mardi 23 mai 2006

Daft Punk - Theme for a Gloubiboulga Night

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Âmes sensibles s'abstenir, l'histoire que je vais vous raconter là est très, très triste...

C'était il y a bien longtemps, au vingtième siècle.

Une drôle d'époque où tout le monde ne jurait plus que par la musique électronique. Et pour une fois, les Français, habituellement à la ramasse, étaient carrément à mort trop fiers parce qu'il y avait même un mouvement baptisé french touch. Pour la première fois depuis Debussy, les français étaient à l'avant garde d'un courant musical. Dans la french-touch, on trouvait un peu tout (Air, Kid Loco, Dupieux) et surtout beaucoup de rien (Dimitri From Paris, Benjamin Diamond... allons, ne riez pas, il n'y a pas si longtemps même la presse sérieuse ne jurait que par eux).

Les punks crétins éponymes se situaient précisément entre les deux (le tout et le rien donc).

Objectivement, leur quatre premiers EPs étaient des merveilles et en cela, ils ont réellement pris part à la "révolution électronique" (le terme mérite quelques guillemets relativistes). Aujourd'hui cultes, ils initièrent toute une génération - la mienne - plutôt bercée à la pop et au rock à la techno mais encore aussi, indirectement au funk et à la disco (celle qui groove et s'éclate). Leur excellent premier album a été un carton planétaire, et a plus qu'un peu contribué à sortir la musique électro du ghetto : oui, on pouvait être un musicien électronique créatif et pop et pas forcément un DJ se contentant de sampler à tout va.

La suite est hélas moins glorieuse...


On ne saura sans doute jamais ce qui s'est passé dans le cerveau embrumé de Bangalter et de Homem-Christo... un abus d'ecsta durant une rave ? C'est possible. En tout cas il n'y a que sous ecsta ou (éventuellement) en faisaint ses courses dans un supermarché qu'on peut apprécier les deux albums suivants : les mecs se sont mis à faire l'inverse de ce qu'ils faisaient avant, à savoir justement sampler à tout va. Là encore on aurait pu le supporter, le problème c'est qu'ils se sont mis à sampler des grosses merdes discos (la moche), et là par contre on ne trouve plus grand-chose pour leur défense. Pour vous dire, même Nikola Sirkis l'a déclaré à l'époque : "Daft Punk vient de sortir un album hommage aux années 80 en samplant le pire des années 80". Alors si Sirkis vous le dit mes amis, et si moi je suis d"accord avec lui, morbleu, c'est que c'est vrai. Faut dire qu'il sait de quoi il parle.

Depuis, Daft Punk a essayé de se remettre en scelle, avec un album intitulé Human After All, plutôt rigolo si on considère que justement leur musique est plus désincarnée que jamais.

Et sinon ce best of ? Eh bien, il permet de se rendre compte de manière très intéressante de l'incohérence de leur parcours : Musique, vol.1, c'est à la fois le pire ("One More Time", "Robot Rock") et le meilleur ("Musique", "Da Funk", "Burnin' " ou "Harder Faster Stronger", rare de leurs hits récents à provoquer quelque émoi chez l'auditeur) de la techno des années 90/2000, compilés en un seul CD. On en ressort au choix : perplexe (hypothèse 1), lobotomisé (hypothèse 2), fâché avec la techno, les punks et même avec les crétins (hypothèse 3). Pour ceux qui voudraient découvrir l'électronique, ce n'est sans doute pas le disque idéal mais c'est sûrement, d'un point de vue sociologique, le plus intéressant. Le plus inquiétant demeurant évidemment le titre : non pas tant à cause du terme "musique" (même s'il est déplacé un titre sur deux) qu'à cause du "Volume 1" qui lui est accolé - ce qui laisse entendre qu'il y aura une suite. Moi je dis : planquez les enfants ! Il n'y a qu'eux qui peuvent apprécier - et ce n'est pas bon du tout pour leur santé...


👎 Musique, vol. 1 
Daft Punk | Virgin, 2006