des années soixante marque le déclin des Beatles ou que Cure n'a jamais été aussi épatant que sur Three Imaginary Boys... ça, vous en trouverez à la pelle !

Ceci dit à l'inverse, la littérature n'est en rien exempte de l'excès contraire, à savoir que pour sa part elle refuse obstinément ce qui relève pourtant de la plus élémentaire évidence... au bout d'un certain nombre d'années ou de livres, il arrive parfois qu'un écrivain soit en fin de course, s'essouffle, tourne en rond... etc. Peut-être est-ce dans le fond exactement pour la même raison, c'est à dire parce que les écrivains entament leur carrière globalement plus tard... mais l'âge est absolument tabou en matière de littérature, au point que, comme je le relevais ironiquement il y a quelques mois, tout le monde trouve génial que Salvador ait enregistré jusqu'à quatre-vingt dix ans quand on ne trouvera personne, la même semaine, pour être impressionné par la longévité de Robbe-Grillet (actif et même hyperactif jusqu'à quatre-vingt six ans pour sa part). Bob Dylan continue à publier des albums à soixante-sept ans ? C'est formidable ! C'est incroyable ! C'est un dinosaure... non, c'est mieux que ça : c'est intemporel. Bon... par contre Philip Roth, qui a presque dix ans de plus et continue à enquiller les chefs-d'œuvre... bof : c'est un écrivain, c'est normal, ça fatigue moins. Sauf que non, ça ne fatigue pas moins. Et surtout : ce n'est pas moins exceptionnel - simplement ça se dit moins facilement. Alors que les musiciens, plus ils vieillissent, plus ils sont contestés... les écrivains, eux, plus ils vieillissent plus ils sont impressionnants, plus ils sont sages et plus ils ont du succès. Ils sont alors généralement primés (et il faudra qu'on me dise quand même un jour ce que Doris Lessing a publié de si EXTRAORDINAIRE depuis trente ans), presque sanctifiés, peu importe la qualité de leurs ouvrages : ils sont momifiés (c'est le cas de le dire) en position chef-d'œuvre jusqu'à la fin de leurs jours. Le nouveau Butor ? Un chef-d'œuvre ! Le nouveau Garcia-Marquez ? Un chef-d'œuvre ! Le nouveau Vargas Llosa ? Un chef-d'œuvre on vous dit ! Le nouveau McCarthy ? Ah mon vieux : un foutu chef-d'œuvre. Le dernier Banks ? Un authentique chef-d'œuvre ! Etc, etc, etc. On ne va pas tous les énumérer, ce serait beaucoup trop loin. Les faits sont de toute façon là et à lire les critiques on a très régulièrement l'impression que tous les écrivains de plus de soixante ans sont des Bob Dylan en puissance, à tel point que ça n'en est même plus surprenant, c'est juste logique, un genre d'ordre naturel des choses qui se serait installé bien avant notre naissance. Même les auteurs de seconde zone, pour un peu qu'ils survivent, peuvent raisonnablement espérer publier un chef-d'œuvre à l'aube du quatrième âge (je connais au moins trois auteurs qui me lisent et qui viennent de suite d'investir dans un tube de DHEA). Ça m'a particulièrement frappé quand sont parues les dernières critiques du dernier Russel Banks (un chef-d'œuvre... mais de toute façon Russel Banks n'écrit que des chef-d'œuvres, tout comme Kundera et une dizaine d'autres qui devraient a priori être rejoints prochainement par Ian McEwan et Martin Amis). Tant pis si dans le fond personne n'est dupe, et tant pis si le lecteur un tout petit raisonnable s'apercevra sans doute aisément que le dernier Norman Mailer, The Castle in the Forest, est une innommable daube qu'il peinera à finir.

Oh bien sûr... Mailer était un grand écrivain (la conjugaison exacte étant sans doute fut). Bien sûr il ne publiait rien que des chef-d'œuvre. Sauf que ceux (de moins en moins nombreux depuis ce Big Empty aberrant de moralisation primaire) qui prenaient encore la peine de le lire savaient bien, eux, que Mailer n'avait quasiment plus rien écrit de grandiose depuis Black Messiah au début des années quatre-vingt. The Castle in the Forest, pathétique bio fictionnée d'un Hitler de comic-book, n'en est que l'ultime témoignage. On ne sait trop quoi en faire, de ce bouquin, tant il est clairement l'œuvre d'un vieux monsieur pataugeant dans la semoule, se battant désormais plus avec lui-même que contre les réactionnaires qui constituaient autrefois ses plus farouches ennemis. Histoire de les choquer une dernière fois avant de casser sa pipe, voilà qu'il se choisit un sujet vaguement sulfureux (la jeunesse de Hitler, narrée à grand renfort de métaphores christiques et de scènes graveleuses), malheureusement le résultat final est plus triste que choquant en dépit d'une longueur effectivement scandaleuse. Si on m'avait dit que le seul truc pire que Hilter revisité par Eric-Emmanuel Schmitt c'était Hitler revisité par Mailer, j'avoue que je ne l'aurais pas cru. Je ne vous mentirai pas : je n'ai pas été au bout. Trop mal écrit, trop mal construit, trop n'importe quoi... quand j'ai appris qu'il devait y avoir un volume deux j'ai acquis la certitude que je ne lirai pas la dernière œuvre de Mailer, ce qui bizarrement ne m'a pas choqué outre-mesure. Et pourquoi faire d'ailleurs ? L'histoire a déjà choisi son camp : au cas où l'ignoreriez encore, The Castle in the Forest, livre éminemment rock'n'roll (bah si, y a de la rage et de la branlette) est un formidable chef-d'œuvre.


Stéphane Guillon est con (ce n'est pas tout à fait vrai mais que ne ferais-je pour une rime ?)


Alors que je ne regarde quasiment jamais la télé passées les infos voilà que je suis tombé par hasard samedi soir sur l'émission de Thierry Ardisson, émission que j'ai regardée d'un œil absent, principalement déprimé par le fait de prendre mon premier apéro sans riettes de thon depuis des lustres. Après une discussion particulièrement soporifique entre Jack Lang et Gérard Miller (que je croyais mort) qui me fit me rappeler pourquoi justement je ne regardais habituellement pas la télévision (à savoir qu'en dépit de la multiplicité des chaînes on y entend toujours les mêmes trucs énoncés par les mêmes personnes), voilà que le Maître des lieux annonce l'arrivée imminente de Stéphane Guillon - a priori LE moment phare de l'émission puisque c'est ce à cet instant que sont intercalés successivement le zapping et la pub. Ça faisait bien longtemps que je ne l'avais pas vu, le Guillon. Que pourtant j'aimais bien autrefois (j'ai même vu son amusant spectacle). Hélas voyez-vous l'un des principaux dommages collatéraux de ma fréquentation assidue de la blogosphère ces dernières années c'est justement que les Guillon, Carlier et consorts me semblent désormais terriblement fades tant leurs boutades (pourtant souvent ciselées) me semblent limitées. Jamais peut-être n'ai-je autant mesuré mes propres progrès que samedi dernier en tombant sur cette chronique guillonienne, qui n'avait rien de plus mauvais que celles que je regardais il y a quelques années... sauf que je n'ai fait qu'esquisser un sourire amusé ici ou là quand autrefois je riais à gorge déployée. Qu'on songe donc qu'il y a trois ans, alors que je bricolais « Les Chroniques d'Amour, Gloire & Beauté » et « La Télé de Zippo », on me conseillait d'envoyer mes textes au Maître Guy Carlier - alors au faîte de sa gloire. Trois ans plus tard, après cent vingt-deux chroniques du dépressif et un nombre conséquent d'éditos, après presque mille articles en tout genre sur Le Golb... qui pourrait bien avoir encore l'idée stupide de me comparer à Guy Carlier, de me conseiller de lui demander conseil... mazette ! Guy Carlier, je me le bouffe tous les jours au petit dej' (vous comprenez maintenant pourquoi je ne déjeune pas le midi), je garde les bons souvenirs avec lui dans une époque révolue où le snipping restait une activité marginale... mais je garde aussi à l'esprit qu'à l'époque d'Internet il n'a plus guère d'utilité au sein de la société médiatique. C'est vrai, ça : beaucoup de gens essaient systématiquement d'opposer les blogueurs aux critiques professionnels, ce qui est (je l'ai dit ailleurs) une absurdité pure et simple. Le cas des chroniqueurs de tout crin n'est-il pas autrement plus préoccupant, qui campés sur des positions souvent installées par le copinage ne font qu'étaler chaque semaine la médiocrité d'une activité se résumant à tirer à boulets rouges sur l'énorme ambulance de la télévision (ce qui revient peu ou prou à traiter un illettré comme un inculte - on admettra que ça ne va pas chercher loin). Samedi, lorsque Guillon a lâché une vanne sur Steevy, j'avoue que j'ai été tout aussi consterné par le niveau de ladite vanne que par le fait qu'il y ait encore des gens pour se souvenir de l'existence du susnommé Steevy. Les chroniqueurs dans les émissions télé, c'est un peu la télé-réalité pour les intello-beaufs - si n'importe quel bouffon capable d'aligner trois vannes peut prétendre au statut d'humoriste pourquoi ne pas plutôt engager Zaph (infiniment plus drôle et pourvu d'une palette littéraire autrement plus riche que tous ces guignols) ? Je ne dis pas que Guillon n'est qu'un bouffon ; juste qu'il est si prévisible qu'on se demande comment des gens peuvent le suivre chaque semaine. J'ai été stupéfait d'anticiper la plupart de ses vannes (ça ne m'arrive évidemment jamais avec Zaph, mais il faut bien dire que Zaph n'est pas un vulgaire comique - c'est un écrivain qui s'ignore), et lorsqu'il a lancé son jeu du Qui a mis enceinte Rachida ? j'ai été partagé entre l'agacement et la gratitude : c'était en effet une idée que j'avais eue pour Le Golb... heureusement grâce à Guillon le plagiaire (il nous lit chaque semaine en espérant vainement puiser chez nous quelque inspiration recyclable) je me suis rendu compte à quel point cette idée était naze - MERCI STÉPHANE (allez, tous en chœur).



Parce qu'en toute franchise si le jeu n'est pas dénué d'humour il reste tout de même pour le moins limité (comme une chronique de Guillon, donc, qui pourtant est capable de bien mieux - en témoigne donc son spectacle... inégal mais aux qualités d'écriture évidentes), à plus forte raison parce que je suis croyez-moi très bien placé pour savoir qu'on ne pourra pas compter bien longtemps sur Rachida Dati pour jouer le jeu. Unis dans un même amour du comique de répétition nous avons en effet tenté, Stéphane et moi-même, de contacter la Ministre de la Justice pour lui demander si par hasard elle ne pourrait pas conserver encore le secret quelques mois - histoire de laisser grimper notre audience. En vain : Rachida Dati a laissé nos appels poignants sans réponse, il faudra donc se résoudre à l'évidence : ce qui doit arriver arrivera incessamment sous peu ; Dati finira bien par le cracher, le nom de son amant - puisque la presse pipole (Voici comme Libé) ne la lâchera pas avant... puisqu'elle transformera probablement à plus ou moins court terme sa vie privée en cauchemar, comme si ça nous intéressait, nous, de savoir avec qui elle couche, a couché ou compte recoucher. La vérité est que dans le fond on s'en tape tous. Que cet acharnement des médias autorisés ou non à savoir ce qui ne les regarde pas est tout simplement écœurant et qu'il en aura fallu, des kilos de Connerie Humaine, pour me donner envie, à moi, d'affirmer ma sympathie à notre insupportable Garde des Sceaux. Voir la presse de gauche, pourtant toujours prompte à faire la morale, s'exciter presque autant que Voici sur ce sujet a quelque chose d'absolument consternant... heureusement je suis là, comme toujours, pour redresser tous les torts - moraliste peut-être mais moralisateur sûrement pas. Vous voulez savoir la vérité ? C'est moi. C'est moi qui ai couché avec Rachida (je peux l'appeler par son prénom, on se connaît bibliquement), j'avoue tout. C'est moi le père de son enfant (on admettra que c'est quand même nettement plus classe que Laporte ou Arthur), et je tiens à vous le dire : ma vie privée ne vous regarde pas. Laurent Joffrin aura beau écrire un édito indigné pour expliquer qu'il y a conflit d'intérêts - JE M'EN TAPE.

A présent je vous demanderai à tous de respecter mon intimité et, s'il vous plaît, de ne pas réagir à cette révélation en commentaire.

A tous ceux qui ergotaient la semaine dernière à propos de cette paternité : vous comprenez aujourd'hui que j'aie été particulièrement mesuré dans mes réponses. Vous n'êtes pas obligés de me croire, mais je n'ai pas honte d'avoir fait ce que j'ai fait (même si nous ne sommes plus ensemble, Rachida demeurera toujours la mère de mon enfant).

A Stéphane : cette semaine j'ai été sympa - ça ne sera pas toujours le cas ; aussi si dans ta chronique de samedi prochain tu venais à prétendre être le père de l'enfant de Rachida... sache qu'il faudrait envisager le pire - et le pire c'est... enfin tu vois ce que je veux dire.


Top of the Golb

Top of the Golb, oui - vous avez bien lu. Car à l'heure de révéler les résultats de notre grand concours de l'été (le Top of the Flops of the Pops of the Blogs - au cas où vous auriez hiberné pendant trois mois) il est plus que temps pour moi de vous décerner à tous un Golb d'Or d'Honneur pour cette entreprise collective je dois dire assez amusante à (re)lire. Je ne ménagerai pas de faux suspens : je n'ai rien gagné du tout au cours de cette compétition. Et vous savez quoi ? Il me semble que c'est tout à fait normal. Bien que dépositaire du nom et maître de l'exercice (au cas où un martien passerait par hasard par ici : initialement le Top of the Flops est une des plus anciennes rubriques de ce blog), j'ai été plus que largement surclassé par bon nombre d'entre vous. De quoi faire mentir certains prophètes affirmant après mon post sur le Velvet que de toute façon l'affaire était pliée, sans parler des apocalypticistes osant prétendre qu'on voterait pour moi « pour me faire plaisir ».

Sans doute certains attendent-ils à présent un quelconque bilan, voire même des réponses à certaines critiques émises ici là (mon sans doute est évidemment de pure forme). Amusant tout de même comme des gens qui vous lisent quotidiennement depuis des années peuvent malgré tout si mal vous connaître : s'il y a un bien une chose que je n'ai jamais faite ici, c'est ferrailler avec tel ou tel par article interposé (sauf avec cet enfoiré de Guillon, mais vous admettrez que c'est différent). Répondre à un article par un autre article, à une attaque par une autre attaque, à une moquerie par un persiflage... voilà bien quelque chose que je n'ai jamais fait et ne ferai jamais sur Le Golb - sauf à vouloir absolument m'adonner à une entreprise stérile au long d'un article que plus un seul lecteur ne sera susceptible de comprendre sous trente jours. Le plus mauvais article du Top of the Flops pourra toujours être lu, apprécié ou détesté dans cinq ans. Qu'en sera-t-il des deux pépites (pourtant fort bien écrites) de notre ami Civil Servant dans deux mois... ? ... dans un an... ? Je ne raviverai donc pas un débat déjà partiellement périmé, et qu'on attende pas de moi ici un de mes célèbres élargissement (vous savez ? Quand je prends un événement blogosphérien précis pour le remettre en perspective ?) car il n'y a rien à élargir quand quelques bons camarades aux caractères bien trempés se noient dans une incompréhension passagère. Une digression sur l'humour ? Le second degré ? Allons donc : et pourquoi pas la liberté d'expression tant qu'on y est ?! Si ma vieille expérience du Web m'a appris une chose, c'est bien que dans ces eaux troubles on est presque toujours le fasciste de quelqu'un ou le démago de quelqu'autre - ces insultes-là fusent tellement vite qu'on en viendrait presque à regretter le bon vieux Cass'toi pauv'con des familles. 4

Alors non : on n'en parlera pas (même si en fait on le fait quand même). La plaisanterie aurait duré trop longtemps ? L'impression de surenchère ne doit pas masquer le fait que le Top of the Flops a été réalisé par plusieurs personnes pendant les vacances, et qu'il n'y avait aucune bonne raison, sous prétexte que tous les piliers du comptoir Le Golb-Art-Rock avaient déjà roulé sous la table au bout d'un mois, d'interdire aux autres de s'amuser aussi. Le jeu aurait dû s'arrêter après l'article de G.T. ? Il est vrai que c'eut été un sensationnel article de clôture... dix jours après le début du concours. Adressez-lui donc, à lui, vos lettres de protestations. Il y aurait eu des débordements ? Tant mieux ! Que serait un concert de rock sans baston ? Non vraiment, tous ces reproches émis ces dernières semaines ont quelque chose d'un brin décalé - mais à la limite tant mieux. Au moins ce vote de clotûre aura-t-il eu le mérite de rendre au Top of the Flops son statut initial... celui d'un jeu, où une bande de sales gosses particulièrement déchaînés avaient fait le pari de casser tous leurs jouets d'un coup le temps d'un été. Des enfants pourris gâtés, certes... tout comme les Stones. Avouez au moins que pour une fois, cet été, on s'est pas fait chier dans une blogosphère généralement mortifère en cette période (j'en soupçonne même un ou deux d'avoir annulé leurs vacances tout exprès).

Allons... je sais que c'est long, mais que serait une cérémonie de remise de prix sans un long discours pontifiant pour l'inaugurer ? Il est temps de décerner les prix.

Et nous commencerons par les Prix du Jury. Oui, je sais, ce n'était pas prévu ; cependant il ne s'agit pas de prix sortis de nulle part mais bien d'émanations de vos propres votes, qui réparent les injustices inhérentes à ce genre de concours mine de rien assez réglementé.


- Prix Spécial du Jury : Zaph, pour Heureux les simples d'esprit (dans lequel il tient également le rôle principal). Zaph, c'est vrai, était disqualifié. Mais certains ont tout de même tenu à voter pour lui ! Alors, tout en demandant aux gens de voter "normalement" j'ai eu l'idée de comptabiliser les fois où Zaph s'est retrouvé classé par inattention... et de les transférer dans une catégorie créée juste pour lui (car après tout, Zaph est unique). Zaph finit donc premier, avec trois points, devant Zaph (deux points) et Zaph (un point).

- Grand Prix du Fuckin' Jury : Laiezza, pour l'ensemble de son œuvre. Insultée un nombre impressionnant de fois durant le concours, mais toujours enthousiaste et de bonne camarade, Laiezza a fait péter les stats en devenant la blogueuse la plus souvent citée (c'est à dire non pas au nombre de points), se classant d'ailleurs tout à fait bien dans toutes les catégories. De la part de quelqu'un qui quelques semaines avant le début du concours se plaignait de ne pas avoir de lecteurs sur son blog... on admirera la performance ! En deux mois, Laiezza est devenu quasi-pilier de la communauté, reçoit désormais des mails énamourés de certains et, dans le cadre du concours, tient facilement la dragée à tous ces machos de la blogosphère... bref : incontestablement, la grande gagnante du Top of the Flops, c'est elle !


A présent passons aux prix qui vous intéressent tous.


Le Top of the Flops d'Or du Meilleur Désespoir de l'Eté est attribué à...

(roulement de tambour)

XAVIER, pour l'ensemble de son œuvre ! Un titre attendu, annoncé par tous les analystes, un classement sans surprise (Xavier et Cissie se sont battus comme de beaux diables durant tout le scrutin, cette dernière étant rejointe à la dernière minute sur la seconde marche par un Civil Servant qui semble en avoir désespéré beaucoup !)... cependant on avouera que tout autre résultat eut été injuste tant ses cassages de Nirvana puis Sonic Youth se sont avérés diablement efficaces.


Le Prix Holy Fuck, récompensant l'article le plus rock'n'folkement incorrect de cette compétition, est attribué à...

(double roulement de tambour)

KLAK, pour Closer, avec Joy Division dans le rôle du groupe neurasthénique et Ian Curtis dans le rôle du cafard ! Durant le scrutin, nous assistâmes à une lutte à couteaux tirés entre KlaK et ses deux dauphins, chacun prenant la tête à tour de rôle, se faisant ravaler par le peleton... finalement, avec 30 points, notre vaurien favoris l'emporte d'une courte tête.

Médaille d'argent : LAIEZZA, pour Ace of Spade (28 points... et qui était encore première une demi-heure avant la fermeture des bureaux)

Médaille de bronze : DRAGIBUS, pour Disintegration (26 points)


Enfin, le Prix Johnny Rotten - Mark E. Smith de la hargne bileuse, récompensant le blogueur le plus odieux, abject, gerbant (et donc génial) pour l'ensemble de son œuvre, est attribué à...

(triple roulement de tambour plus trompettes et klaxons)

G.T. ! Bien sûr ? Euh... en fait, non : pendant un moment, le vénérable tenancier du plus célèbre des blogs fighto-culturels a même carrément été à la masse, effectuant une remontée fulgurante le dernier jour du scrutin. Avec 36 points il sauve les meubles et sa réputation... mais on est loin du plébiscite annoncé par l'IFOP (et loin du remboursement de ses frais de campagne !).

Médaille d'argent : CHRISTOPHE (33 points... battu sur le fil alors qu'il écrasa le classement pendant quasiment toute la durée du scrutin)

Médaille de bronze : THOM (26 points... alors c'est ça ? DIX POINTS me séparent de G.T. ? Ah bah vous faites une belle bande de faux-cul le reste de l'année !!!)


Merci à tous pour vos participations et vos votes. A noter que le classement général est évidemment disponible sur simple demande.

La semaine prochaine, pas d'édito (faut dire que j'en ai cramé trois en un cette semaine !), mais malgré tout promis : on va bien rire !



1 à ce propos et avant que Lou ne nous pose la question : oui, nous planchons à l'heure actuelle sur le futur Crossover 2009 - qu'on peut d'ores et déjà promettre comme une apothéose absolue du concept initié en ces pages par une belle matinée de gueule de bois

2 sans oublier Easton Ellis, et beaucoup d'autres... à vrai dire tout auteur cool et un peu critique vis à vis de la société est candidat à la
récupération rock - comme si l'immense Bret Easton Ellis pouvait d'une quelconque manière être légitimé par un long article bourré d'inexactitude l'affiliant au rock !

3 et de grâce qu'on ne me ressorte pas Hunter S. Thompson : il n'est que l'exception confirmant la règle, et de plus... contrairement à une contre-vérité trop largement répandue il n'a JAMAIS prétendu écrire des "livres rock"... il a même d'ailleurs écrit assez peu de choses en rapport avec le sujet, quand on reprend l'ensemble de son œuvre.

4 à l'inverse il est des phrases que vous ne lirez quasiment sur jamais sur cette énorme agora qu'on nomme le Net : Je ne sais pas..., Ce n'est pas grave..., J'ai eu tort... d'ailleurs pour la peine je le dis aujourd'hui : Civil Titi, j'ai eu TORT de m'énerver contre toi, et même : c'est pas grave.

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